samedi 12 mars 2011

Storytelling : Faut-il manger les animaux ?





















Pour celles/ceux qui comme moi ont quelquefois pensé que manger est une perte de temps et se sont souvent contentées pour expédier la chose d'un sandwich, d'une pomme ou d'un yaourt, vous avez tout faux. Manger est plus que manger. Ça raconte une histoire, notre histoire individuelle, familiale, sociale, collective. C'est donc de la mémoire, de l'affect et des émotions.

Les exemples abondent dans la littérature et dans notre mémoire. Le Banquet de Platon est une œuvre philosophique fondamentale où une discussion philosophique se tient lors d'un repas arrosé entre amis, Proust coupeur de cheveux en 36, trempant une madeleine dans son thé va vous écrire plusieurs pages de souvenirs sentimentaux. La grand-mère de Jonathan Foer, immigrante juive américaine survivante de la guerre en Europe, vivait pieds nus et trouvait sa nourriture dans les ordures et les restes que les autres ne mangeaient pas. Aussi devenue américaine, stockait-elle la nourriture et bourrait-elle ses petits enfants de sucreries pour conjurer cette peur de la faim, expérience personnelle qui marque une vie. Enfin, se nourrir est synonyme de fêtes et de réunions familiales (qu'on n'est pas obligé-e-s d'aimer) ritualisées autour de la religion ou de dates historiques telles que Noël, Pâques, ou Thanksgiving, cette fête typiquement américaine commémorant l'histoire de pèlerins qui trouvent une cache de nourriture juste au moment où ils vont mourir de faim. Et puis on reste toute sa vie attachée aux saveurs et aux odeurs de la cuisine de la personne qui vous a nourries durant votre enfance ! Manger c'est donc aussi une histoire d'enfance.

Aussi quand vous faites une table d'information sur le végétarisme, vous avez diverses réactions dont certaines sont surprenantes et déroutantes : elles vont de la quête du bien-être, l'expression des inquiétudes d'une société secouée tous les six mois par un scandale alimentaire impliquant toujours la viande et le poisson mais qui veut éradiquer tous risques, les intolérances alimentaires (au gluten par exemple, très courantes), ou la grand-mère qui vous demande conseil parce qu'elle a offert pour Noël un lapin (cramponnez-vous pour ne pas dire que les animaux ne sont pas des jouets) à sa petite fille de 9 ans qui depuis refuse de manger de la viande car elle a fait le rapport entre son lapin adoré et les animaux qu'on lui fait manger (une fillette très douée et sensible au-delà de la moyenne), jusqu'aux réactions brutales voire violentes des gens qui se sentent agressés devant l'interdit de chair animale que nous avons choisi de nous poser à nous mêmes sans intervention extérieure parce que leur père et leurs grands pères étaient bouchers et chasseurs !

Foer, après avoir dit les fêtes juives familiales et l'histoire tragique de sa famille, enquête très sérieusement menée pendant 3 ans auprès des fermes industrielles (90 % de la production de viande) dont Smithfield Corporation, éleveur industriel de porcs, des fermiers traditionnels américains, auprès des activistes de la cause animale, PETA* notamment, et des abattoirs où il démontre qu'on ne peut y appliquer aucun traitement "humain" aux animaux pour cause de productivité ; la loi a beau imposer aux abattoirs l'étourdissement préalable (lois identiques en Europe et aux USA dans ce cas) avant égorgement et saignée, le convoyeur (chaîne industrielle de désassemblage) avance sans répit à vitesse constante, et si le pistolet matador s'enraye ou n'est pas convenablement chargé, la vache sera égorgée, pattes sciées et peau arrachée en pleine conscience, et les poules, poulets et dindes seront ébouillantés sans électro-narcose si le bain électrique ou le gaz ne font pas leur effet ! Moi aussi je me suis longtemps rassurée, croyant à la stricte application de la loi et pensant qu'elle épargnait ces tortures aux animaux, sauf qu'il faut se rendre à l'évidence, le système industriel productiviste est tel que les lois n'y sont pas applicables, et ce, que nous soyons aux Etats-Unis ou en Europe !

Ce que Foer découvre lors de son enquête est dévastateur. Son livre est le chemin d'une perte d'indifférence et d'une prise de conscience : celle de la façon dont nous traitons les milliards d'animaux que nous élevons, abattons et mangeons. L'entassement concentrationnaire, sans lumière du jour, dans les élevages hors-sol, l'absence de toute possibilité d'exercer un comportement d'être sentient et social, les doses massives de médicaments, tranquillisants, qu'on leur sert préventivement car ce sont des animaux estropiés et malades qu'on trouve dans ces élevages, le boulevard que nous ouvrons aux virus pour se développer et franchir la barrière des espèces (le virus de la grippe et de toutes ses formes passées y compris la redoutable grippe espagnole de 1918, actuelles et à venir est au départ un virus aviaire), et enfin le transport brutal vers l'abattoir où ils vivent une fin inhumaine, tous ces éléments vont faire cette quête aboutir à la seule conclusion possible : pour l'enfant qu'il vient d'avoir, pour lui et sa famille, Jonathan Safran Foer ne voit que l'alternative végétarienne.

Deux citations : "Ce n'est pas seulement que les techniques avaient changé : la biodiversité était remplacée par l'uniformité génétique, les départements universitaires consacrés à l'élevage animal étaient devenus des départements de science animale, et des métiers autrefois exercés par les femmes étaient maintenant confisqués par les hommes".

"Nous avons laissé l'industrie remplacer la ferme traditionnelle pour les mêmes raisons que nos cultures ont relégué les minorités au statut de citoyens de seconde zone et tenu les femmes sous le joug du pouvoir masculin". **

Le précédent livre de Foer "Tout est illuminé" est aussi une quête, la quête d'une origine ; il semble que jusqu'à présent, ce soit la signature de son œuvre. Partant de la tradition juive et américaine puisque les USA sont désormais son pays, s'inscrivant dans l'histoire de sa famille, mais reconnaissant que l'histoire est un laboratoire d'expérimentation et que le blocage sur une tradition immuable ressemble à la mort, Jonathan Safran Foer va, pour lui, sa famille et son fils, s'inventer sa propre tradition : ils fêteront toujours Thanksgiving mais il n'y aura plus de dinde sur la table.
A la place, il y aura du tofu, ou du seitan et des légumes.

L'histoire continue...

