La radio de blogueurs/blogueuses de l'été 2015, organisée depuis 6 saisons par Lolobobo, is back !
Pour ma participation de cet été, j'ai choisi la chanson de Juliette Noureddine, "Les femmes c'est le diable".
Un texte interprété, chanté sur la diabolisation des femmes, le business lucratif de la religion dictatoriale nommée Patriarcat. Et, puisque c'est la règle du jeu, je tague Euterpe et Zoé Lucider : si elles veulent participer (mais elles feront ce qu'elles voudront), la manière de faire est aussi bien expliquée chez Affichage libre.
Mes précédents chansons de l'été pour la Radio de Blogueurs :
Get a job par Beth Ditto - Gossip en 2013
Jenny par De Palmas en 2014
Le player de la radio des blogueurs/euses
Je rajoute en cadeau Bonux : un Chaperon Rouge antispéciste et antisexiste, assez dans le ton de ce qui précède :
Antisexiste, parce que Chaperon Rouge n'a plus peur du Grand méchant loup, destiné à effrayer les filles pour les faire rentrer et rester à la maison. Au contraire, elle a même l'air plus inquiétante que le lui.
Antispéciste, car les deux se protègent l'une l'autre : elle, un main dans sa fourrure, lui devant elle, montrant les crocs. Un tandem pareil ne craint plus personne, ce sont les garçons qui font peur qui doivent surveiller leurs arrières : le conte traditionnel loupe sa cible et son propos, la fille et la bête ont fait alliance.
Tremblez, boys.
Lien supplémentaire : De 15 au 18 juillet 2015, la Maison des Métallos Paris 11è adapte le texte subversif et culte de Valerie Solanas SCUM manifesto : Scum RODEO Valerie Solanas / Sara Chaumette / Mirabelle Rousseau. Si vous êtes à Paris ou avez l'occasion d'y aller, réservez une soirée dans les dates ci-dessus, dites que vous venez de ma part (vous serez bien reçu.e.s) et... racontez-moi dans un commentaire ;))
samedi 27 juin 2015
dimanche 21 juin 2015
Phallocentrisme du désastre - 2
En ces temps d'encyclique pontificale, et en regardant Nicolas Hulot au 13H15 de France2, dimanche 21 juin, faire le
tour du monde des grands ducs au pouvoir, en substance, les barbus
en robe à dieu viril (pape, patriarches coptes, orthodoxes, imams...) pour les
sensibiliser au changement climatique, j'ai eu envie de citer une nouvelle fois Naomi
Klein " Tout peut changer", son troisième opus, dont j'ai déjà parlé une première fois ici. Bien que certains chapitres soient ardus, je recommande chaudement la lecture de cet ouvrage passionnant.
Au chapitre 12, "Partager le ciel", Naomi Klein voit un espoir pour le climat se lever du côté des Premières Nations. Klein est canadienne : les autochtones, (le Canada est à cette époque une colonie britannique), ont obtenu au 18ème et 19è siècles la signature de traités avec la couronne britannique, au gré des alliances, la guerre faisant rage entre France (au Québec) et Angleterre, pour la possession de territoires. La plupart de ces traités signés avec la monarchie, reconnaissant des droits aux autochtones (piégeage, fourrures, non exploitation de certaines terres des ancêtres...) sont restés inappliqués ou ont été largement bafoués par les ex-colons à l'époque moderne, bien qu'ils n'aient jamais été révoqués. Or, il se trouve que les compagnies extractivistes ont besoin des sols pour creuser et déposer des gravats, et de larges bandes de terres pour faire traverser des oléoducs, de voies ferrées pour transporter le produit de l'extraction, charbon, pétroles de schistes et gaz. Ces installations toutes très polluantes, traversent les territoires concédés aux Premières Nations qui se sont réveillées pour défendre la "terre des ancêtres" contre la prédation des extractivistes. Le mouvement Idle No More (Jamais plus l'inaction) a vu le jour, créé en 2012 par quatre femmes (Nina Wilson, Sylvia McAdam, Jessica Gordon et Sheelah McLean) en lutte contre la colonisation et le patriarcat, puis contre la vente de terres autochtones prévue unilatéralement, sans concertation, par une loi omnibus de Stephen Harper, grand extractiviste devant l'Eternel : Stephen Harper Premier Ministre conservateur du Canada et plus qu'accessoirement, protestant évangéliste. Naomi Klein place beaucoup d'espoir dans toutes les tribus autochtones, tous les peuples premiers de la planète pour défendre le climat et les énergies renouvelables contre l'extractivisme forcené des industriels.
