Cette semaine, je vous propose la traduction, avec leur accord, d'un article écrit par Marv Wheale pour le blog Vegan Feminist Network. Il traite du mariage et de quelques objections qu'on peut à juste titre lui opposer. Vous noterez en conclusion l'utilisation faite de l'intersectionnalité, cette nécessaire critique sociologique des hiérarchies d'oppression imposées par la domination patriarcale, mais plus contestable quand on en fait un usage politique puisqu'elle segmente l'oppression et fait perdre de vue "l'ennemi principal". Ici, elle s'applique judicieusement aux femmes mariées battues, le mariage étant pourtant peu contesté par les féministes qui défendent à juste titre ces femmes. Et pour le reste, gardez en tête que cet article est écrit dans le contexte social étatsunien.
" Le mariage est une institution ancienne, en même temps que contemporaine. Son aspect culturel réside dans sa capacité à appeler des aspirations telles que l'amour, le bonheur et l'identité. Le cérémonial du mariage lie ensemble des individus à la poursuite d'un avenir satisfaisant et comblé.
Vous ne pouvez pas reprocher à des couples de vouloir une vie merveilleuse, mais le mariage pose pourtant de nombreux problèmes. Je vais en examiner deux :
- Il occulte les inégales conditions sociales des hommes et des femmes ;
- Il dévalorise les autres relations intimes non sexualisées : amicales, fraternelles (entre frères et sœurs) et entre humains et autres animaux, en les renvoyant à un statut inférieur.
La politique sexuelle autour du mariage
Le mariage en tant que dispositif établi par la société dissimule les divisions de pouvoir entre hommes et femmes face à l'intimité qu'ils partagent. Plus simplement, les femmes n'ont pas un statut égal à celui des hommes même quand l'affection qu'ils partagent est profonde : l'assignation aux rôles sexuels / travail reproductif non payé / salaires inégaux sur le marché du travail / participation des hommes disproportionnée aux gouvernements / manque de représentation des femmes à la tête des grandes compagnies, dans la police, les cours de justice et l'Armée / le harcèlement sexuel, le viol, les violences conjugales et le meurtre / l'objettisation sexuelle dans la pornographie, les autres médias et la prostitution. Tous ces facteurs se mêlent à d'autres et sont aggravés par l'ethnie, la classe économique, le handicap, la taille, et l'âge.
Parce que le mariage obscurcit ces inégalités et désavantages, il rend plus difficile l'organisation contre le pouvoir mâle. La mobilisation d'énergie est divertie vers les "intérêts du mariage" qui engloutissent des tonnes de ressources matérielles et émotionnelles en quelque chose qui ne peut satisfaire nos désirs les plus profonds. Il est essentiellement contre-productif d'investir autant dans un but incapable de tenir ses promesses aux hommes et aux femmes en tant que groupes sociaux. De toutes les identités qui affirment la subordination des femmes au patriarcat, le mariage est une des plus influentes.
Les mariages LGBTQ+ en sont une réforme, mais ils ne peuvent pas préserver des sanctions d'une institution fabriquée par la société patriarcale. Toute amélioration du système finit par le légitimer. Pensez aux proclamations du capitalisme végane, aux mesures de bien-être animal, à la pornographie féministe, au travail du sexe..., tous hérauts de la libération. Ces mouvements contradictoires ne peuvent apporter de résultats en vue d'une émancipation. Ils sont tous des illusions libérales.
Les outsiders
Pour mieux appréhender les implications du mariage, vous devez reconnaître la situation où il place celles/ceux hors de ses frontières. Les non mariés sont relégués dans une position sociale subordonnée au motif qu'illes n'atteignent pas le modèle marital. Vivre à l'intérieur de différentes autres unions vous donne un statut inférieur. C'est évident non seulement au niveau de la non reconnaissance culturelle, mais également dans les lois des états. Les relations contractuelles des sexes dans le mariage, reconnues par l'état permettent toutes sortes d'avantages : des réductions d'impôts, des prêts bancaires, l'accès à l'adoption d'enfants, l'accès aux avantages sociaux du partenaire, des privilèges d'assurances santé, des droits de visite à l'hôpital, des directives pré-décès, des droits du survivant, des droits à l'héritage, des droits à l'immigration, et tous les avantages des proches-parents.
Les contre-arguments aux critiques du mariage
Des gens vous diront que c'est une simplification que de voir le mariage comme irrémédiablement sexiste, surpassant toute autre relation platonique. Après tout, des quantités de femmes sont heureuses dans le mariage. De ce point de vue, plus de sensibilité et de crédit devraient être donnés aux exemples particuliers de mariages où les deux époux s'alignent sur les objectifs féministes, et qui respectent le pluralisme des relations des non mariés ; ils proposent que tous les avantages légaux et économiques du mariage soient étendus aux relations alternatives.