* PETA : People for Ethical Treatment of Animals
** Respectivement pages 107 et 243 de l'édition de poche américaine en anglais.

mardi 8 mars 2011

8 mars

Pour le très énervant 8 mars et ses festivités, rappel de quelques statistiques concernant LES femmes : pas de quoi pavoiser.
Moins 20 % de salaire en moyenne, à compétence et responsabilités égales, diplômes supérieurs pour tenter de compenser (en pure perte) le gap !
90 % des mi-temps sont occupés par les femmes dans les entreprises.
Pensions de retraite moins 48 % en moyenne par rapport aux hommes : la récompense d'une vie de doubles journées pour un demi-salaire, maintenue dans les basses zones de l'économie.
Sursélection selon des critères virils pour les cadres, ingénieures et techniciennes, soit le double d'entretiens de recrutement par rapport aux hommes : si vous voulez le poste il faut donner des gages de conformité !
Choix de carrières et de professions limité : une dizaine de professions occupées par les femmes, celles où on a son bâton de maréchal dans les 5 ans ; tout le reste par les hommes, généralement les professions où on peut faire carrière, agir sur les choses, et voir son salaire doubler, voire tripler ou quadrupler.
La précarité est pour les femmes (travail temporaire ou en CDD) ; la stabilité pour les hommes. Etc... Etc...

Le 8 mars devrait être non pas un rendez-vous festif mais une journée où on fait le point sur les acquis par rapport aux années précédentes, où on fixe les nouveaux objectifs à atteindre et la mise en œuvre de ces objectifs avec calendrier et dates butoir. Et on précise les sanctions à appliquer en cas de retard sur ces objectifs.

L'Europe n'est pas en reste ! La Cour de Justice Européenne vient d'interdire aux sociétés d'assurances au nom de l'EGALITE HOMME-FEMME les tarifs spéciaux qu'elles accordent aux femmes en y trouvant leur compte, car ils encouragent les bonnes pratiques de conduite sur la route ! Décidément, quand un dispositif nous favorise parce que nous sommes vertueuses, c'est toujours TROP ! La décision est applicable au 21/12/2012. La Cour de Justice Européenne ne pourrait pas mettre son nez dans les inégalités de salaire, carrière, accès à l'emploi..., que les femmes subissent plutôt que de sanctionner les gens qui conduisent vertueusement ?

Last but not least, tout comme les chômeurs sont désignés seuls responsables de la médiocre situation dans laquelle ils sont car ils auraient forcément commis des erreurs de jugement dans leurs choix professionnels, que les violées l'ont bien cherché en faisant leur jogging seules le matin à l'aube et qu'elles portaient un string qui dépassait du jean, ou qu'elles ont demandé une cigarette (attitude provocatrice) à 7 gars dans le RER, une poignée de féministes, l'écume aux lèvres et le couteau entre les dents est responsable de la détestation millénaire que les hommes portent aux femmes, selon un certain blog qui a organisé un bashing des femmes qui, défendant leurs droits, provoqueraient l'animosité et la peur des hommes. Ils seraient paumés les pauvres
petits ! L'argument est imparable pour faire de l'audience. Se défausser sur les victimes et faire de leurs défenseur-e-s des boucs émissaires permet au système de garder les mains blanches et... le pouvoir.
Et puis quel mépris des hommes, finalement.

Un lien : Elles bougent 

Le blog Mode(s) d'Emploi publie un travail collaboratif sur l'emploi au féminin. Il est consultable sur leur site ICI.

vendredi 4 mars 2011

Publicité bouchère : des corps de femmes en morceaux

Sur la route de mon supermarché, une fois par semaine, voici l'affichage
4 X 3 qui me dérange le regard ; régulièrement des femmes assassinées découpées en morceaux font la Une des journaux, rubrique Faits Divers, alors que ce sont en réalité des faits de société, puisque la violence massive infligée aux femmes est de la responsabilité de la société toute entière :

























C'est le visuel qu'a trouvé l'agence publicitaire Grey Paris pour nous vendre les ultra-résistants collants Well "unrippable", c'est à dire puisque les slogans ne sont plus traduits pour faire des économies d'affiches et d'imprimeurs, à peu près indestructibles. Il y a plein de façons de montrer qu'un tissu est indéchirable, mais chez Well on choisit de montrer des morceaux de femme, une croupe, des cuisses et des jambes. Comme dans le billet d'Emelire concernant un message publicitaire du Roi de la Capote où une femme est réduite à sa croupe, sans que le Jury de Déontologie Publicitaire y trouve à redire. C'est criminel.
Teneur subliminale du message, lisible selon deux axes : une femme se consomme en morceaux, comme dans les industries de la prostitution et de la pornographie. On y lit également une expression de l'idéologie carniste et bouchère !

7/3/11 : je rajoute un lien vers les Chiennes de Garde qui a à voir avec la teneur de ce billet, une citation d'un certain Hugo Desnoyer, dauphin du Macho de l'année !

lundi 28 février 2011

Le Président


Ce film d'Yves Jeuland propose une descente en apnée au cœur du pouvoir masculin et de ses campagnes électorales. Pouvoir masculin tellement compétent,  immuable et incontestable, tellement puissant qu'il peut par exemple diriger la mairie de Bordeaux ET reconstruire le ministère "dévasté" des affaires étrangères, fingers in the nose, un jeu d'enfant. Je l'ai vu avec deux mois de retard ce film, mais franchement, ça valait le coup d'attendre !
C'est vrai qu'avec 35 copies du film prévues pour la France entière, dont une quinzaine pour le Languedoc-Roussillon dit Montpellier Journal, il ne faut pas que je me plaigne, j'ai encore de la chance de l'avoir vu passer chez moi !


LE PRÉSIDENT : BANDE-ANNONCE HD (Georges Frêche)
envoyé par baryla. - Regardez des web séries et des films.

La dernière campagne électorale de Georges Frêche donc (Régionales de 2010) filmée librement et sans aucune censure, dit Yves Jeuland. Exclu du PS pour propos racistes, l'investiture du Parti s'était reportée sur Hélène Mandroux, maire de Montpellier, chair à canon envoyée au casse-pipe face à Frêche. Selon une habitude des grands partis, les femmes sont envoyées au front quand les carottes sont cuites. Elle n'avait aucune chance. La suite, on connaît : Frêche vainqueur, 54 % au deuxième tour, et Mandroux éliminée au premier tour avec 7,7 % des voix. Taux d'abstention remarquable : 50, 27 % (données Ministère de l'Intérieur).

Le film est édifiant : jamais une femme dans le champ de la camera, ou alors seulement si elle est maquilleuse, secrétaire porteuse des piles de parapheurs, serveuse de petits fours derrière le buffet, ou femme de ménage nettoyant au chiffon le bureau du Président, ses statuettes de granzomes et son jeu de cartes. Et en arrière-fond, très floues, sa femme et sa fille plus son éditrice, lors d'un repas. Les plans en légère contreplongée sur l'Hôtel de la Région sont aussi très intéressants : le style architectural en est nettement stalinien tendance Ceaucescu, le syndrome-du-grand-homme-voulant-laisser-une-trace-en-béton-pour-la-postérité est saisissant, et il est à la petite (Ceaucescu faisait mieux !) démesure du Président.