Voici ce qu'elle écrit à propos de Red Cloud (Nuage Rouge) ancien ouvrier métallurgiste devenu pionnier des énergies renouvelables :
" En regardant [Red Cloud] s'affairer autour des maisons, une étincelle dans les yeux, je comprends soudain que c'est cette nécessité de s'adapter à la nature qui rend certaines personnes hostiles aux énergies renouvelables ; il qualifie d'"indianisation" ses bricolages et ses adaptations, qui lui rappellent la construction de sa première éolienne à partir d'une vieille camionnette Chevrolet Blazer 1978 qui rouillait sur sa réserve. En le regardant s'affairer autour des maisons, une étincelle dans les yeux, je comprends soudain que c'est cette nécessité de s'adapter à la nature qui rend certaines personnes hostiles aux énergies renouvelables : même à très grande échelle, ces dernières requièrent une humilité tout à fait contraire à l'esprit qui préside à la construction d'un barrage sur une rivière, à la fracturation de la roche-mère en vue d'en extraire du gaz ou à la domestication de la puissance de l'atome. Les énergies renouvelables exigent de l'être humain qu'il s'adapte au rythme des systèmes naturels, et non qu'ils soumette ceux-ci à sa volonté par la force brutale. [...]
C'est précisément de cette nécessité de s'adapter à la nature que la machine à vapeur de James Watt aurait affranchi l'humanité à la fin des années 1770, en libérant les manufacturiers de la contrainte de construire leurs établissements près des meilleures chutes d'eau et en permettant aux capitaines des navires de se moquer de la direction des vents. Le premier moteur à vapeur commercial, écrit Andreas Malm, "était apprécié pour n'être soumis à aucune force qui lui fût propre, à aucune contrainte géographique, à aucune loi extérieure, à aucune volonté résiduelle autre que celle de ses propriétaires ; il était absolument -ou plutôt ontologiquement- asservi à ceux qui le possédaient".
C'est à cette envoûtante utopie d'une maîtrise totale de la nature que tant de défenseurs des énergies fossiles sont si peu disposés à renoncer. D'ailleurs, lors de la conférence climato-sceptique du Heartland Institute, on n'a pas manqué de tourner en dérision les énergies renouvelables, réduites à des "rayons de soleil" et à des "brises agréables". Le sous-entendu était sans équivoque : les vrais hommes font brûler du charbon. Et il ne fait aucun doute que la transition vers les énergies vertes n'est pas une simple substitution de sources d'énergie, car elle suppose aussi une transformation fondamentale des rapports de pouvoir entre l'humanité et le monde naturel qui maintient celle-ci en vie. La puissance du soleil, du vent et des marées peut certes être exploitée, mais, contrairement aux combustibles fossiles, ces forces ne pourront jamais être entièrement contrôlées par des êtres humains. Et chaque écosystème dicte ses propres règles.
L'humanité se retrouve ainsi à la case départ, en dialogue avec la nature. Les défenseurs des combustibles fossiles et du nucléaire affirment que les énergies renouvelables ne sont pas "fiables", car elles nécessitent de prêter attention à des facteurs comme l'endroit où on vit, la durée d'ensoleillement, la force des vents ou le débit des rivières. Et ils ont raison : les énergies renouvelables, du moins telles que Henri Red Cloud les envisage, imposent une rupture avec le mythe d'une humanité devenue maîtresse de la nature par la volonté de Dieu, et une reconnaissance du fait que nous vivons en relation avec le reste du monde naturel. Mais cette relation est maintenant fondée sur une connaissance de la nature qui dépasse de loin tout ce que nos ancêtres d'avant l'ère des combustibles fossiles auraient pu imaginer. Nous en savons assez pour être conscients de l'ampleur de ce que nous ne pourrons jamais prétendre connaître, mais également pour trouver des manières ingénieuses d'optimiser les mécanismes de la nature dans le cadre de ce que l'historienne féministe Carolyn Merchant appelle l'"éthique de la coopération". "
Les caractères en gras sont de mon fait.