De plus, de nombreux couples issus des classes moins privilégiées pensent que le mariage est un refuge : contre la suprématie blanche, l'adversité économique, le capacitisme dominant, et la primauté hétérosexuelle. Ils proclament que bien que le mariage a des inconvénients pour les femmes, il est moins pénalisant que les pesants problèmes imposés par le racisme, le classisme, le capacitisme ou l'hétérosexisme. Ce qui est important pour elles/eux, c'est de centrer le mariage sur la réciprocité et la résistance aux injustices sociales. Dans ces cas, le mariage est estimé fortifier la classe laborieuse, les combats contre le racisme, ceux des handicapés et des LGBTQ+ : en retour, le mariage s'en retrouve fortifié.
Les mariages entre véganes aussi sont vus comme un moyen d'exprimer publiquement un attachement émotionnel, des valeurs communes pour la cause de la libération animale. Ce raisonnement et ces sentiments sont similaires aux autres mariages axés sur la justice sociale.
Dernières remarques
Non, tous les mariages ne sont pas égaux, mais la querelle contre le mariage est politique, car il est une entité politique.
L'idée du mariage, bon ou mauvais, faisant consensus, dépendant du respect mutuel, de l'affection et de la solidarité, masque la réalité des classes de sexe et la privatisation des femmes dans l'institution. Il dévalue celles/ceux qui ne veulent pas en être culturellement et légalement, refusant d'être ébranlés par l'optimisme progressiste des gens mariés à l'esprit aussi ouvert soit-il.
Certainement que l'intimité et l'activisme politique sont accessibles hors liens maritaux.
La violence des hommes contre les femmes est un système de pouvoir qui s'exprime majoritairement dans les liens du mariage. Pourquoi promouvoir un système oppressif qui masque l'occupation structurelle des hommes de la vie des femmes ?
Ne pourrions nous pas rendre l'intersectionnalité plus inclusive vis à vis des femmes battues en critiquant le mariage comme une fabrication sociale ? Nous savons que le genre, la race, le capacitisme, la classe, sont des constructions sociales, pourquoi ne pourrions-nous pas dire que le mariage en est une
aussi ? Tendons-nous à nous accrocher socialement à des habitudes apprises qui nous empêchent de questionner en profondeur nos visions du monde ?
Je ne demande pas aux gens mariés de se séparer ou de divorcer. Ce serait arrogant, inconséquent et absurde. Ce n'est pas la faute des individus s'ils ont été socialisés par des normes et des valeurs. Mon invitation est de mettre de côté nos résistances aux questionnements et de soumettre nos institutions sociales à l'épreuve de la pensée, du ressenti et du vivre. "
Marv est le modérateur de la page Facebook du Vegan Feminist Network.
samedi 30 mars 2019
jeudi 21 mars 2019
Coïts par Andrea Dworkin
Coïts par Andrea Dworkin - (Intercourse, titre en anglais) - Traduit de l'anglais par Martin Dufresne - Chez Syllepse Editeur et Remue-Ménage au Québec. Pour celles qui s'accommodent du village Potemkine patriarcal à base de Princes Charmants au point de ne plus voir le décor de carton-pâte, la lecture de l’œuvre d'Andrea Dworkin est une épreuve, douloureuse souvent. Dworkin décape à l'acide. C'est peut-être la raison pour laquelle elle n'est que depuis récemment traduite en français : ce sont les québécoises qui nous font ce cadeau. Merci donc aux québécois-es de nous offrir la traduction de cette autrice féministe majeure, de ses analyses audacieuses et sans concession. A un moment, où le féminisme se perd dans la segmentation, l'intersectionnalité, la fragmentation patriarcale selon Mary Daly, revenir à l'universel, à la big picture, à savoir les femmes partout traitées en biens meubles, asservies au service exclusif des hommes, de leurs désirs, de leur sexualité légale (mariage) et illégale mais tolérée comme un mal nécessaire (prostitution), et de leur reproduction, la traduction de cet ouvrage publié en 1987 tombe à pic.
Coïts propose une analyse des rapports entre les sexes dans l'acte sexuel lui-même, via la littérature ; des auteurs hommes qui ont écrit sur leur rapports avec les femmes : Tolstoï, Kobo Abe, James Baldwin, Isaac Bashevis Singer, Flaubert, le talmudiste Moïse Maïmonide, pour n'en citer que quelques-uns.
Je vous propose ci-dessous un extrait du chapitre Possession ; la succession des "cercles de l'enfer" étant titrés : Répugnance, A vif, Stigmate, Communion, Possession, Virginité (un très beau chapitre, le plus stimulant, où Dwokin parle de "sa" Jeanne d'Arc, Jeanne étant décidément interprétable de diverses façons, la vierge qui refuse d'être dégradée (debased) dans le coït, -j'y reviendrai certainement une autre fois, puis Occupation/Collaboration et finalement La loi, Saleté et Mort.