Hélène Mandroux en prend pour son grade : attaques physiques ("Mandroux, vous avez vu sa tête ?" ; quand on a soi-même un air de ressemblance avec Jabba the Hut, le méchant qui contrôle la pègre de la Galaxie dans le Retour du Jedi, 3ème volet de la Guerre des Etoiles, c'est cocasse !) et intellectuelles :  « Mandroux, elle ne mérite pas. C’est une femme. Elle n’a jamais rien compris à la politique. Tant qu’elle me suivait, elle savait où elle allait parce que je la guidais. Mais maintenant qu’elle est seule, elle fonce dans le brouillard".

Ou encore : "Mandroux, je la connais, c'est moi qui l'ai faite ; je l'ai prise comme première adjointe, si elle avait eu ne serait-ce qu'une idée, je m'en souviendrais !" Il n'y a rien à rajouter. Sauf que si ce film passe dans vos parages, courez le voir, il a un intérêt archéologique incontestable.

Pour plus d'extraits : suivre le lien Montpellier Journal : il en propose huit de la même saveur que la bande annonce.

Selon Les nouvelles News, les choses ne changent pas : pour les prochaines cantonales de mars 2011, les hommes sont candidats et les femmes.... suppléantes. La parité à la française, en somme.

Georges Frêche est décédé le 24 octobre 2010. Son remplaçant à la présidence de la Région Languedoc Roussillon est Christian Bourquin. 

mardi 22 février 2011

Sans offenser le genre humain

Sans offenser le genre humain * et puisque je vais passer une journée au Salon International de l'Agriculture (SIA) Paris Porte de Versailles, côté défense des intérêts de toutes les vaches-à-traire exploitées et parasitées, et des poules pondeuses esclaves encagées, voici quelques maternités animales et quelques bébés non humains :



 



Ce petit veau Charolais, je l'ai rencontré au Space ; ça ne se voit pas précisément sur la photo, mais il n'est pas blanc : il a réellement des poils irisés tirant sur l'argent, ce qui fait qu'il brillait à la lumière des spotlights !



L'amour est un comportement qui a été inventé et mis au point par l'Evolution, amélioré et affiné en permanence pour nous permettre d'élever nos petits.

Nous ne sommes pas si différents : comme disait Darwin qui utilisait un vocabulaire que les vétos modernes considèrent comme éhontément "anthropomorphe", voici deux enfants qui jouent ensemble.



J'ai trouvé ce paragraphe dans le livre de Jonathan Safran Foer Eating animals (ou Faut-il manger les animaux en français) que je suis en train de lire :
"Des technologies de guerre ont été littéralement et systématiquement appliquées à la pêche industrielle. Radars, écho-sondes (utilisés en leur temps pour localiser les sous-marins ennemis), systèmes de navigation électronique développés par la Marine, et dans la dernière décennie du Vingtième Siècle des satellites GPS qui donnent aux pêcheurs des capacités sans précédent d'identifier et localiser les lieux poissonneux. Des images des températures océaniques générées par satellites sont utilisées pour détecter les bancs de poissons".  
Nous ne leur laissons vraiment aucune chance.
Ses descriptions de thons et autres gros poissons (sans oublier les autres, remontés par tonnes dans des chaluts et qui se "noient" à l'air libre) se tordant de douleur car remontés à la gaffe plantée dans le crâne, laissent à penser que, sur ces abattoirs flottants que sont les navires de pêche et les thoniers senneurs,  travaillent quelques sociopathes sadiques relevant au minimum de la psychiatrie lourde ! C'est la guerre contre tous et contre la nature : dans le dernier demi-siècle, 90 % de la ressource des océans de la planète a été détruite.

La guerre continue par d'autres moyens : les thoniers et autres bateaux-usines bretons et boulonnais vont pêcher avec l'Armée française à bord pour répliquer aux attaques des pirates au large des côtes somaliennes. Les Européens achètent en toute légalité des autorisations de pêche aux états africains qui les leur vendent. (Ces états ont quelquefois à leur tête des tyrans redoutables qui se fichent de leur peuple comme de leur première paire de chaussettes). Mais les méthodes de pêche des somaliens et celles de européens ne sont pas les mêmes ; pendant que les somaliens pratiquent une pêche vivrière avec des petits filets, les européens arrivent avec des filets de plusieurs kilomètres et des bateaux-usines congélateurs ! Donc la piraterie somalienne serait bien une réponse à l'exploitation de leurs eaux par les européens.

Autrement, vous pouvez aussi aller faire un tour sur les blogs de dessin de blogueuses aussi talentueuses que Insolente Veggie (qu'on ne présente plus), Veggie Poulette et Anicée.

Autre lien : Rapport Agrimonde : une étude de l'INRA

* Sans offenser le genre humain : Essai philosophique d'Elizabeth de Fontenay - Albin Michel

Crédit photos : CIWF, HS US et IFAW

lundi 14 février 2011

Les putains du diable


















Mise à jour le 7/2/18
Le livre d'Armelle Le Bras-Chopard est réédité, curieusement par un éditeur juridique : Dalloz. Excellente nouvelle ! Lors de l'écriture de ce billet, il était épuisé. La lecture en est passionnante : sa thèse est que la sorcellerie fut "un phénomène plus politique que religieux, aboutissant à la construction au masculin de l'Etat moderne, phénomène qui disparaîtra une fois les femmes assujetties sous la loi".
Voici la couverture de la nouvelle édition :