Il va nous falloir renoncer à la domination et à la maîtrise absolue du singe nu sur la nature et toutes ses autres espèces pour tenter de nous maintenir sur la planète : je ne suis pas sûre que le Pape Bergoglio, malgré son encyclique, et tous les autres hiérarques des religions patriarcales, y soient prêts. Pourtant, il devra en être ainsi si nous voulons que l'aventure humaine continue encore un peu sur la Terre, cette force géologique qui nous a laissés passer, et vivre de ses ressources. Le maintien du climat tel qu'il nous a permis de prospérer jusqu'à aujourd'hui est un enjeu colossal pour l'humanité.
Le facebook de Idle No More Paris
Brasiers et cerisiers : le réveil des luttes autochtones au Canada
Widia Larivière : A la défense des femmes autochtones
Au chapitre 12, "Partager le ciel", Naomi Klein voit un espoir pour le climat se lever du côté des Premières Nations. Klein est canadienne : les autochtones, (le Canada est à cette époque une colonie britannique), ont obtenu au 18ème et 19è siècles la signature de traités avec la couronne britannique, au gré des alliances, la guerre faisant rage entre France (au Québec) et Angleterre, pour la possession de territoires. La plupart de ces traités signés avec la monarchie, reconnaissant des droits aux autochtones (piégeage, fourrures, non exploitation de certaines terres des ancêtres...) sont restés inappliqués ou ont été largement bafoués par les ex-colons à l'époque moderne, bien qu'ils n'aient jamais été révoqués. Or, il se trouve que les compagnies extractivistes ont besoin des sols pour creuser et déposer des gravats, et de larges bandes de terres pour faire traverser des oléoducs, de voies ferrées pour transporter le produit de l'extraction, charbon, pétroles de schistes et gaz. Ces installations toutes très polluantes, traversent les territoires concédés aux Premières Nations qui se sont réveillées pour défendre la "terre des ancêtres" contre la prédation des extractivistes. Le mouvement Idle No More (Jamais plus l'inaction) a vu le jour, créé en 2012 par quatre femmes (Nina Wilson, Sylvia McAdam, Jessica Gordon et Sheelah McLean) en lutte contre la colonisation et le patriarcat, puis contre la vente de terres autochtones prévue unilatéralement, sans concertation, par une loi omnibus de Stephen Harper, grand extractiviste devant l'Eternel : Stephen Harper Premier Ministre conservateur du Canada et plus qu'accessoirement, protestant évangéliste. Naomi Klein place beaucoup d'espoir dans toutes les tribus autochtones, tous les peuples premiers de la planète pour défendre le climat et les énergies renouvelables contre l'extractivisme forcené des industriels.
Voici ce qu'elle écrit à propos de Red Cloud (Nuage Rouge) ancien ouvrier métallurgiste devenu pionnier des énergies renouvelables :
" En regardant [Red Cloud] s'affairer autour des maisons, une étincelle dans les yeux, je comprends soudain que c'est cette nécessité de s'adapter à la nature qui rend certaines personnes hostiles aux énergies renouvelables ; il qualifie d'"indianisation" ses bricolages et ses adaptations, qui lui rappellent la construction de sa première éolienne à partir d'une vieille camionnette Chevrolet Blazer 1978 qui rouillait sur sa réserve. En le regardant s'affairer autour des maisons, une étincelle dans les yeux, je comprends soudain que c'est cette nécessité de s'adapter à la nature qui rend certaines personnes hostiles aux énergies renouvelables : même à très grande échelle, ces dernières requièrent une humilité tout à fait contraire à l'esprit qui préside à la construction d'un barrage sur une rivière, à la fracturation de la roche-mère en vue d'en extraire du gaz ou à la domestication de la puissance de l'atome. Les énergies renouvelables exigent de l'être humain qu'il s'adapte au rythme des systèmes naturels, et non qu'ils soumette ceux-ci à sa volonté par la force brutale. [...]