" Pour les femmes, être possédée sexuellement par les hommes est plus banal. Les femmes ont été un cheptel pour les hommes au titre d'épouses, de prostituées, de servantes sexuelles et reproductrices. L'appropriation et la baise sont ou ont été des expériences pratiquement synonymes dans la vie des femmes. Il te possède ; il te baise. La baise communique la nature de l'appropriation ; il te possède sous toutes tes coutures. La baise communique la passion de sa domination : elle exige son accès au moindre recoin de ton corps. Il peut posséder tout ce qui t'entoure et tout ce que tu portes et tout ce dont tu es capable comme travailleuse ou domestique ou parure ; mais te pénétrer et posséder tes entrailles est de la possession : plus profonde, plus intime que toute autre genre d'appropriation. Intime, brute, totale, la possession sexuelle est réelle pour les femmes, sans la moindre dimension magique ou mystique : être baisée et être l'objet de cette appropriation est inséparable et identique ; réunies, du fait d'être identiques, ces réalités constituent le rapport sexuel pour les femmes dans le système social de domination masculine. L'homme exprime dans la baise la géographie de sa domination : le sexe de la femme, l'intérieur de son corps font partie de son domaine en tant qu'homme. Il peut la posséder à titre individuel -être son roi et maître- et exprimer ainsi un droit privé de propriété (le droit privé lié à sa classe de sexe) ; ou il peut la posséder en la baisant de façon impersonnelle et exprimer ainsi un droit collectif de propriété, sans mascarade ni manières. La plupart des femmes ne sont pas des individus spécifiques, distincts, aux yeux de la plupart des hommes, ce qui fait que la baise tend vers une assertion collective de leur domination. Les femmes vivent à l'intérieur de cette réalité de l'appropriation et de la baise : c'est là qu'elles ressentent les choses ; le corps apprenant à réagir à ce que la domination masculine offre comme contact, comme rapport sexuel, comme amour. Pour les femmes, être possédées constitue le rapport sexuel appelé à répondre au besoin d'amour ou de tendresse ou d'affection physique ; cela en vient donc à signifier, à illustrer l'intensité du désir ; et l'appropriation érotique par un homme qui vous prend et vous baise est une affirmation physiquement chargée et importante de la condition féminine ou de la féminité ou du fait d'être désirée.
Cette réalité de l'appropriation et de la baise -en tant que vécu homogène aux plans social, économique et psychologique- encadre, limite, détermine les paramètres de ce que ressentent et vivent les femmes dans le rapport sexuel. Être cette personne sujette à l'appropriation, baisée, signifie devenir quelqu'un qui vit la sensualité dans le fait d'être possédée : dans le toucher du possesseur, dans sa pratique de la baise, aussi indifférente soit-elle de la complexité ou de la subtilité de notre humanité. Comme la capacité d'une femme à ressentir du plaisir sexuel se développe dans les confins étroits de la domination sexuelle masculine, il n'existe pas en elle d'être distinct -conçu et alimenté quelque part ailleurs, dans des circonstances matérielles différentes- qui hurle pour s'échapper. Seule existe la réalité de chair et de sang d'un être sensible dont le corps vit l'intensité sexuelle, le plaisir sexuel et l'identité sexuelle dans le fait d'être possédée : dans l'appropriation et dans la baise. C'est ce que nous connaissons ; et nos capacités de ressentir et d'être se trouvent rétrécies, laminées pour correspondre aux exigences et aux dimensions de cette réalité sensible.
Donc, les femmes ressentent la baise -quand elle fonctionne quand elle les submerge- en tant que possession ; et elles ressentent la possession comme profondément érotique ; et elles valorisent l'annihilation du soi dans le coït comme preuve du désir ou de l'amour de l'homme, de son ineffable intensité. Et donc, être possédée a une réalité phénoménologique pour les femmes ; et le rapport sexuel lui-même est vécu comme une réduction de l'assurance personnelle, une érosion du soi. Cette perte du soi est une réalité physique, et non seulement un vampirisme psychique ; et comme réalité physique, elle est glaçante et extrême, une érosion au sens strict de l'intégrité du corps et de sa capacité de fonctionner et de survivre. Les rigueurs physique de la possession sexuelle -du fait d'être possédée- endiguent la vitalité du corps ; et bien qu'au début la femme soit farouchement fière d'être possédée, -il la désire suffisamment pour l'évider complètement-, son intérieur s'use graduellement, et celle qui est possédée s'affaiblit, s'étiole, étant usurpée dans toutes ses énergies et aptitudes physiques et mentales par celui qui s'est physiquement emparé d'elle ; par celui qui l'occupe. Cette possession sexuelle est un état sensuel qui tend vers l'inexistence jusqu'à son aboutissement dans la mort. Le corps meurt, ou l'amant se débarrasse du corps usé jusqu'à la corde ; il le jette, chose vieille et inutile, évidée, comme une bouteille vide. Le corps est dépouillé ; et sa volonté est violée. "
"A l'opposé de l'air du temps et de la prétendue "égalité-dejà-là", de l'illusion que des pratiques sexuelles pourraient être "naturelles" et de l'oubli des rapports de domination, Andrea Dworkin aborde le coït en l'intégrant dans les rapports de pouvoir. Elle parle de "la baise" dans un monde dominé par les hommes, une certaine forme de sexe outil et matière de la domination, l'anéantissement des femmes dans la sexualité masculine, l'inégalité sexualisée des unes et des autres. L'auteure ne s'adresse pas à un auditoire timoré, passif ou avide de textes consensuels. Le coït dans un monde d'hommes (Intercourse en anglais) est un livre violent qui explore le monde de la domination et de la soumission."