La répression va naître du fantasme d'une montée en puissance des femmes au XVème siècle : les inquisiteurs Institoris et Sprenger en 1486 constatent catastrophés : "Ce temps-ci est le temps de la femme" ! Si ça vous rappelle un slogan contemporain, sachez qu'il a déjà eu cours, ce qui n'est pas rassurant ! Et effectivement, elles prennent une relative autonomie en dehors de la maison, elles tiennent boutique, elles ont leurs propres corporations, elles sont "courtières", "graillonneuses", "regrattières", "laboureuses", "brasseuses", "limonadières". Elles sont sages-femmes, matrones, guérisseuses et médeciennes, elles connaissent les herbes qui soignent et soulagent ; les médeciennes ont le quasi monopole sur les maladies des femmes. Pire, si possible, ce pouvoir que les femmes ont acquis va être mis en lumière par l'accession au trône de plusieurs reines, écrit ALC que je cite : "... à la fin du XVème siècle, Isabelle soeur d'Henri IV pour la Castille, Marguerite d'Autriche, puis au XVIème siècle Marie Stuart en Ecosse, Marie et Elizabeth Tudor en Angleterre, Jeanne d'Albret en 1555 en Navarre, alors royaume indépendant entre la France et l'Espagne. En France, la régence est confiée à des femmes soit pour minorité du roi, soit lors de son absence temporaire du pays : ainsi fait François 1er en faveur de sa mère, Henri II pour son épouse, Catherine de Médicis qui sera de nouveau régente en 1574, lors de la minorité de son fils Charles. Les femmes jouent un rôle dans la diplomatie, comme Marguerite de Navarre, soeur de François 1er ; Louise de Savoie pour la France et Marguerite d'Autriche concluent en août 1529 la "Paix des Dames" qui met fin au conflit entre leurs états respectifs".
C'en est trop ! Pour des êtres dont la nature femelle doit les porter à la soumission, à quoi s'ajoute la double hantise masculine toujours latente de l'émancipation des femmes, sexe faible, et de leur prise de pouvoir, les mâles se doivent de réagir sous peine de se faire spolier !

Ils vont donc convoquer le diable.
Au début, on ne sait pas bien qui il est : il va apparaître "après une longue gestation". Sa première mention est dans le Livre d'Enoch situé entre l'Ancien et le Nouveau Testament, et il a les traits du serpent dans la Bible quand il se manifeste à Adam et Eve. Ange omniscient, créature noire, Prince des Ténèbres, il dévoile au creux de l'oreiller, des secrets aux femmes. On va très vite associer Diable, femme, acte sexuel, danger pour les hommes. De pur esprit, il va finir par prendre corps dans l'imagination enfiévrée des inquisiteurs et des artistes du Moyen Age sur les tableaux, les sculptures avec la naissance du Purgatoire et de l'Enfer ; les clercs, les hommes vont vite lui trouver des caractéristiques tombant fort à propos :  
il est mâle et... hétérosexuel, ce qui permet d'éviter qu'il soit sodomite, qualité qui lui permettrait de mouiller aussi les hommes dans le coup, et ça ils n'en veulent à aucun prix. Il a toutefois un curieux appareil uro-génital (froid et pointu !) dont je vais vous épargner les descriptions toutes plus farfelues et stupides les unes que les autres (on est habituées aux fantasmes masculins sur le sujet) sauf une caractéristique tout de même (je résume ce que dit ALC) : tout en étant lubrique, il est un très mauvais coup au lit et au sabbat ! Il ne donne aucun plaisir sexuel aux sorcières qui sont quand même très attirées par lui, ne cherchez pas à comprendre. De toutes façons à l'époque les femmes sont considérées comme irrémédiablement stupides et déraisonnables. Comme elles sont faibles et ne savent résister, elles vont avoir le diable au corps.

Basée sur les textes péjoratifs à l'endroit des femmes d'Aristote, de Platon, de Rabelais, sur les écrits délirants et gynophobes des inquisiteurs et des juristes, la répression va être féroce et durer des siècles. Elle va s'attaquer aux vieilles femmes (hantise des hommes de la masculinisation des femmes ménopausées), aux sages-femmes (qui pratiquent les herbes et la médecine qui guérit et ne sont pas à l'abri d'un accident de parcours -en effet, la mortalité pendant les accouchements et péri-natale est importante), aux prostituées puisque le sexe est diabolisé. Il y aura 80 femmes pour 20 hommes sur 100 accusés de pratiquer la sorcellerie. Les femmes pauvres des campagnes paieront un lourd tribut à la haine. Elles seront torturées, noyées, brulées, sans qu'aucune se soulève et malgré quelques voix qui disent que tout cela ce sont des superstitions, voix inaudibles et vites tues. Au milieu du XVIIème siècle, la répression flambe : basée sur des dénonciations, les tribunaux fonctionnent à plein régime, le système s'emballe et on commence à dénoncer des enfants et.... des hommes. A ce moment-là, tout va basculer : brûler massivement des femmes, passe encore, mais des enfants et surtout des hommes, ça ne passe plus. Même les curés les plus féroces commencent à renâcler devant le massacre.

Le système fonctionne par des tribunaux spéciaux et inquisitoriaux d'abord, puis provinciaux et locaux ensuite ; mais le patron à l'époque c'est quand même le roi. Même si rien n'est centralisé comme de nos jours, et que l'état n'existe pas. L'autorité du roi, sa juridiction n'atteint pas ou ne s'applique pas dans toutes les provinces de la royauté pendant l'ancien régime, il n'arrive pas à s'imposer partout. Et c'est là, selon la thèse d'ALC, que la répression contre les sorcières va jouer un rôle déterminant dans la création de l'État.

Ce sont d'abord des confessionnaux mobiles puis des tribunaux inquisitoriaux religieux qui jugent les sorcières ; les parlement locaux ont aussi leurs propres juridictions que le pouvoir royal ne contrôle pas toujours et enfin, il y a les juridictions royales. Tous ces "tribunaux" vont se faire concurrence. La répression constitue un instrument pour mater les autorités locales, mais peut aussi être utilisée par ces mêmes instances pour affirmer leur propre pouvoir par rapport au souverain national. Les sorcières deviennent un enjeu de pouvoir ! Au fil du temps les tribunaux séculiers vont détrôner les tribunaux ecclésiastiques, puis les tribunaux provinciaux  vont évincer les locaux et après des siècles de répression, ce sont les états centraux qui vont gagner la bataille. Dans le même temps, "l'émergence d'un esprit scientifique entend percer les mystères de la nature en tenant Dieu et le Diable à l'écart des réflexions fondées sur la seule Raison". L'homme "devient maître et possesseur de la nature ; la Science récusant tout  dogme assené et non démontré s'affranchit de Dieu et de l'Église ; la politique prend aussi ses distances et son autonomie par rapport à la religion". En ce qui concerne les femmes, dit ALC, le premier soin est de les rejeter dans l'Ordre de la Nature. Selon le syllogisme : un homme est un être humain ; une femme n'est pas un homme ; donc une femme n'appartient pas à l'humanité, du moins pas tout à fait, donc elle ressort de cette nature à maîtriser. Ce nouveau discours est dans la continuité des assertions misogynes multiséculaires, sauf qu'au lieu de mettre à mort les sorcières, il est préférable d'assujettir préventivement par la loi toutes les femmes vivantes. "C'est sur ces bases que s'établira l'Etat moderne, mâle comme Satan" conclut ALC.
Établie sur le modèle de pouvoir du Pater familias, la souveraineté s'organise au masculin ; si le mari n'est plus le chef de famille, de même que si le pouvoir "tombe en quenouille", c'est la "gynécocratie", autrement dit la mort du politique et de toute souveraineté, car la gynécocratie conduit au despotisme et à l'anarchie qui ne sont plus des régimes politiques, ou à la disparition de la famille si ce n'est plus le mari qui commande, décrit un théoricien du pouvoir. La puissance entre les mains d'une femme s'exerce dans la cruauté et le meurtre, conclut-il. Le code Napoléon, code civil unificateur de 1804 entérinera l'incapacité de la femme mariée, incapable au sens juridique du terme comme les fous et les mineurs, elle sera placée sous tutelle avec devoir d'obéissance à son mari ; son statut n'aura eu de cesse de se dégrader depuis la fin du Moyen Age. La grande hantise des hommes que constitue la liberté des femmes : puisque toutes les femmes sont sous la tutelle de la loi, il n'y plus besoin de sorcières, elles peuvent donc disparaître. Le balai, véhicule des sorcières  vers le lieu du sabbat est remplacé par l'inoffensif balai des ménagères, il ne sert plus désormais qu'à balayer, affectation qu'il n'aurait jamais dû perdre. 
La putain du diable est partie en fumée au profit de la Fée du logis.

