lundi 8 octobre 2012

Marche de nuit non-mixte pour l'appropriation de l'espace public par les femmes

Vendredi soir 5/10/12, marche de nuit non mixte femmes et lesbiennes à Rennes comme je l'avais annoncé dans un précédent billet. Le Mensuel de Rennes en a parlé ici.


Évidemment, ayant écrit un billet sur les milices du patriarcat, je ne pouvais qu'en être, comme environ 120 à 130 autres femmes. Nous avons marché deux bonnes heures dans le centre ville, parmi les fêtards du vendredi soir, sans incident notable, hormis un type qui a essayé de briser le cortège avec sa voiture, parce que son feu passait au vert. Vingt minutes plus tard, il n'avait pas bougé d'un pouce, immobilisé par nous, femmes en colère, et c'est lui qui était vert !

Thème : toutes ensemble n'ayons plus peur de sortir la nuit. Extrait du manuel du Collectif féministe à l'initiative de la Marche :

"Marre d'être matée, interpelée, importunée, sifflée, insultée et ce, dans la rues, les transports, les cafés, les jardins publics, quand nous sommes à pied, en vélo, seule ou avec des copines. Chaque jour, en traversant l'espace public, nous recevons des milliers de signaux qui nous confirment que nous vivons bel et bien dans une société où la rue devrait appartenir aux hommes. Il est parfois difficile de réagir car nous n'avons pas toujours les ressources physiques et mentales pour riposter à celui/ceux qui nous agressent. Ce que l'on sait, en revanche, c'est qu'opposer un geste ou une parole de résistance, même minime, à qui veut vous réduire à l'état de morceau de viande jugé bon à consommer, ça fait du bien au moral ! S'interdire de banaliser le machisme quotidien, ça aide à conserver son amour propre. Bien sûr, si on répond, il faudra s'attendre à recevoir des "salopes" que l'on lance aux femmes insoumises, mais cela créera surtout de la surprise et de la déstabilisation."

Les banderoles



Les pochoirs (nous aussi, nous avons laissé nos marques de passage sur le territoire parcouru) : 


Et très poétique, le clitoris ailé qui vole ! 

La qualité des photos n'est pas extraordinaire, mais je n'ai pas pu faire mieux : j'ai un petit appareil numérique et la nuit, avec des éclairages calamiteux comme place de l'Hôtel de Ville, ce n'est pas facile.
Selon cet article du Monde, La rue, fief des mâles alors que les femmes s'y déplacent plus, les besoins de hommes et des garçons prévalent : terrains de foot, street parks, tous ces lieux bétonnés et artificialisés grignotent partout la biodiversité et accaparent l'espace. Notez qu'ils ne les empêchent pas d'envahir de leur jeux de ballons et de leur planches les espaces non dédiés : ils sont les maîtres partout dans l'espace public, alors que les filles et les femmes ne vont pas plus sur les street parks qu'elles ne fréquentent les terrains de foot. Pour mémoire, le dernier street park à Rennes a coûté 500 000 euros, payés par TOUS les contribuables, mâles comme femelles. Et jamais une rue ne porte le nom d'une femme, ce qui n'incite pas à l'assertivité quand il faut, en plus, faire face au harcèlement de rues. Une autre façon d'envahir l'espace public, mais que personne ne relève jamais, ce sont les gros engins foreurs et bétonneurs qu'ils nous inflignent sur les rues et sur les trottoirs : nounous à poussettes 4 places, vieilles femmes à chiens ou déambulateurs, mères de familles à trolleys et paniers à provisions, vous êtes priées de changer de trottoir à vos risques et périls et comme vous pouvez. Eux ont une caution en béton : ils travaillent la preuve, c'est qu'ils sont payés, vous, c'est plus douteux, vous oeuvrez surtout dans le bénévolat familial et la gratuité ! Et ce qui est gratuit ne vaut rien, c'est archi connu.

