vendredi 28 février 2014

Guérillères 4

" Elles disent, esclave tu l'es vraiment si jamais il en fût. Ils ont fait de ce qui les différencie de toi le signe de la domination et de la possession. Elles disent, tu ne seras jamais trop nombreuse pour cracher sur le phallus, tu ne seras jamais trop déterminée pour cesser de parler leur langage, pour brûler leur monnaie d'échange leurs effigies leurs œuvres d'art leurs symboles. Elles disent, ils ont tout prévu, ta révolte ils l'ont d'avance baptisée révolte d'esclave, révolte contre nature, ils l'appellent révolte par laquelle tu veux t'approprier ce qui leur appartient, le phallus. Elles disent, je refuse désormais de parler ce langage, je refuse de marmotter après eux les mots de manque manque de pénis manque d'argent manque de signe manque de nom. Je refuse de prononcer les mots de possession et de non possession. Elles disent, si je m'approprie le monde, que ce soit pour m'en déposséder aussitôt, que ce soit pour créer des rapports nouveaux entre moi et le monde.


Elles disent, malédiction, c'est par la ruse qu'il t'a chassée du paradis de la terre, en rampant il s'est insinué auprès de toi, il t'a dérobé la passion de connaître dont il est écrit qu'elle a les ailes de l'aigle les yeux de la chouette les pieds du dragon. Il t'a faite esclave par la ruse, toi qui a été grande forte vaillante. Il t'a dérobé ton savoir, il a fermé ta mémoire à ce que tu as été, il a fait de toi celle qui n'est pas celle qui ne parle pas celle qui ne possède pas celle qui n'écrit pas, il a fait de toi une créature vile et déchue, il t'a bâillonnée abusée trompée. Usant de stratagèmes, il a fermé ton entendement, il a tissé autour de toi un long texte de défaites qu'il a baptisées nécessaires à ton bien-être, à ta nature. Il a inventé ton histoire. Mais le temps vient où tu écrases le serpent sous ton pied, le temps vient où tu peux crier, dressée, pleine d'ardeur et de courage, le paradis est à l'ombre des épées.

VINCENTE   CLOTILDE   NICOLE   SUKAINA   
XU-HOU   ANACHORA OLYMPE   DELPHINE   LUCRECE   ROLANDE   VIOLE   BERNARDA   PHUONG   PLANCINE   CLORINDE   BAO-SI   PULCHERIE   AUGUSTA

Elles disent, vile, vile créature dont la possession équivaut au bonheur, bétail sacré qui va de pair avec les richesses, le pouvoir, le loisir. En effet n'a-t-il pas écrit, le pouvoir et la possession des femmes, le loisir et la jouissance des femmes ? Il écrit que tu es monnaie d'échange, que tu es signe d'échange. Il écrit, troc, troc, possession acquisition des femmes et des marchandises. Mieux vaut pour toi compter tes tripes au soleil et râler, frappée de mort, que de vivre une vie que quiconque peut s'approprier. Qu'est-ce qui t'appartient sur cette terre ? Seule la mort. Nulle force au monde ne peut te la dérober. Et -raisonne explique-toi raconte-toi- si le bonheur c'est la possession de quelque chose, alors tends à ce bonheur souverain- mourir.

Elles disent, honte à toi. Elles disent, tu es domestiquée, gavée, comme les oies dans la cour du fermier qui les engraisse. Elles disent, tu te pavanes, tu n'as d'autre souci que de jouir des biens que te dispensent des maîtres, soucieux de ton bien-être tant qu'ils y sont intéressés. Elles disent, il n'y a pas de spectacle plus affligeant que celui des esclaves qui se complaisent dans leur état de servitude. Elles disent, tu es loin d'avoir la fierté des oiselles sauvages qui lorsqu'on les a emprisonnées refusent de couver leurs œufs. Elles disent, prends exemple sur les oiselles sauvages qui, si elles s'accouplent avec les mâles pour tromper leur ennui, refusent de se reproduire tant qu'elles ne sont pas en liberté.


Quatre paragraphes choisis dans "Guérillères" de Monique Wittig - Les Editions de Minuit - 1969.
Photo : Monique Wittig en 1979.

vendredi 21 février 2014

L'aéroport NDDL, c'est toujours NON !