Armelle Le Bras-Chopard se demande toutefois, dans la conclusion de son ouvrage, si on ne peut pas craindre un retour des sorcières et de leur répression : les revendications des femmes à l'accès à la sphère publique et aux enceintes politiques comme les hommes, le retour du refoulé des religions, les mouvements féministes revendiquant l'exercice partagé du pouvoir partout sur la planète, la domination masculine contestée et battue en brèche pourraient favoriser un retour de flamme des bûchers ? Sous une autre forme ?

Les Putains du Diable : Le procès en sorcellerie des femmes. Armelle Le Bras-Chopard - Editions PLON 2006 et réédition chez Dalloz en 2016.
On peut aussi lire sur le sujet Le sexocide des sorcières de Françoise d'Eaubonnne - Editions L'esprit Frappeur

Et un lien signalé par Euterpe vers une conférence d'Eliane Viennot, agrégée d'histoire, prononcée en mars 2009 à l'Institut Emilie Du Châtelet qui est en plein dans le sujet, si vous n'avez jamais rien compris à la loi Salique qui a bel et bien une destination politique. C'est absolument passionnant.

"La fortune est femme, et il est nécessaire pour la tenir sujette, de la battre et heurter".
Machiavel - Le Prince

mercredi 9 février 2011

Spéculation sur les matières premières et le foncier : la déraison à l'oeuvre

La taille d'un département qui disparaît de la surface cultivable en France tous les 7 ans, l'essor des biocarburants obtenus sur des terres arables à coups de pesticides et à la place des céréales que nous mangeons et qui deviennent rentables hélas devant l'envolée du prix du baril de pétrole, la spéculation des traders voyous des banques que nous laissons accomplir leurs méfaits qui achètent et revendent du blé, du riz, du maïs et du soja sans jamais recevoir leur marchandise puisqu'il s'agit d'achats spéculatifs uniquement, l'accroissement de la population humaine et des classes moyennes (tant mieux !) qui veulent manger de la viande (tant pis !), la planète et ses terres émergées suffiront-elles à satisfaire notre goinfrerie de logements et de nourriture sous forme de viande ?


La sécheresse de cet été en Russie, les inondations exceptionnelles qui frappent le Queensland en Australie, celles du Pakistan aussi pèsent sur la production de céréales (blé, riz...) et légumineuses. Plus 80 % pour le prix du blé, 86 %  pour le maïs et plus 90 % d'augmentation pour le café. Les pays arabes devant les révoltes de rues de Tunisie et d'Égypte achètent des tonnes de blé pour satisfaire la demande de leurs peuples pour éviter la propagation des émeutes, il va falloir aborder une nouvelle contrée, celle de la rareté alors que nous sommes habitués à la surabondance et au gaspillage. Qu'est-ce qu'on attend pour adopter plus de sobriété et de frugalité ?

Lien : Green et vert.
Crédit image : Queen of Happy Endings Queensland Australia.

On en est au même point pour le foncier : les terres cultivables reculent devant les besoins de logement d'une population croissante et la spéculation foncière fait que le logement devient inaccessible pour les classes moyennes : trois générations endettées pour le mythique pavillon que tout ménage se doit de posséder selon la propaganda du "tous propriétaires" ! Et les spéculateurs qui se réjouissent que le marché soit à ce point dynamique, sous -texte, que personne ne peut plus s'offrir sauf quelques privilégiés selon Axel de Tarlé d'Europe 1. Si la sagesse commandait, il serait temps de faire baisser la pression. D'autant que selon une sinistre habitude, les humains laissent des friches industrielles et urbaines derrière eux sans rien réhabiliter comme si la place était sans limites, et quand les friches sont nucléaires, la terre devient inhabitable pour des décennies ! Voir ici Résidues et là Tchernobyl Reactor4.

Liens : L'agence d'urbanisme de Toulouse, Terre-netLe Figaro

Le
Forum Economique de Davos s'est terminé, éclipsé par la rue égyptienne. Il s'est attaqué cette année à la "nouvelle réalité du monde" que ses dirigeants semblent découvrir : arrivée de la Chine et de l'Inde dans l'économie mondiale, nouvelles technologies et nouveaux médias et leur impact sur la réalité politique : Google, Facebook entre autres.
En fait de nouvelle réalité du monde, ses riches participants ( 33 000 euros le billet d'entrée individuel et 390 000 euros par entreprise multinationale venant chercher des contacts d'affaires !) sont à 80 % des hommes, comme le rappellent Les Nouvelles News : 2000 "hommes d'affaires" et 100 multinationales. C'est vrai que les femmes représentent la majorité des pauvres de la planète dans l'indifférence générale. Réseautage, échange de cartes de visites, cooptation, remplissage de carnets d'adresses : ce club masculin fermé prétend "améliorer l'état du monde" ! Au vu des membres du club, les femmes peuvent attendre.
Il y avait toutefois une femme qui n'a pas pu se déplacer mais qui a été entendue par liaison radio depuis son pays la Birmanie : Aung San Suu Kyi dont on peut entendre la communication ICI sur le site de The Economist (en anglais) fait appel aux investisseurs afin qu'ils ne négligent pas la Birmanie mais en prenant en compte toutefois les impacts environnementaux et sociaux, message à destination de la Chine principalement, puisque la Chine achète partout : elle a d'énormes besoins en terres cultivables et en matières premières pour accompagner son expansion industrielle.