C'est précisément de cette nécessité de s'adapter à la nature que la machine à vapeur de James Watt aurait affranchi l'humanité à la fin des années 1770, en libérant les manufacturiers de la contrainte de construire leurs établissements près des meilleures chutes d'eau et en permettant aux capitaines des navires de se moquer de la direction des vents. Le premier moteur à vapeur commercial, écrit Andreas Malm, "était apprécié pour n'être soumis à aucune force qui lui fût propre, à aucune contrainte géographique, à aucune loi extérieure, à aucune volonté résiduelle autre que celle de ses propriétaires ; il était absolument -ou plutôt ontologiquement- asservi à ceux qui le possédaient".
C'est à cette envoûtante utopie d'une maîtrise totale de la nature que tant de défenseurs des énergies fossiles sont si peu disposés à renoncer. D'ailleurs, lors de la conférence climato-sceptique du Heartland Institute, on n'a pas manqué de tourner en dérision les énergies renouvelables, réduites à des "rayons de soleil" et à des "brises agréables". Le sous-entendu était sans équivoque : les vrais hommes font brûler du charbon. Et il ne fait aucun doute que la transition vers les énergies vertes n'est pas une simple substitution de sources d'énergie, car elle suppose aussi une transformation fondamentale des rapports de pouvoir entre l'humanité et le monde naturel qui maintient celle-ci en vie. La puissance du soleil, du vent et des marées peut certes être exploitée, mais, contrairement aux combustibles fossiles, ces forces ne pourront jamais être entièrement contrôlées par des êtres humains. Et chaque écosystème dicte ses propres règles.
L'humanité se retrouve ainsi à la case départ, en dialogue avec la nature. Les défenseurs des combustibles fossiles et du nucléaire affirment que les énergies renouvelables ne sont pas "fiables", car elles nécessitent de prêter attention à des facteurs comme l'endroit où on vit, la durée d'ensoleillement, la force des vents ou le débit des rivières. Et ils ont raison : les énergies renouvelables, du moins telles que Henri Red Cloud les envisage, imposent une rupture avec le mythe d'une humanité devenue maîtresse de la nature par la volonté de Dieu, et une reconnaissance du fait que nous vivons en relation avec le reste du monde naturel. Mais cette relation est maintenant fondée sur une connaissance de la nature qui dépasse de loin tout ce que nos ancêtres d'avant l'ère des combustibles fossiles auraient pu imaginer. Nous en savons assez pour être conscients de l'ampleur de ce que nous ne pourrons jamais prétendre connaître, mais également pour trouver des manières ingénieuses d'optimiser les mécanismes de la nature dans le cadre de ce que l'historienne féministe Carolyn Merchant appelle l'"éthique de la coopération". "
Les caractères en gras sont de mon fait.
Il va nous falloir renoncer à la domination et à la maîtrise absolue du singe nu sur la nature et toutes ses autres espèces pour tenter de nous maintenir sur la planète : je ne suis pas sûre que le Pape Bergoglio, malgré son encyclique, et tous les autres hiérarques des religions patriarcales, y soient prêts. Pourtant, il devra en être ainsi si nous voulons que l'aventure humaine continue encore un peu sur la Terre, cette force géologique qui nous a laissés passer, et vivre de ses ressources. Le maintien du climat tel qu'il nous a permis de prospérer jusqu'à aujourd'hui est un enjeu colossal pour l'humanité.
Si le pape veut vraiment sauver la planète qu'il fasse savoir que le singe nu mâle n'est pas le summum de la création mais juste un élément.
— Euterpe (@Euterpeaventure) 18 Juin 2015
Liens supplémentaires :Le facebook de Idle No More Paris
Brasiers et cerisiers : le réveil des luttes autochtones au Canada
Widia Larivière : A la défense des femmes autochtones
mercredi 17 juin 2015
Mon album photos #StopAbattoirs Paris
Samedi 13 juin 2015, sous un soleil radieux, plus de 2000 personnes (1500 selon la préfecture de police) défilaient à Paris pour la fermeture des abattoirs. Pas un mot dans les médias. Après une rapide recherche sur Google, seul Le Soir de Bruxelles a fait un article sur la manifestation belge du 14 juin. Voici mon album photos de la marche parisienne :
La tête du cortège
On se prépare à partir
La gendarmerie mobile était là, devant, derrière et sur les côtés !
Sur le parcours : un die-in*
Un autre die-in
N'hésitez pas à double cliquer sur l'image (et toutes les autres) pour l'avoir en grand, c'est impressionnant : die-in
Une participante :
Un panneau citant Jacques Derrida, philosophe français
Les véganarchistes radicales étaient là
Ca fait plaisir de voir autant de monde !