Puisque le projet n'est pas abandonné et qu'il est toujours sur les rails : manifestation anti-aéroport Notre-Dame des landes à Nantes samedi 22 février 2014 à 13 H devant la Préfecture.



Après trois mois d'inondations en Bretagne, à Morlaix (29), Quimperlé (29) -à propos Kemper en breton veut dire confluent-, Guipry (35)..., pour causes de pluies incessantes, de ruissellements qui gonflent les ruisseaux et les rivières, on continuerait à artificialiser des sols, à les couvrir de béton et de bitume, à détruire des zones humides dont on sait qu'elles ont cruellement fait défaut pendant ces pluies hivernales ? Les agriculteurs industriels ont rasé depuis 40 ans des milliers de kilomètres de talus en Bretagne, planté des hectares de maïs pour nourrir des animaux, pieds distants de 15 cm, sur des terres tassées qui n'absorbent pas l'eau mais au contraire la font ruisseler sur les pentes, ils ont abattu des haies d'arbres dont les racines tenaient la terre et absorbaient l'eau, aujourd'hui on entend leur plainte devant leurs champs détrempés et leur future récolte compromise : ils sont à la fois cause et victimes de ces inondations.

A Notre Dame Des Landes, nous tenons encore ces bocages et ces zones humides dont nous avons besoin. Il est temps de prendre conscience des ravages conjugués de cet acharnement de béton et de bitume, de colonisation des milieux de biodiversité par les humains expansionnistes et imprévoyants, et par les éternels barons locaux qui veulent inscrire leur mandat politique dans le béton et dans des équipements coûteux et obsolètes qui plombent l'avenir, et dont l'utilité n'est pas prouvée. Transporter dans une zone reconstituée des salamandres et des grenouilles, plus quelques plantes (ce sont les mesures de compensation prévues) pour mieux accaparer leur ancien habitat est une comédie sans nom.


Le projet d'aéroport NDDL est un projet du XXème siècle. Nous sommes au XXIème : les circonstances ont évolué, les besoins de gens ont changé et la menace climatique se précise. La place du projet NDDL est maintenant au musée. Il est temps d'envisager de faire autre chose, en concertation avec les gens qui l'occupent et y habitent, de ce bout de territoire préservé, acheté par la puissance publique et qui donc appartient aux contribuables. Il n'y a pas qu'en Amazonie qu'on détruit la biodiversité.

Non au projet NDDL ! Vinci, dégage.



Liens : Naturalistes en lutte, ACIPA, les infos de la ZAD : Triton-nes crété-es contre béton armé, Pétition Avaaz : Sauvons les espèce menacées par le projet d'aéroport.

ACTUALISATION 22/2/14 - 13 H
Pour suivre en direct la manifestation de Nantes, cliquez sur
les fils Twitter : @BleuLoireOcean
EN DIRECT Notre Dame des Landes
@alexandreturcat journaliste AFP Nantes, ou @telenantesinfo.

ACTUALISATION 23/2/14 - 12 H


Lien - Récit et photos de la manif du 22 février à Nantes heure par heure sur le site PARIS-LUTTES INFO 
NON à la violence !
 

vendredi 14 février 2014

Virilité, rites et fantasmes de dévirilisation

Pendant que la France se déchire sur les études de genre (les éditocrates surtout, le peuple français a autre chose à faire et à penser !), que le mal nommé "Printemps Français" veut expurger les bibliothèques municipales de livres qu'il déclare unilatéralement non conformes à sa conception rance des rapports sociaux de sexe, pendant que Copé dans la foulée propulse un livre (Tous à poil, Rouergue Editeur) dans les meilleures ventes d'Amazon, des images de la virilité en action envahissent les réseaux sociaux -ceux en tous cas suivis par les militant-es de la cause animale.

Une première image émane d'un twitterstorm (un des rites de la Twittosphère : déclencher un orage de tweets pour dénoncer une pratique jugée nocive), ici à destination d'Andrew Cuomo, Gouverneur (@NYGovCuomo) :  en effet l'état de New York initie les jeunes garçons à la chasse. Ils ont le droit d'exercer leur (mal)adresse en tirant sur les écureuils, gibier présumé à leur taille.