Parfaitement illustratifs du thème abordé dans ce billet : trois sujets vus à la suite au 20 heures de France 2 le 1er février dernier ; une jolie vieille dame parisienne très digne habitant sous les combles d'un bel immeuble Haussmanien de Paris intramuros, 1000 euros de loyer et 1000 euros de retraite, incapable de se nourrir car elle a épuisé toutes les économies d'une vie à payer son loyer ; une tribu amazonienne de quelques personnes aux corps couverts de pigments rouges levant avec appréhension les yeux vers nos hélicoptères, fuyards primitifs dont le territoire est cerné et détruit sans pitié par les tronçonneuses et les bulldozers des déforesteurs ; enfin les orangs-outangs (Homme des Bois en malais) captifs du Parc zoologique de Vincennes dont on "enrichit le milieu" en leur donnant la possibilité de se façonner des outils pour dénicher des friandises cachées dans des boîtes comme du miel dans des ruches sauvages, TOUS promis au saccage, au pacage entouré de barbelés parce qu'on n'en veut plus, qu'ils encombrent et que notre impérialisme les condamne à l'intégration pour les primitifs ou à la disparition pour les Orangs outangs -ce qui revient exactement au même, et à la maison de retraite pour les vieilles femmes, tou-t-e-s considéré-e-s comme improductifs et gêneurs ! La mort de la diversité et des plus fragiles broyés par le brutal sapiens occidentalisé. C'était triste à pleurer.

Liens : Survival Le mouvement pour les peuples indigènes et Uncontacted Tribes 

On apprend dans la THEMA d'ARTE Les Insurgés de la Terre, que l'éco-terrorisme a été inventé par l'administration Bush parce qu'après le 11 septembre 2001 et le Patriot Act, les filets policiers américains restants désespérément vides de tout terroriste islamiste (Ben Laden court toujours !), on les a remplis opportunément avec les écowarriors, ces résistants activistes qui défendent Mother Earth et les droits des animaux.
Décidément, rien ne se perd et les lois scélérates finissent toujours par servir. Les condamnations ont été très lourdes pour certains : jusqu'à 23 ans de prison !

Et comme je n'arrive pas à laisser passer, voici un lien vers un article de Rue89 publié par une avocate dans une affaire de viol en réunion, signalé à mon attention par un éditorial d'Arrêt sur Image.

jeudi 3 février 2011

Hypathie à la ferme

Oubliez vos souvenirs bucoliques d'enfance, elle est hors-sol et industrielle la ferme en question ! Le "progrès" est passé par là. Une exploitation vide pour l'instant, avec des cages et des caillebottis tous neufs, des mangeoires avec dispositif électronique pour identifier le cochon qui mange, combien il mange et combien il faut lui en resservir, parce qu'elle -c'est une femelle- a environ 17 bébés cochons* dans le ventre, identification grâce à une puce RFID** qui enregistre tous ses déplacements : dans certains endroits on avait expérimenté un collier avec puce intégrée, mais on s'est aperçu que quelques gourmandes malignes, trouvant un collier d'une congénère tombé par terre, le ramassaient et allaient se resservir une ration au détriment de la copine dans sa mangeoire, donc à l'oeil ! Pas de ça Cocotte, finie la triche avec ces puces implantées dans l'oreille ! L'éleveur a trouvé la parade, il est plus malin que les cochons, pour l'instant, un point partout.

Inauguration et visite portes ouvertes d'une ferme industrielle pour 900 truies gestantes produisant 22 000 porcelets par an, (et des tonnes de déjections provoquant des proliférations d'algues vertes !), le tout à la norme de la nouvelle Directive européenne 91/360/CEE, directive applicable à tous les élevages au 1er janvier 2013. Nous sommes donc allés voir comment ça se présente un élevage sous la nouvelle directive :
3 nanas et deux mecs, de vrais dangers publics ! En tous cas, c'est ce que pensaient les gendarmes qui nous ont trouvé-e-s au point presse et nous ont prié de les suivre : ils nous ont escorté-e-s vers la sortie et ont bien veillé à ce que nous nous éloignions du théâtre des opérations ! Quel honneur pour 5 militants de la cause animale ! On ne rigole pas dans le lobby de l'élevage industriel. J'y ai droit presque à chaque fois : espérons que pendant ce temps là, il n'y ait pas de femmes en détresse qui attendent tous leurs soins ?

Nous sommes revenu-e-s par la même porte l'après-midi, il n'y avait plus de gendarmes !

Mon propos n'est pas d'ennuyer mes lectrices avec les détails techniques et fastidieux des textes européens ; je souhaite juste faire prendre conscience (si tant est que ce soit appréhendable sans se rendre sur place !) de la réalité de l'élevage industriel, par juste un exemple. Pour 900 truies il est prévu 3 verrats m'a dit l'éleveur. Ils servent à faire revenir les chaleurs après la mise bas, ils n'auront jamais le loisir de les approcher ; je vous laisse imaginer leur frustration. En effet, elles seront inséminées artificiellement par un technicien, coincées dans une stalle d'où elles ne pourront pas bouger pendant 5 jours, le "temps que ça prenne". Comment sait-on qu'elles sont en chaleur ? C'est là que les verrats interviennent : ils sont trois dans leur stalle. A hauteur du groin de la femelle, il y a un trou cylindrique de 20 cm environ laissant passer l'odeur du mâle ; elles viennent donc y tourner dès la reprise des chaleurs (désormais en 2013, elles seront conduites en groupe, désincarcérées de la stalle qui les emprisonnait à vie jusqu'à maintenant -une victoire des défenseurs des animaux) devant la stalle des mâles. Au-dessus du cylindre, il y a un lecteur de puce (RFID**, rappelez vous) qui va identifier la truie et décompter ses passages et son temps de stabulation devant les mâles. Au bout de 3 passages et/ou de 14 minutes de stationnement, la machine lui envoie un jet de peinture sur le groin, jet de peinture qui va permettre à l'éleveur ou au technicien de l'élevage de la repérer et de l'inséminer artificiellement lui-même avec des paillettes de sperme -voir plus haut.
Pas le droit de faire chabadabada, chabadabada, alors ? Ce n'est pas possible dans les élevages industriels : attendre les sentiments, ça fait perdre du temps, justement. Et le temps, c'est de l'argent comme dit mon banquier.
L'animale niée dans ses besoins comportementaux et sociaux, enfermée dans un élevage concentrationnaire va vivre une vie de mises bas (2,8 par an en moyenne), d'allaitements de 21 jours et de ré-inséminations, et au bout de trois ans, à condition qu'elle "coopère" en "prenant" sans barguigner les inséminations, on va la réformer, en technolecte, l'envoyer à l'abattoir dans le langage commun. Les porcelets de 21 jours seront sevrés et brutalement enlevés à leur mère : ils iront à l'engraissement dans des exploitations industrielles sur caillebottis elles aussi, produisant des "porcs charcutiers" abattus eux vers l'âge de 4 à 6 mois, c'est à dire très jeunes ! Ce sont nos règles pour le parc animal.