PS : Je rajoute que la rue appartient aux mâles à statut social et grosse caisse polluante, pères de familles opulents ; en effet, voulant prendre une photo d'un pochoir sous les arcades de la poste, j'ai dû affronter une de ces grosses ampoules aveuglantes fichées dans le sol et rangées à 50 cm d'intervalle sur le passage. Devant ma protestation contre ce matériel urbain aveuglant, une des manifestantes m'a expliqué qu'elles servaient à éloigner les SDF des lieux, comme les bancs à accoudoirs au milieu, et sièges-coque où il est impossible de s'allonger pour dormir, ou encore les "décorations" en faux pots de fleurs ou fausses jardinières dans les recoins d'immeubles destinés, eux, à empêcher les SDF de s'asseoir. La rue est inhospitalière aussi aux mecs déchus de la société patriarcale, incapables d'atteindre les hauteurs sociales que les mâles s'imposent et imposent à tous. Malheurs aux déchus et aux faibles, pas de pitié ! 

Je mets aussi un lien sur l'intérêt de la non-mixité et des espaces non-mixtes pour les femmes : quand les femmes se mettent ensemble pour se libérer de la domination et de l'occupation des hommes, elles font bouger des montagnes ! C'est sans doute la raison pour laquelle ils tentent par tous les moyens de maintenir la division parmi nous.

8 commentaires:

  1. "alors que les filles et les femmes ne vont pas plus sur les street parks qu'elles ne fréquentent les terrains de foot"


    pourquoi ? elles sont interdites de skate et de foot ? Les féministes ne seraient pas un peu sexistes ? :-)

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    1. Je ne fais que constater : les femmes et les filles ne sont pas sur les terrains de foot et quand il y en a deux au milieu des gars sur les street parks, elles ont tendance à tenir le mur ! Mais la mauvaise foi patriarcale consiste bien sûr à inverser les rôles pour mieux nier son omnipotence et son omniprésence : traiter les féministes de sexistes.

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  2. Très bonne initiative mais seriez-vous en mesure de le faire aussi dans les quartiers où la présence des femmes dans l'espace public est la plus marginale, c'est-à-dire , pas dans le centre des grandes villes mais plutôt dans les quartiers sensibles des banlieues ?

    Malheureusement je pense que ce ne serait pas évident du tout et peut-être assez risqué !

    Par rapport aux commentaires sur le foot ci-dessus il est clair que la non marginalisation des femmes dans le sport est cruciale car on sait bien que le contrôle des femmes passe par le contrôle de leurs corps.

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    1. Ce serait risqué à 130, sans doute pas à 1300 ou 3000 ! J'ai twitté un lien il y a deux jours sur les femmes de Tombouctou au Mali qui manifestent contre les islamistes d'Ansar Dine ! C'est autrement plus courageux et dangereux.
      http://www.slateafrique.com/95923/mali-les-femmes-de-tombouctou-contre-attaquent
      De toutes façons, il n'y a pas de quartiers comme cela à Rennes, et le centre ville, un vendredi soir, est choisi à dessein pour toucher le plus possible le grand public des sorties du week-end. A ma connaissance, c'est la 2ème fois que cette marche est organisée selon ces mêmes modalités.
      Oui, traiter les féministes de sexistes quand elles montrent du doigt l'absence de parité et d'égalité est une des grandes entourloupes des patriarcaux. Entourloupe qui ne gruge que celleux qui veulent bien se laisser entourlouper.

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  3. Ça serait bien si il y avait plus de marche comme ça, il faut les harceler ces misos :)

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    1. Il y a les actions collectives mais aussi les actions individuelles. Pour les collectives, chercher dans la presse et sur Internet, ou chez les associations féministes mixtes ou non-mixtes. Il y en a partout.
      Mais il y a aussi l'activisme individuel : ne pas se laisser maltraiter, ne jamais encaisser l'humiliation, aller déposer des plaintes ou des mains courantes, cela attire l'attention sur ce délits et marque les esprits, et être solidaire des femmes ; quand j'agis individuellement je me sens vraiment seule, sans solidarité autour de moi ou alors rarement : flics femmes, DDTE, Procureures de la république, avocates... Donc plus on sera, plus on nous écoutera et entendra.

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  4. "quand les femmes se mettent ensemble pour se libérer de la domination et de l'occupation des hommes, elles font bouger des montagnes !"

    Oui voilà ce qu'il faut dire et répéter ! Les femmes qui ont obtenu le droit de vote l'ont obtenu par le nombre, la solidarité, l'internationalisation du mouvement et le courage de se mettre dans des situations parfois carrément dangereuses.
    Il n'y a que ça. On ne nous donnera rien sans que nous nous battions.
    Vraiment.

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    1. Et je rajoute : "Si tu t'écrases, ils t'écraseront". Il faut résister et se battre.

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