Un autre album photos dans la side bar à droite de mon blog.
Liens supplémentaires : La VIDEO de la marche ; Le site de la marche mondiale ; Toronto ;
" Rien n'est plus puissant qu'une idée dont le temps est venu !" Video Philippe Wollen ici.
" There is nothing more powerful than an idea whose time has come ! " - Victor Hugo
* Die-in : to die en anglais, mourir. Littéralement : on meurt sur place.
La tête du cortège
On se prépare à partir
La gendarmerie mobile était là, devant, derrière et sur les côtés !
Sur le parcours : un die-in*
Un autre die-in
N'hésitez pas à double cliquer sur l'image (et toutes les autres) pour l'avoir en grand, c'est impressionnant : die-in
Une participante :
Un panneau citant Jacques Derrida, philosophe français
Les véganarchistes radicales étaient là
Ca fait plaisir de voir autant de monde !
Ce que nous voulons, ce que nous ferons, c'est mettre fin à l'exploitation des animaux. #StopAbattoirs pic.twitter.com/cLyP4AXxIX
— L214 éthique animaux (@L214) 13 Juin 2015
Un autre album photos dans la side bar à droite de mon blog.
Liens supplémentaires : La VIDEO de la marche ; Le site de la marche mondiale ; Toronto ;
" Rien n'est plus puissant qu'une idée dont le temps est venu !" Video Philippe Wollen ici.
" There is nothing more powerful than an idea whose time has come ! " - Victor Hugo
* Die-in : to die en anglais, mourir. Littéralement : on meurt sur place.
mercredi 10 juin 2015
Phallocentrisme du désastre
Le Comité Interprofessionnel du Saint Maure de Touraine, sis à la Chambre d'Agriculture d'Indre et Loire, en manque de relève et préparant l'avenir, les contraintes de son label AOP vont se durcir, décide d'une campagne produit. Le Sainte Maure de Touraine est un fromage de chèvre frais : on fait faire des chevreaux aux chèvres, lesquels sont envoyés impitoyablement à l'abattoir afin d'extorquer le lait des chèvres pour notre propre usage et pour en faire des fromages. L'élevage, cette triste et habituelle histoire de l'exploitation du corps des femelles animales. Comme dans toute campagne produit (opposée à corporate où n'apparaissent que les "valeurs" et image de l'entreprise) on voit clairement le produit sur le visuel. Là où ça coince, c'est que non contents de montrer le produit, on pose à côté un corps de femme allongé, minci et courbé à la palette graphique, orné de cheveux évoquant les cornes de la chèvre : deux mauvaises actions en une, animalisation et réification d'une femme pour vendre un produit. Contre promesse d'hydratation (?) de pureté et de régénérescence. Une sale habitude de l'industrie agroalimentaire : femmes réifiées, consommables et consommées de toutes les façons imaginables. Les hommes consomment, comme dans cette publicité KFC pour un hamburger au poulet "Big Boss" (il faut qu'ils s'identifient au boss sans doute), et les femmes sont consommées, comme des services (je vais y revenir) ou des produits alimentaires.En entier ou surtout en morceaux, comme de la viande dans la restauration, dans la pornographie et dans la prostitution.
Une des thèses de Carolyn Merchant dans Death of nature est que les femmes et la nature sont considérées et utilisées comme "récréatives" dans le sens étymologique du terme, re-créer, se renforcer, reprendre des forces : terrains de jeux et de ressourcement des hommes (mâles). Vampirisation et parasitisme des deux, pillage et exploitation organisées, institutionnalisées : travail bénévole et gratuit dans le mariage, au service du mari et de la famille, non inclus dans les PIB des nations rappelons-le, exploitation forcenée de la nature et des animaux sans autre contrepartie que quelques investissements en capitaux, et, corollaire, des milliards de tonnes de gaz à effet de serre balancés dans l'atmosphère. A tel point que, devenus une force géologique, nous sommes en train de modifier de façon irresponsable le climat de notre maison commune, la Terre, en cours d'incinération, avec nous dessus.