Merci à Yves et Brigitte pour les photos. Double cliquer pour agrandir.

* Dans un élevage normal, elles auraient entre 7 à 10 petits -elles ont 12 tétines, 6 de chaque côté, mais dans un élevage hors-sol avec la stimulation ovarienne, elles peuvent mettre bas de 17 à 21 tout petits porcelets qui occasionnent des pertes : ils sont très petits et certains meurent dans la journée car ils ne sont à peine viables.
** RFID : Radio Frequency IDentification

Lien vers le blog de Clumsybaby qui a lu le dossier des Inrockuptibles sur la viande qui tue.

Je laisse la conclusion à Elizabeth de Fontenay qui citant Jacques Derrida, philosophe qui rappelle "qu'un anéantissement des espèces est à l'œuvre. Sans la prise en compte du silence des bêtes, les chemins de l'humanisme ne mènent nulle part. "

Bibliographie et ressources :
Eating animals ou Faut-il manger les animaux en français de Jonathan Safran Foer
Règles pour le parc humain de Peter Sloterdijk***
L'Animal que donc je suis de Jacques Derrida
Le silence des bêtes et Sans offenser le genre humain de Elizabeth de Fontenay (ces 4 derniers sont des ouvrages de philosophie)
Bidoche de Niccolino dont j'ai parlé ICI.
Notre poison quotidien de Marie-Monique Robin, prochaine diffusion sur Arte le 15 mars 2011 à 20 H 40.


*** Je l'ai dévoré en une heure : après avoir constaté la mort de l'humanisme en 1945 à Auschwitz, le philosophe allemand Peter Sloterdijk  jette un regard impitoyable de lucidité sur l'avenir du troupeau humain -aka le parc humain.
PS Je ne suis pas parrainée par Amazon pour les liens vers son site.

vendredi 28 janvier 2011

Au coeur de l'industrie : une journée au Bureau d'Etudes

Une journée ordinaire d'ingénieure commerciale dans un bureau d'études (BE) qui propose des prestations de Recherche et développement (R & D) à des industriels. Je suis à mon bureau où je prends mes rendez-vous. Le standard est tenu par une assistante, mais quand elle n'est pas là, les réponses aux appels se répartissent en cascade sur le commercial junior (stagiaire) et puis sur les autres commerciaux par ordre de séniorité. Ça a l'air compliqué mais ça marche !

Justement le téléphone sonne et entendant trois sonneries, je décroche : Bureau d'études Machin Truc Associés, Bonjour. Une très urbaine mais ferme dame au bout du fil me demande de parler à Monsieur Laurent Machin ou Emmanuel Truc, les deux dirigeants. Bien sûr, je vais voir s'ils sont là, qui les demande ? Vous remarquerez que j'évite soigneusement les très classieux keskecé, cétakelsujè dédiés habituellement aux malheureux qui ont l'impudence d'appeler une entreprise française ! Oh, bien sûr, je suis Madame Piedboeuf de l'entreprise Gros Camion de Z, je suis la Directrice des Achats, me répond-elle.

Une dirigeante et de leur principal client encore, ils ont en effet, je ne sais par quel miracle -il y a manifestement un petit dieu qui compatit au sort des petits entrepreneurs-, ils ont donc l'entreprise Gros Camion, fabricant international de poids lourds dans leur porte feuille client !

Je fais immédiatement sonner le téléphone de Emmanuel Truc, LE dirigeant en chef du BE, en pure perte, naturellement. Il n'est pas là, de toutes façons il n'est QUE 9 H, et il n'arrive jamais avant 10 H, puisqu'il vaconduirelesenfantsàlécole, concession à Madame sa femme, ce qui lui permet de traîner le soir au bureau jusqu'à point d'heure.
Quand à Laurent Machin, je fais sonner aussi, mais je sais que c'est peine perdue, personne, absolument personne ne sachant jamais où il est, d'ailleurs tout le monde subodore qu'il est aux fraises au printemps et aux champignons ou aux châtaignes l'hiver, en fonction de la météo, puisque son emploi du temps est l'une des choses les plus opaques de l'entreprise. Et je reviens vers mon interlocutrice, prends le message et les numéros de téléphone en promettant de suivre l'affaire. Réflexe professionnel : si c'était un de mes clients, j'apprécierais qu'on en fît
autant ! Je laisse des voice mails partout, double par des mails dans leurs boîtes respectives. Je ne les verrai ni ne les entendrai de la journée.
Le soir, vers 18 H, prise d'un doute, je rappelle les boîtes vocales, relaisse des messages, mets des post-it sur leurs portes ou leurs bureaux, vérifie avec l'assistante OU ils peuvent bien être, elle n'en sait  RIEN.

Je me doute toutefois d'où se trouve Emmanuel Truc : sa principale activité chronophage, c'est la quête auprès d'organismes paroissiaux fournisseurs de subventions, prêts à taux bonifiés  (OSEO-ANVAR) et autres statuts avantageux de JEI (Jeune Entreprise Innovante) et CIR (Crédit Impôt Recherche -niche fiscale depuis peu) que ces bonnes filles que sont la Région, l'Etat et les collectivités locales leur accordent généreusement -sans aucune contre-partie éthique, je suis dans une boîte de mecs, la seule de mon espèce, sous stricte surveillance. Et ils sont plus doués pour faire la quête aux aides publiques* qu'à aller prospecter les entreprises du bassin économique pour rapporter du chiffre d'affaires. Je suis pratiquement dans le couloir vers la sortie quand mon téléphone sonne : c'est Laurent Machin qui veut savoir si quelqu'un a rappelé cette dame pour laquelle j'ai laissé des messages ! Je suis au bord de l'explosion ; je lui dit n'en rien savoir et j'attire son attention calmement sur l'importance me semble-t-il de la rappeler, vu ses responsabilités. Je ne vais quand même pas être obligée de lui faire un dessin ?
- Mais qui c'est cette bonne femme, d'abord, et qu'est-ce qu'elle veut ? entends-je dans mon combiné, je n'en crois pas mes sens ! D'habitude on a affaire à Mr Bidule, pas à une bonne femme ! (sic).
Non mais c'est inouï ! Je hasarde que peut être Gros Camion a changé de DirectRICE des Achats ou alors que jusqu'à maintenant Machin Truc Associés avait affaire à la brute qui bourre la chaudière, Monsieur Bidule, en le prenant pour une pointure de la Direction, une sinistre habitude des boîtes de techniciens qui confondent ingénieur avec décideur-e ?  Et que la CHEFFE a décidé de reprendre les choses en mains ? Autrement exprimé, mais l'idée y est.
La conversation terminée, je rentre chez moi, qu'ils se débrouillent.