Coïts - Editions Syllepse - Traduction Martin Dufresne.
Avant-propos du livre écrit par Andrea Dworkin en 1995, à lire chez Entre les lignes entre les mots.
Coïts propose une analyse des rapports entre les sexes dans l'acte sexuel lui-même, via la littérature ; des auteurs hommes qui ont écrit sur leur rapports avec les femmes : Tolstoï, Kobo Abe, James Baldwin, Isaac Bashevis Singer, Flaubert, le talmudiste Moïse Maïmonide, pour n'en citer que quelques-uns.
Je vous propose ci-dessous un extrait du chapitre Possession ; la succession des "cercles de l'enfer" étant titrés : Répugnance, A vif, Stigmate, Communion, Possession, Virginité (un très beau chapitre, le plus stimulant, où Dwokin parle de "sa" Jeanne d'Arc, Jeanne étant décidément interprétable de diverses façons, la vierge qui refuse d'être dégradée (debased) dans le coït, -j'y reviendrai certainement une autre fois, puis Occupation/Collaboration et finalement La loi, Saleté et Mort.
" Pour les femmes, être possédée sexuellement par les hommes est plus banal. Les femmes ont été un cheptel pour les hommes au titre d'épouses, de prostituées, de servantes sexuelles et reproductrices. L'appropriation et la baise sont ou ont été des expériences pratiquement synonymes dans la vie des femmes. Il te possède ; il te baise. La baise communique la nature de l'appropriation ; il te possède sous toutes tes coutures. La baise communique la passion de sa domination : elle exige son accès au moindre recoin de ton corps. Il peut posséder tout ce qui t'entoure et tout ce que tu portes et tout ce dont tu es capable comme travailleuse ou domestique ou parure ; mais te pénétrer et posséder tes entrailles est de la possession : plus profonde, plus intime que toute autre genre d'appropriation. Intime, brute, totale, la possession sexuelle est réelle pour les femmes, sans la moindre dimension magique ou mystique : être baisée et être l'objet de cette appropriation est inséparable et identique ; réunies, du fait d'être identiques, ces réalités constituent le rapport sexuel pour les femmes dans le système social de domination masculine. L'homme exprime dans la baise la géographie de sa domination : le sexe de la femme, l'intérieur de son corps font partie de son domaine en tant qu'homme. Il peut la posséder à titre individuel -être son roi et maître- et exprimer ainsi un droit privé de propriété (le droit privé lié à sa classe de sexe) ; ou il peut la posséder en la baisant de façon impersonnelle et exprimer ainsi un droit collectif de propriété, sans mascarade ni manières. La plupart des femmes ne sont pas des individus spécifiques, distincts, aux yeux de la plupart des hommes, ce qui fait que la baise tend vers une assertion collective de leur domination. Les femmes vivent à l'intérieur de cette réalité de l'appropriation et de la baise : c'est là qu'elles ressentent les choses ; le corps apprenant à réagir à ce que la domination masculine offre comme contact, comme rapport sexuel, comme amour. Pour les femmes, être possédées constitue le rapport sexuel appelé à répondre au besoin d'amour ou de tendresse ou d'affection physique ; cela en vient donc à signifier, à illustrer l'intensité du désir ; et l'appropriation érotique par un homme qui vous prend et vous baise est une affirmation physiquement chargée et importante de la condition féminine ou de la féminité ou du fait d'être désirée.
Cette réalité de l'appropriation et de la baise -en tant que vécu homogène aux plans social, économique et psychologique- encadre, limite, détermine les paramètres de ce que ressentent et vivent les femmes dans le rapport sexuel. Être cette personne sujette à l'appropriation, baisée, signifie devenir quelqu'un qui vit la sensualité dans le fait d'être possédée : dans le toucher du possesseur, dans sa pratique de la baise, aussi indifférente soit-elle de la complexité ou de la subtilité de notre humanité. Comme la capacité d'une femme à ressentir du plaisir sexuel se développe dans les confins étroits de la domination sexuelle masculine, il n'existe pas en elle d'être distinct -conçu et alimenté quelque part ailleurs, dans des circonstances matérielles différentes- qui hurle pour s'échapper. Seule existe la réalité de chair et de sang d'un être sensible dont le corps vit l'intensité sexuelle, le plaisir sexuel et l'identité sexuelle dans le fait d'être possédée : dans l'appropriation et dans la baise. C'est ce que nous connaissons ; et nos capacités de ressentir et d'être se trouvent rétrécies, laminées pour correspondre aux exigences et aux dimensions de cette réalité sensible.