Je lis "Tout peut changer, Capitalisme et changement climatique" de Naomi Klein. Entre autres sujets d'intérêt, elle raconte dans un chapitre la naissance du mouvement environnementaliste, ou plutôt conservationniste, puisque c'était son appellation à la genèse du concept. Quand Watt invente le piston et le moteur à vapeur, il change radicalement le destin de l'humanité, jusque là dépendante des sources d'énergie là où elles se trouvaient : fleuves et cours d'eau notamment, pour faire tourner des turbines et des moulins. Or la machine à vapeur qui libère du lieu de production d'énergie marche au charbon, ressource minière, qu'on brûle. D'où la naissance de l'extractivisme : on va donc creuser, retourner la Terre dans ses moindres boyaux et entrailles (violer, disent les écoféministes) pour trouver du charbon, du gaz et du pétrole. Tant et tant que patatras, dès le milieu du XIXème siècle, les sites naturels commencent à en porter les stigmates. Les mêmes industriels milliardaires enrichis par l'extractivisme (ressources minières, pillage en règle des pays colonisés, hévéa, coton, main d’œuvre mise en esclavage...) ont l'habitude pour se délasser après leur boulot harassant d'enrichissement, d'aller pêcher le saumon, la truite, ou chasser "le gros gibier", dans les torrents, les rivières et les forêts où ils s'achètent des parts dans des sociétés de chasse : vous reconnaissez aisément la "nature récréative", re-créative du début. Sauf que le gibier disparaît, les saumons ne remontent plus les rivières, la nature est déjà à ce moment-là mise à mal par les activités humaines. Et ce sont eux qui vont s'en apercevoir les premiers : plus de gibier à tuer, plus de poissons à pêcher (tuer aussi donc), plus d'endroits où se retrouver
des chasseurs !
Sauf que toutes les organisations humaines portent dans leurs ADN les gènes du début de leur HIStoire, sans rémission. Nature et culture indissolublement liées. Il m'arrive régulièrement de donner ma signature à NRDC et à Sierra Club, devenues des ONG de protection de l'environnement. Comme au WWF ou a Greenpeace. Il m'arrive même d'adhérer. Mais après la lecture de ce livre, je vais faire des arbitrages. En effet, certaines de ces ONG reçoivent des financements des pires criminels climatiques de la planète (Shell, Total, Suez, BP, ConocoPhillips, certains engagés dans les pétroles de schistes) en quête de verdissement de leurs activités. Pire, elles financent via des associations intermédiaires afin de brouiller les pistes. Il est impératif de faire ses enquêtes avant de soutenir des associations qui deviennent, par la force des choses, otages de leurs financeurs.
Un autre exemple du cynisme de pseudo "défenseurs de l'environnement", avant tout conservateurs désireux de reconduire leurs discours et surtout leur prédation en gagnant le maximum d'argent : lundi 8 juin, j'écoute sur Europe1 l'édito économique de Nicolas Barré des Echos (sur ce lien). La France est la deuxième puissance maritime du monde avec ses kilomètres de côtes. Patrimoine exploitable par l'homme (lome, le genre humain sauce sexiste), il est donc plus sage, selon l'éditorialiste, de nettoyer les continents de plastique plutôt que de ne rien faire, puisque la mer est une ressource qui rapporte du pognon. Notez qu'arrêter de saloper n'est pas au programme, en effet, ça ne rapporte pas de dividendes, au contraire, c'est des contraintes, donc des entraves à la croissance. Je rappelle que les PIB masculins croissent bibliquement (croissez et multipliez, soumettez la nature et les bêtes, ordre de leur dieu phallocrate) en détruisant, puis en réparant, puis en se faisant rembourser par les adhérents/clientes des sociétés d'assurances qui augmentent leurs cotisations ! Privatisation des gains et socialisation des pertes, selon un modèle éprouvé.
Si on fait un petit relevé du verbatim de l'éditorial de Barré, on trouve : exploitation et exploiter, leur mantra, Lome, PATRImoine, puissance, rapporter, calcul économique, s'enrichir, et, bien sûr, la mythique et biblique croissance. Avec des défenseurs de l'environnement pareils, clairement, on n'est pas sorties de la fournaise menaçante.