L'exemple vient de l'aristocratie. Cette semaine, le Prince William (toute sa famille chasse, privilège d'ancien régime réservé aux aristocrates qu'en France la Révolution a malheureusement, non pas aboli, mais étendu au peuple, ce qui en fait un acquis intouchable, notre deuxième amendement à nous en quelque sorte), William donc, est pris en photo à la chasse au sanglier juste avant le lancement d'une campagne qu'il parraine, destinée à lutter contre le braconnage (SIC). Vous noterez que c'est comme d'habitude l'homme (mâle), top model auto-proclamé de la Création, qui décide de qui peut vivre et qui doit mourir : le sanglier "pullule", selon sa déclaration unilatérale, on peut donc le tuer, la biodiversité n'en souffrirait pas, en tous cas, celle non tolérée par le déclarant.

Du même ordre, grosse émotion sur Internet cette semaine à propos d'un girafon né en captivité au zoo de Copenhague (Danemark, l'autre pays de l'élevage et de la boucherie) qui a été abattu (put down) par les éleveurs du zoo au motif qu'il n'avait pas les bons gènes car il était consanguin. Il était en bonne santé, jeune, et un autre zoo avait même proposé de l'adopter : en pure perte. Le zoo en a fait un spectacle : vous noterez la présence d'enfants très jeunes au premier rang des spectateurs. On peut retrouver l'article sur CNN incluant une vidéo. Marius, le girafon est  ensuite autopsié et découpé en morceau, puis donné à manger aux lions de l'enclos voisin, toujours devant les "spectateurs", comme si la mort était un spectacle !

Le directeur du zoo explique que tout cela est fait pour montrer aux enfants les lois de la nature, la "leçon de vie" habituelle des chasseurs qui donnent la mort (voir dernier lien en bas d'article) : les lions mangent les girafes, triste loi de la jungle, n'en déplaise aux citadins niais que nous serions devenus. Oui, les lions, carnivores, mangent des girafes et d'autres animaux, après une sélection minutieuse de leur proie, après une course poursuite harassante et dangereuse (une ruade de girafe doit vous étaler, mort pour le compte), pas en attendant qu'on sacrifie au fusil ou à la seringue une pauvre bête à qui on ne laisse aucune chance. Dans la jungle, Marius aurait eu sa chance, celle de la solidarité de son troupeau, de la course, de la fuite et de sa force. A Copenhague, il n'a eu qu'à venir sans méfiance, au devant de ses soigneurs qu'il connaissait. Quand les hommes se prennent pour un deus ex machina ou la Nature, ça donne l'affaire Marius. Mais à quelque chose malheur est bon : Marius et son histoire mettent les projecteurs sur les pratiques des zoos, enclaves artificielles de conservation de vie sauvage où l'on doit mimer les lois de la nature pour ne pas se laisser déborder par les naissances : les zoos conservatoires euthanasient. C'est désormais au vu et au su du public. Boycottez et girlcottez les zoos.

Je vous épargne les nombreuses images qu'à généré le massacre, rituel masculin japonais, des dauphins de la baie de Taijiet celui des globicéphales, tradition patriarcale ancestrale des Iles Féroés, toujours au Danemark, (vous noterez, sur une photo de l'article en lien, un jeune garçon chevauchant un cadavre mutilé), puisque certaines personnes ne supportent pas les images de massacres. Je ne les blâme certainement pas : mais je rappelle que ce ne sont pas les images de massacres qui sont choquantes, ce sont les massacres. STOP aux massacres d'êtres vivants : pour le plaisir, pour la chasse de loisir, pour des rituels d'entre-soi masculins, et pour des raisons utilitaires. Les animaux ne nous appartiennent pas, ils existent pour des raisons qui leur sont propres (Alice Walker). Nous ne sommes qu'une espèce parmi les autres.

Je termine par un appel à signature et à manifester (pour celleux qui habitent dans le Nord-Pas de Calais ou qui peuvent s'y rendre) : la très virile Fédération du Chasse du 59 organise du 17 au 23 février des "Ch'tis Fox Days" (déjà, rien que le nom patois globish, c'est pathétique), une semaine de piégeage de renards, animal "nuisible" (sans rire), le chasseur, étant lui, UTILE et INDISPENSABLE, selon son oukaze vous l'aurez compris. Donc, le samedi 15 février, 14 H Place du Théâtre, les associations de protection animale vous donnent RV à Lille pour une manifestation contre cette abomination. La pétition d'Avaaz est à signer ICI. Vous pouvez aussi écrire au Préfet du Nord ICI. Il est temps de mettre fin à ces pratiques virilistes d'une autre époque.