Donc, les femmes ressentent la baise -quand elle fonctionne quand elle les submerge- en tant que possession ; et elles ressentent la possession comme profondément érotique ; et elles valorisent l'annihilation du soi dans le coït comme preuve du désir ou de l'amour de l'homme, de son ineffable intensité. Et donc, être possédée a une réalité phénoménologique pour les femmes ; et le rapport sexuel lui-même est vécu comme une réduction de l'assurance personnelle, une érosion du soi. Cette perte du soi est une réalité physique, et non seulement un vampirisme psychique ; et comme réalité physique, elle est glaçante et extrême, une érosion au sens strict de l'intégrité du corps et de sa capacité de fonctionner et de survivre. Les rigueurs physique de la possession sexuelle -du fait d'être possédée- endiguent la vitalité du corps ; et bien qu'au début la femme soit farouchement fière d'être possédée, -il la désire suffisamment pour l'évider complètement-, son intérieur s'use graduellement, et celle qui est possédée s'affaiblit, s'étiole, étant usurpée dans toutes ses énergies et aptitudes physiques et mentales par celui qui s'est physiquement emparé d'elle ; par celui qui l'occupe. Cette possession sexuelle est un état sensuel qui tend vers l'inexistence jusqu'à son aboutissement dans la mort. Le corps meurt, ou l'amant se débarrasse du corps usé jusqu'à la corde ; il le jette, chose vieille et inutile, évidée, comme une bouteille vide. Le corps est dépouillé ; et sa volonté est violée. "
"A l'opposé de l'air du temps et de la prétendue "égalité-dejà-là", de l'illusion que des pratiques sexuelles pourraient être "naturelles" et de l'oubli des rapports de domination, Andrea Dworkin aborde le coït en l'intégrant dans les rapports de pouvoir. Elle parle de "la baise" dans un monde dominé par les hommes, une certaine forme de sexe outil et matière de la domination, l'anéantissement des femmes dans la sexualité masculine, l'inégalité sexualisée des unes et des autres. L'auteure ne s'adresse pas à un auditoire timoré, passif ou avide de textes consensuels. Le coït dans un monde d'hommes (Intercourse en anglais) est un livre violent qui explore le monde de la domination et de la soumission."
Coïts - Editions Syllepse - Traduction Martin Dufresne.
Avant-propos du livre écrit par Andrea Dworkin en 1995, à lire chez Entre les lignes entre les mots.
mercredi 13 mars 2019
Fièvre aménageuse - Suroccupation urbaine masculine
Cette semaine, histoire de faire monter mon taux de cortisol (oui, la même hormone de stress que produisent les cochons qu'on trimballe aux abattoirs et qui fait que leur viande part en eau dans la poêle des carnistes), je suis allée à une réunion de "concertation" de mon quartier à propos de travaux, commencés il y a deux mois tout de même ! Mais comme ça grinçait dans le coin qu'on nous prend pour des quiches en "aménageant" dans le dos des usagers-habitants, donc, bam, "réunion de concertation". Mieux vaut tard que jamais.
Bien m'en a prise. J'ai pu me refamiliariser avec le technolecte des techniciens et des urbanistes.
Quelques mots ou expressions-clés en gros caractères, réellement entendus et fidèlement transcrits : valoriser. Foin de tous ces champs à vaches, rabines empierrées et boisées datant d'il y a deux siècles (ce qu'on appelle rabine dans l'Ouest est une allée empierrée bordée d'arbres, conduisant à un château), bras de rivières, étangs, mares, ronciers, dont personne ne profite car ils ne les connaissent même pas. Mettons des panneaux pour indiquer les cheminements bordés d'éclairages doux, posons des enrobés au pin histoire de laver plus vert (? peut-être que c'était au pain d'ailleurs, on ne sait jamais, c'est la même phonétique, mais je n'ai pas demandé), avec doublage de piste pour skateurs, rollers, (activités de mecs dans 80 % des cas), vélos... Mettons en valeur la nature qui n'y arrive pas toute seule. Dès qu'on la laisse se démerder, elle part en sucette : friches, ronces, engoncements inextricables tels que lome ne peut plus accéder, une vraie catastrophe. D'ailleurs, comme l'a dit un aménageur : la biodiversité s'appauvrit dès que la main de l'homme n'agit plus ; bigre, on se demande même comment le monde a pu prospérer sans nous, avant nous. On sait que c'est le contraire : la nature revient quand l'immense homme laisse la place après avoir rendu le lieu inhabitable pour lui, Tchernobyl est un parfait exemple du retour des bêtes et des plantes quand on leur a laissé le champ libre. Et puis, c'est quoi la nature, sinon une construction sociale, une terraformation permanente depuis l'avènement de l'anthropocène / capitalocène ?