Et ça risque de ne pas s'arranger lors de la prochaine COP21 à Paris, en décembre prochain, présentée comme décisive pour sauver le climat, la biosphère et nous qui sommes dedans : le tandem receveur des dirigeants du monde entier, François Hollande et Laurent Fabius, hôtes fauchés, font appel au patronage de criminels climatiques bien contents de l'occasion qui leur est offerte de faire du greenwashing dans cette caisse de résonance planétaire que promet d'être la réunion de Paris. Attac vient d'éditer une affiche sur le sujet.
Si les choses s’aggravaient, il reste aux hommes au pouvoir une dernière idée : une bonne guerre -éditorial des Echos. SIC. Quand les cliques consanguines auto-reproduites (comme écrit Naomi Klein) sont à cours d'idées pour régler une fois pour toutes les problèmes par eux créés, il reste la bonne vieille guerre qui permet d'imposer des sacrifices aux opinions publiques, puis quand la paix est revenue après une bonne saignée, on reconstruit sur les décombres, les femmes sont priées de retourner au gynécée pour pondre, et tout ça fait de la bonne croissance biblique : idée nihiliste de prophètes de malheur.
Phallocentrisme du désastre.
Je vous propose deux paragraphes de Naomi Klein sur un paysage de l'Alberta, état canadien ravagé par l'extraction de sables bitumeux.
" Avant même d'apercevoir les mines géantes, alors que défilait encore devant moi le paysage d'une luxuriante forêt boréale parsemée de marécages verdoyants, j'ai cru sentir leur odeur qui me prenait à la gorge. Puis passée une petite colline, ils me sont apparus : les fameux sables bitumeux de l'Alberta s'étendaient devant moi, tel un désert gris, à perte de vue. Des montagnes de résidus si hautes que les travailleurs disent à la blague qu'ils ont leurs propres systèmes météorologiques. Des bassins de rejet si vastes qu'on peut les voir de l'espace. Un immense barrage, le deuxième plus grand du monde, destiné à contenir ces eaux toxiques. La terre écorchée vive.
La science-fiction regorge d'utopies de terraformation où des humains colonisent des planètes sans vie qu'ils transforment en habitats semblables à la Terre. Les sables bitumeux canadiens en sont l'exact contraire : il s'agit d'une entreprise de "terradéformation", où l'on accapare un écosystème grouillant de vie pour le transformer en paysage lunaire où pratiquement rien ne peut vivre. Si les travaux se poursuivent, la zone touchée pourrait atteindre une taille comparable à celle de l'Angleterre. Le tout pour avoir accès à une forme semi-solide de pétrole non conventionnel connue sous le nom de bitume, dont l'extraction, très difficile, demande tant d'énergie qu'elle émet de trois à quatre fois plus de GES que celle du pétrole classique."
GES : Gaz à effet de serre
Tout peut changer - Naomi Klein - Actes Sud.
Liens : Les sables bitumineux, un fardeau environnemental exorbitant.
Chez les Panthères Roses : Ecoféminisme - Défaire les dualismes
vendredi 5 juin 2015
Marche Mondiale des Femmes 2015 - Nantes
"Beaucoup de femmes, je pense, résistent au féminisme car c'est une agonie d'être pleinement consciente de la misogynie brutale qui imprègne la culture, la société, et toutes les relations personnelles."
" Cendrillon, la Belle au Bois Dormant, Blanche Neige, Rapunzel, se caractérisent toutes par la passivité, la beauté, l'innocence et la victimisation. Elles de gentilles femmes archétypales, victimes par définition. Jamais elles ne pensent, agissent, initient, confrontent, résistent, défient, éprouvent, prennent en charge, ou questionnent. Quelques fois elles sont forcées de faire le ménage. Elles n'ont qu'un rite de passage. Inertes, elles sont déplacées de la maison de leur mère à celle du prince. D'abord elles sont objets de malveillance, puis objets d'adoration romantique. Elles en font rien pour justifier ni l'une ni l'autre."
- Andrea Dworkin -
Pour dénoncer ces états de fait, La Marche mondiale des femmes est à Nantes 6 et 7 juin 2015
Le programme de ces deux jours est sur l'Espace Simone de Beauvoir. Il n'est certainement pas trop tard pour s'inscrire.
Actualisation : L'association Femmes Contre les Intégrismes publie un texte manifeste A SIGNER ICI - Pour en finir avec les intégrismes "gangrenés par l'ignorance, le machisme et l'obscurantisme jusqu'au meurtre".
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