Les tenants obscurantistes conservateurs -et intéressés- des rôles stéréotypés de genre ne craignent pas tellement les fillettes en pantalon jouant aux jeux de construction Lego : ils n'admettent surtout pas qu'on touche aux privilèges des garçons (préférence de la société, meilleurs postes et salaires, accès au corps et aux services gratuits des femmes...) en les dévirilisant, leur grande frayeur. Il n'y a qu'à entendre les tirades de Zemmour et des pères sur les grues pour s'en convaincre ! Toutes ces pratiques (novilladas, grindaprap aux Féroés, chasses, vénerie, piégeages,...) où l'on initie les jeunes garçons, servent en réalité à les désensibiliser, à engourdir leur empathie naturelle, à les rendre sans pitié, cette qualité réputée de "femme ou de femmelette". L'absence de statut des animaux non humains en droit y aide puissamment. D'où leur résistance à légiférer : voir les écrits de Luc Ferry et de Jean-Christophe Rufin sur le sujet. Exercer sa cruauté sans risque et sans avoir de comptes à rendre à la société, dans différentes formes de chasse et de meurtre des animaux, reste un de leurs derniers privilèges. Il faut que cela cesse.

Liens : Nostalgiques des "vrais hommes" ? 
De l'importance du témoignage des survivants, en récit ou en images.

ACTUALISATION 17/2/14
Plus d'un millier de personnes à la manifestation anti "Fox days" de samedi 15/2 à Lille, à lire sur  France 3 Nord
L'homme a une préférence marquée pour les objectifs "virils", la guerre et la mort  - Valerie Solanas in SCUM Manifesto

samedi 8 février 2014

Quand les carottes sont cuites...

"Les carottes sont cuites" est un idiotisme gastronomique signifiant que la situation est irrémédiablement compromise, sans espoir, selon Wiktionary. Synonyme : c'est la fin des haricots !



Le pouvoir est masculin dans son essence même. Et comme il est sans partage, il permet de faire n'importe quoi, de se conduire comme un voyou sans foi ni lois. Les femmes sont d'avance disqualifiées : trop "émotives", pas assez "barbues", ni "couillues". Et puis, disons-le tout net, en un mot comme en mille, "incompétentes" nous sommes. Cette loi d'airain tolère toutefois une exception : les femmes peuvent hériter du pouvoir quand les carottes sont cuites. Quand il ne reste qu'un tas de ruines fumantes, que le pays est dévasté par des haines raciales recuites, que la faillite économique est patente, ou qu'une institution mondiale tremble sur ses bases, que l'image en est détériorée irrémédiablement. Cinq exemples dans l'actualité récente :


1 - Jóhanna Sigurðardóttir : Avènement au poste de Première Ministre d'Islande en janvier 2009, après le crach financier de 2008 pendant lequel l'économie mondiale s'est effondrée, merci les traders mâles de la finance reine. Les trois principales banques d'Islande, dont la capitalisation boursière était de 900 à 1000 % du PIB (la métaphore de bon sens : ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier fut largement méprisée par ses couillus précesseurs) étaient en faillite, et l'Islande, un pays, pas une entreprise, était en cessation de paiement ! Il fallait le faire, tout de même : ils l'ont fait ! Madame Sigurðardóttir, ancienne hôtesse de l'air, a dû réparer le système bancaire et remettre le pays sur les rails. Elle a été saluée par Forbes comme l'une des 100 femmes les plus puissantes du monde. Elle se serait sans doute contentée d'être reconnue comme parmi les plus compétent-es ! Plus compétente que ses homologues masculins passés et présents, sans aucun doute.


2 - Hellen Johnson-Sirleaf, économiste, actuelle Présidente du Liberia, première femme africaine cheffe d'état élue au suffrage universel, prix Nobel de la Paix. Succède à Charles Taylor, Président du Liberia de 1997 à 2003 : le temps de provoquer une guerre civile, de mettre le feu au pays, d'en faire un tas de ruines et de cendres, des dizaines de milliers de morts, et de déclencher une guerre civile chez la voisine Sierra Leone. Charles taylor a été extradé, emprisonné puis condamné par la Cour Pénale Internationale de la Haye pour meurtres, terreur d'état et viols de guerre. Un très chouette prédécesseur comme on peut voir.