Dans le cadre des ces aménagements on va faire appel à des porteurs de projets : qui une ferme permacole, qui des pâtures sur lesquelles faire paître des vaches. Sur un millier d'hectares, c'est bien le diable si on ne peut pas valoriser 10 hectares de terres agricoles, en compensation de tous les hectares vitrifiés sous les projets immobiliers, d'aménagements, ou encore de pelouses artificielles d'entraînement de foot : en effet pour obtenir une homologation internationale, il faut une taille critique de terrains d'entraînement. Il n'y a personne dessus ? Mais on s'en fout : le but c'est faire du chiffre, et pour cela il faut acquérir une homologation internationale. Ça ne profite qu'à des mecs ? Alors là, je pousse mémère : il n'y a PERSONNE pour souligner le fait. Pas plus celui qui a posé la question : "vous n'avez pas peur avec vos "enrobés" de faire appel d'air aux quads, motos, scooters déjà largement présents sur le site ? C'est des mecs qui font des tours de squads, motos ou scooters sur un site bucolique, mais motus, personne ne moufte. Le technicien municipal marchait sur des œufs : oui, effectivement, on nous signale des incivilités. Super, incivilités : il a le mérite de ne pas désigner les perturbateurs. Boys are boys, boys will be boys, apathie ménagère générale, coma dépassé. On ne va quand même pas se fâcher avec les mecs en appelant un chat un chat, puis la police. D'ailleurs, la police c'est des mecs aussi, donc, on tourne en rond.
Une autre attitude révélant l'impensé qu'est la multiplication humaine : des gens sensés, compétents, de plus de 70 ans, sachant instruire des dossiers, se demandant à voix haute pourquoi on a besoin de toutes ces routes, parkings, projets d'urbanisation (locution usuelle pour désigner les cages à lapins empilées partout sur les périphéries des villes) au bord de leurs jardins pavillonnaires ? Ils ont tous fait 3 enfants, 9 petits-enfants et 27 arrières petits-enfants et ils se demandent POURQUOI on a besoin de logements ! La génération des trente Glorieuses est décidément bien inconsciente, elle a brûlé la chandelle en irresponsable, consommé sans états d'âme, s'est étalée en mitant l'espace ; quand ils sont nés, ils étaient 2,2 milliards sur terre, aujourd'hui on est 7,7 milliards, plus de trois fois plus, ET ils se demandent POURQUOI on a besoin de tous ces logements ? Mais parce qu'ils ont fait de la cuniculture tiens ! C'est un monde ça, une telle inconscience. Bon, même pas la peine de hucher, je suis de toutes façons inaudible. Il n'y a pas pire sourd que qui ne veut pas entendre.
Une note optimiste tout de même : quand je suis partie, la première tellement je n'en pouvais plus, c'était le noir absolu ; pas d'éclairage, les réverbères étaient éteints, et pas de lune. Incapable de retrouver mon chemin sur une allée bordée de parkings, j'ai dû retourner demander qu'on me raccompagne avec une lampe de poche. Au moins dans le coin, les oiseaux dorment tranquilles, les animaux nocturnes peuvent chasser et s'apparier en paix. Pourvu que ça dure.
Bien m'en a prise. J'ai pu me refamiliariser avec le technolecte des techniciens et des urbanistes.
Quelques mots ou expressions-clés en gros caractères, réellement entendus et fidèlement transcrits : valoriser. Foin de tous ces champs à vaches, rabines empierrées et boisées datant d'il y a deux siècles (ce qu'on appelle rabine dans l'Ouest est une allée empierrée bordée d'arbres, conduisant à un château), bras de rivières, étangs, mares, ronciers, dont personne ne profite car ils ne les connaissent même pas. Mettons des panneaux pour indiquer les cheminements bordés d'éclairages doux, posons des enrobés au pin histoire de laver plus vert (? peut-être que c'était au pain d'ailleurs, on ne sait jamais, c'est la même phonétique, mais je n'ai pas demandé), avec doublage de piste pour skateurs, rollers, (activités de mecs dans 80 % des cas), vélos... Mettons en valeur la nature qui n'y arrive pas toute seule. Dès qu'on la laisse se démerder, elle part en sucette : friches, ronces, engoncements inextricables tels que lome ne peut plus accéder, une vraie catastrophe. D'ailleurs, comme l'a dit un aménageur : la biodiversité s'appauvrit dès que la main de l'homme n'agit plus ; bigre, on se demande même comment le monde a pu prospérer sans nous, avant nous. On sait que c'est le contraire : la nature revient quand l'immense homme laisse la place après avoir rendu le lieu inhabitable pour lui, Tchernobyl est un parfait exemple du retour des bêtes et des plantes quand on leur a laissé le champ libre. Et puis, c'est quoi la nature, sinon une construction sociale, une terraformation permanente depuis l'avènement de l'anthropocène / capitalocène ?