3 - Catherine Samba-Panza, actuelle Présidente élue par le Parlement de transition de la République de Centre-Afrique. Seule dans un pays livré au chaos, à des bandits sanguinaires, aux affrontements religieux et ethniques, aux lynchages, déjà surnommée "Mère Courage" par le Guardian, Madame Samba-Panza fait front à une situation de chaos en succédant notamment au dictateur fou Bokassa, et à un fauteur de coup d'état provoquant une guerre civile, le Général Bozizé. Bon courage, Madame !


4 - Christine Lagarde - Actuelle Directrice du FMI (Fond Monétaire International) depuis 2011, secoué par des scandales de "mœurs" sous la très compétente présidence du super-économiste Dominique Strauss-Kahn, un temps candidat le mieux placé à la Présidence de la France (je garantis avoir entendu ou lu tous ces superlatifs !), soupçonné de multiples harcèlements, d'agressions sexuelles et de proxénétisme. Bref, un "enfant de chœur ", et ultra-compétent. Après sa "démission" forcée par les instances dirigeantes, il est à noter que le règlement intérieur du FMI a été entièrement réécrit pour éviter toutes ambiguïtés dans les relations entre collaborateurs. C'est toujours ça de gagné, on ne va pas faire la fine bouche.


5 - Christiane Lambert, syndicaliste agricole, depuis 2010 première vice-présidente de la FNSEA, puissant et premier syndicat agricole français. Même si la situation n'est pas exactement identique aux précédentes, et même si la présidence de Luc Guyot a été entachée de conflits d'intérêts, il se trouve que ces corporations exclusivement masculines ont une très mauvaise réputation dans l'opinion publique et qu'elles le savent. Contrairement à celles où il n'y a que des femmes parce que les hommes n'y vont pas : le cas des infirmières au zénith de la popularité est emblématique. Christiane Lambert peut donc être considérée comme une femme-alibi (vous voyez bien, on n'est pas des homosexuels refoulés, il y a une femme parmi nous !). D'autant que Christiane Lambert présente, en plus de l'intérêt d'être une femme, celle d'être une petite éleveuse du Maine et Loire dans une corporation qui s'industrialise à marche forcée. Madame Lambert apporte la caution "humaine", "femme", "douce" (selon leurs stéréotypes) dans une corporation brutale d'hommes, de compétiteurs à la (grande) taille critique, cultivant depuis toujours l'entre-soi masculin. Triple avantage, merci Madame !

Une femme au pouvoir est toujours vécue comme une rupture, une entorse à la norme, une innovation, donc dangereuse, comme toute innovation. Elle est placée sous observation stricte, des fois qu'elle ne s'en tirerait pas, pauvre petite. D'où la tentation de lui donner une situation bien pourrie : circonscriptions imprenables en politique, terres brûlées, entreprises sinistrées. Dans ma propre carrière professionnelle, avec le recul, je vois bien qu'on m'a accordé les postes-causes perdues, pendant que les hommes se gardaient la facilité (mieux payée naturellement !), ou que ma candidature est nettement plus acceptable dans les situations les plus challenging. Eux, pas fous, ne s'y risquent pas.

Comme on le voit, quand les carottes sont cuites, mesdames, nous comptons sur vous pour nettoyer les écuries d'Augias, pour remettre de l'ordre dans le chaos par nous créé, pour assainir la situation. Avant notre triomphant retour de pères (paires ?) de la Nation quand la place sera toute propre, grâce à vous. Et puis, quand le train-train quotidien aura fait oublier aux peuples à courte mémoire les vicissitudes passées, on s'arrangera pour vous effacer de l'HIStoire ! Le succès nous sera attribué, les lauriers et les enterrements aux Panthéons nous reviendront de droit. Ainsi va l'HIStoire des Vieux Pères. Je vais conjecturer une hypothèse qui se vérifiera, j'en ai peur : patience Mesdames, vu l'état de la planète, de son climat et de ses terres cultivables, de ses foyers de guerre larvées ou de conflits incandescents, de ses bulles immobilières et financières en devenir, notre gestion se profile à l'horizon. L'humanité dirigée par eux ne fera sans doute pas l'économie d'une catastrophe planétaire.