Dans le cadre des ces aménagements on va faire appel à des porteurs de projets : qui une ferme permacole, qui des pâtures sur lesquelles faire paître des vaches. Sur un millier d'hectares, c'est bien le diable si on ne peut pas valoriser 10 hectares de terres agricoles, en compensation de tous les hectares vitrifiés sous les projets immobiliers, d'aménagements, ou encore de pelouses artificielles d'entraînement de foot : en effet pour obtenir une homologation internationale, il faut une taille critique de terrains d'entraînement. Il n'y a personne dessus ? Mais on s'en fout : le but c'est faire du chiffre, et pour cela il faut acquérir une homologation internationale. Ça ne profite qu'à des mecs ? Alors là, je pousse mémère : il n'y a PERSONNE pour souligner le fait. Pas plus celui qui a posé la question : "vous n'avez pas peur avec vos "enrobés" de faire appel d'air aux quads, motos, scooters déjà largement présents sur le site ? C'est des mecs qui font des tours de squads, motos ou scooters sur un site bucolique, mais motus, personne ne moufte. Le technicien municipal marchait sur des œufs : oui, effectivement, on nous signale des incivilités. Super, incivilités : il a le mérite de ne pas désigner les perturbateurs. Boys are boys, boys will be boys, apathie ménagère générale, coma dépassé. On ne va quand même pas se fâcher avec les mecs en appelant un chat un chat, puis la police. D'ailleurs, la police c'est des mecs aussi, donc, on tourne en rond.
Une autre attitude révélant l'impensé qu'est la multiplication humaine : des gens sensés, compétents, de plus de 70 ans, sachant instruire des dossiers, se demandant à voix haute pourquoi on a besoin de toutes ces routes, parkings, projets d'urbanisation (locution usuelle pour désigner les cages à lapins empilées partout sur les périphéries des villes) au bord de leurs jardins pavillonnaires ? Ils ont tous fait 3 enfants, 9 petits-enfants et 27 arrières petits-enfants et ils se demandent POURQUOI on a besoin de logements ! La génération des trente Glorieuses est décidément bien inconsciente, elle a brûlé la chandelle en irresponsable, consommé sans états d'âme, s'est étalée en mitant l'espace ; quand ils sont nés, ils étaient 2,2 milliards sur terre, aujourd'hui on est 7,7 milliards, plus de trois fois plus, ET ils se demandent POURQUOI on a besoin de tous ces logements ? Mais parce qu'ils ont fait de la cuniculture tiens ! C'est un monde ça, une telle inconscience. Bon, même pas la peine de hucher, je suis de toutes façons inaudible. Il n'y a pas pire sourd que qui ne veut pas entendre.
Une note optimiste tout de même : quand je suis partie, la première tellement je n'en pouvais plus, c'était le noir absolu ; pas d'éclairage, les réverbères étaient éteints, et pas de lune. Incapable de retrouver mon chemin sur une allée bordée de parkings, j'ai dû retourner demander qu'on me raccompagne avec une lampe de poche. Au moins dans le coin, les oiseaux dorment tranquilles, les animaux nocturnes peuvent chasser et s'apparier en paix. Pourvu que ça dure.
dimanche 3 mars 2019
Tristes grossesses - L'affaire des époux Bac (1953-1956)
Moins spectaculaire, voire totalement oubliée, moins connue en tous cas que le procès de Bobigny qui cristallisa en 1972 l'opinion publique sur le drame des avortements clandestins et déboucha, après un acquittement général, sur la loi Veil de dépénalisation de l'avortement, l'affaire des époux Bac a pourtant fait prendre conscience elle, du drame des femmes accablées de grossesses dans un pays, la France de l'après-guerre, furieusement nataliste au prétexte de remplacer la saignée des deux guerres mondiales. Les mecs font la guerre, aux femmes de pondre pour remplacer la chair à canon et à usines au prix de leur santé et bien-être. L'affaire fit qu'après dix ans de combats, (le Parti Communiste fit hélas une contre campagne) la loi Neuwirth fut promulguée.
Non seulement la loi de 1920 punissait l'avortement, les avorteurs, avortées, médecins et soignants, de peines de prison et de fortes amendes, mais en plus, elle prohibait toute publicité des moyens de contraception, ne laissant aux couples que les méthodes irrationnelles permises par l'Eglise : Ogino, températures, retrait ou abstinence. Les médecins gynécologues se contentent hypocritement de dire "platoniquement" à leurs patientes malades ou faibles "pas de grossesses, ce ne serait pas prudent". Comment ? Mais ce n'est pas mon problème Madame. Ou à peu près, dans une société hypocrite déresponsabilisant largement les hommes. Les avortements clandestins font rage, (une grossesse sur deux, selon des estimations de l'époque), les femmes meurent ou sont gravement estropiées, l'hypocrisie est générale.
C'est dans ce contexte que se produit un "fait divers" : Danielle, la quatrième nouvelle-née en 5 ans du couple Ginette et Claude Bac meurt en 1953 de négligence, d'absence de soins, et des conséquences d'une grave dénutrition. Il y aura enquête des services sociaux, procès, deux procès : un premier où le couple sera lourdement condamné à 7 ans de détention, puis un deuxième, où la peine sera réduite à deux ans, les époux Bac sortant libres, la peine ayant été accomplie en préventive.
Deux historiennes, Danièle Voldman et Annette Wieviorka mènent l'enquête historique sur les époux Bac, rencontrent les derniers témoins, dont leur jeune avocate à l'époque (89 ans aujourd'hui), elle a le même âge que ses clients, 24 ans, sollicitent les archives de Versailles, de la prison de Haguenau, les archives départementales de Rennes et Angers, avec de nombreux moments de découragement et d'arrêt qu'elles relatent dans leur dernier chapitre : l'histoire non moins passionnante de leur enquête.
Elles montrent le rôle des époux Weill-Hallé, tous deux gynécologues, notamment de Madame Marie-Andrée Lagroua Weill-Hallé, qui après une rencontre lors d'un congrès de gynécologie aux Etats-Unis avec Margaret Sanger, fondatrice de The Planned Parenthood, rentre en France, décidée à utiliser cette affaire Bac pour promouvoir, contre les diktats conservateurs de l'époque, la Maternité Heureuse, qui deviendra ensuite le Planning Familial, lequel garde encore aujourd'hui dans son nom la genèse de son ancêtre US. Les voies du Seigneur étant décidément insondables, Marie-Andrée Lagroua Weill-Hallé était catholique pratiquante, mère de famille heureuse : elle quittera le mouvement pour le Planning familial lors du combat pour l'avortement. Malgré cela, merci Madame. Vous méritez bien votre rue dans le 13ème arrondissement de Paris.
Enquête passionnante sur une histoire peu connue qui aboutit à la loi Neuwirth de 1967, à lire pour comprendre d'où viennent les femmes et le temps qu'a pris leur émancipation des diktats patriarcaux ; pour celles qui aujourd'hui rejettent la pilule, ce moyen de contraception qui fit basculer le destin des femmes : pour la première fois dans l'histoire, elles renversent la malédiction et prennent la maîtrise de leur corps et de leur fécondité. C'est la révolution du XXème siècle.
Lien vers le site de l'éditeur : Tristes grossesses - Edition du Seuil.
Non seulement la loi de 1920 punissait l'avortement, les avorteurs, avortées, médecins et soignants, de peines de prison et de fortes amendes, mais en plus, elle prohibait toute publicité des moyens de contraception, ne laissant aux couples que les méthodes irrationnelles permises par l'Eglise : Ogino, températures, retrait ou abstinence. Les médecins gynécologues se contentent hypocritement de dire "platoniquement" à leurs patientes malades ou faibles "pas de grossesses, ce ne serait pas prudent". Comment ? Mais ce n'est pas mon problème Madame. Ou à peu près, dans une société hypocrite déresponsabilisant largement les hommes. Les avortements clandestins font rage, (une grossesse sur deux, selon des estimations de l'époque), les femmes meurent ou sont gravement estropiées, l'hypocrisie est générale.
C'est dans ce contexte que se produit un "fait divers" : Danielle, la quatrième nouvelle-née en 5 ans du couple Ginette et Claude Bac meurt en 1953 de négligence, d'absence de soins, et des conséquences d'une grave dénutrition. Il y aura enquête des services sociaux, procès, deux procès : un premier où le couple sera lourdement condamné à 7 ans de détention, puis un deuxième, où la peine sera réduite à deux ans, les époux Bac sortant libres, la peine ayant été accomplie en préventive.
Deux historiennes, Danièle Voldman et Annette Wieviorka mènent l'enquête historique sur les époux Bac, rencontrent les derniers témoins, dont leur jeune avocate à l'époque (89 ans aujourd'hui), elle a le même âge que ses clients, 24 ans, sollicitent les archives de Versailles, de la prison de Haguenau, les archives départementales de Rennes et Angers, avec de nombreux moments de découragement et d'arrêt qu'elles relatent dans leur dernier chapitre : l'histoire non moins passionnante de leur enquête.
Elles montrent le rôle des époux Weill-Hallé, tous deux gynécologues, notamment de Madame Marie-Andrée Lagroua Weill-Hallé, qui après une rencontre lors d'un congrès de gynécologie aux Etats-Unis avec Margaret Sanger, fondatrice de The Planned Parenthood, rentre en France, décidée à utiliser cette affaire Bac pour promouvoir, contre les diktats conservateurs de l'époque, la Maternité Heureuse, qui deviendra ensuite le Planning Familial, lequel garde encore aujourd'hui dans son nom la genèse de son ancêtre US. Les voies du Seigneur étant décidément insondables, Marie-Andrée Lagroua Weill-Hallé était catholique pratiquante, mère de famille heureuse : elle quittera le mouvement pour le Planning familial lors du combat pour l'avortement. Malgré cela, merci Madame. Vous méritez bien votre rue dans le 13ème arrondissement de Paris.
Enquête passionnante sur une histoire peu connue qui aboutit à la loi Neuwirth de 1967, à lire pour comprendre d'où viennent les femmes et le temps qu'a pris leur émancipation des diktats patriarcaux ; pour celles qui aujourd'hui rejettent la pilule, ce moyen de contraception qui fit basculer le destin des femmes : pour la première fois dans l'histoire, elles renversent la malédiction et prennent la maîtrise de leur corps et de leur fécondité. C'est la révolution du XXème siècle.
Lien vers le site de l'éditeur : Tristes grossesses - Edition du Seuil.
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