Le lendemain matin, je prépare ma journée : je vais DEHORS, en visite clients, ouf, ça va me faire des vacances. J'ai horreur d'être enfermée. Je vérifie que j'ai tous mes dossiers, mes documentations, cartes de visite, et... tout étant au cordeau, je monte à la cuisine vers 9 H 30 me faire un café mérité. La cafetière potpotpotpote sur son support électrique, ça embaume. Je suis à peine servie que je vois Emmanuel Truc entrer, le poil humide, des valises sous les yeux, il doit avoir la truffe sèche, signe de fièvre, et son épi rebelle pointe comme une antenne irrésistiblement attirée par la cafetière. On dirait un bédouin qui a trois semaines de désert dans les sandales et qui rencontre enfin un point d'eau ! Bin dis donc, mais qu'est-ce qu'il fait de ses nuits ?

Bonjour, Emmanuel ! -Hon, hon, l'entends-je répondre. Décidément, c'est grave, je vais le laisser boire son remontant, attendre qu'il fasse effet (et par voie orale ça peut prendre du temps, peut-être que par voie sous-cutanée ou en intra-veineuse ?) en sirotant le mien. Après tout, on pas obligés de tout le temps se parler.
- Au fait, on a eu Madame Piedboeuf au téléphone !
- Ah, bon, ce n'était pas grave au moins ?
- Elle voulait juste nous voir, et comme on l'a jointe hier soir à 20 heures, ça a fait un peu court, on avait RV avec elle ce matin à 8 heures ! Vous aviez raison, c'est la nouvelle Directrice des Achats.
Dit d'une voix un peu faiblarde. Donc, elle les a bien convoqués et les a fait venir ventre à terre pour se présenter eux et leur boîte, et dès potron minet en plus. Je commence à comprendre : il s'est levé aux aurores et a dû négocier au débotté avec Madame (qui a un poste de cadre et les impératifs qui vont avec dans un entreprise du coin) le convoyage des enfants à l'école !  Mon intuition était la bonne. Ça réchauffe, ce genre de nouvelle : si j'avais été Piedboeuf, j'aurais exigé une rencontre à 7 heures, histoire de bien marquer qui tient qui par les couilles (Promis, dans le prochain billet j'évite le mot couille). Je me dis que j'ai raté une vocation de directrice des achats, et que je vais m'en mordre les doigts tous les jours que fera la Grande Déesse Cosmique désormais ! Quel beau métier tout de même !
* On estime qu'entre 40 à 80 milliards d'euros "tombent" sur le entreprises en une année sous diverses formes : subventions, prêts à taux bonifiés, exonérations de charges ou de taxes, crédit d'impôts divers, le tout sans aucun contrôle ni aucune obligation étique (parité hommes-femmes, embauche de handicapés, ouverture de postes aux français d'origine différente, non discrimination des eros minoritaires, bonnes pratiques environnementales et sociales, etc...) !























Mes références à Amazon ne sont pas sponsorisées.

dimanche 23 janvier 2011

L'émancipation et le travail des femmes en dates

Rappel des dates qui font l'histoire des femmes au travail et de leur émancipation (?). AH AH.

(Actualisation au bas du billet au sujet du jugement régressif rendu par la Cour d'Appel d'Angers sur la maternité sous X)


































L'infographie est de Mode(s) d'emploi que je remercie. Regardez bien dans les marges. Le billet concerné est ICI.

Voyons un peu : 1972 : Loi imposant égalité de salaire et de traitement entre les hommes et les femmes. Warf, Warf, Warf ! 40 ans après, les salaires des deux restent DIFFERENTS de moins 20 % en moyenne au détriment des femmes, et c'est apparemment incompressible malgré le renforcement de la loi en 2006. Et ce n'est pas la Récession provoquée par le krach financier de 2008 qui va faire changer les choses : en période de récession, les femmes sont de préférence priées de laisser la place aux mecs, sur un marché de l'emploi en "crise", et de mettre leurs revendications sous le boisseau. Rappel : les salles de marché des banques/casinos sont peuplées à 99 % d'hommes ! Ils sont ipso facto responsables, et c'est leur "crise" ! Ils devraient en bonne justice être les seuls à payer l'ardoise, mais ce n'est pas le cas ! Après avoir fait sauter la banque, privatisé les profits et mutualisé les pertes, ils continuent à se faire des couilles en or, et ils spéculent maintenant sur les matières premières, dont les céréales et les légumineuses que nous mangeons !

Loi Roudy de 1983, décret d'application juillet 1983 : interdiction de mentionner dans une offre d'emploi quel que soit les caractères du contrat de travail envisagé ou dans toute forme de publicité relative à une embauche, le SEXE ou la situation de famille,... refuser d'embaucher une personne, prononcer une mutation [....] en fonction du SEXE ou de la situation de famille, prendre en considération le SEXE ou la situation de famille notamment en matière de rémunération [....].
Lors de la parution du décret d'application de la loi Roudy, mon patron de l'époque m'avait envoyé par courrier postal une engueulade préventive à propos de cette loi, précisant que si j'insérais une offre d'emploi de sage-femme* sans la mention H/F ou "le poste est ouvert aux deux sexes" on verrait ce qu'on verrait ! Que ça barderait sérieusement pour mon matricule ! Depuis, si j'avais touché 10 euros à chaque fois que j'ai lu dans un offre d'emploi "homme de terrain", "homme de dialogue", ou homme de tout ce que vous voulez (contrairement à ce que nous expérimentons tous les jours, l'homme est adaptable (dingue !) à toutes les sauces dans les publicités de recrutement !), je serais à la tête d'un bas de laine conséquent. Sans que la DDTE, le commissariat de police, le procureur de la République, la Halde,... alertées ne remuent leur gros derrière. Les bonnes femmes, ça fait secrétaire, caissière et infirmière et c'est juste un salaire d'appoint. Point. Circulez !
Il serait temps de se pencher aussi sur les pratiques racistes, sexistes, âgistes des cabinets de recrutement, ces parasites des ressources inhumaines, qui sont (mal) payés pour faire les basses besognes que les entreprises n'osent plus faire elles-mêmes ! Et notez que mentionner votre situation de famille et le nombre de vos enfants n'est pas obligatoire ni conseillé sur votre CV, cela relève de votre vie privée.

1986 : Légalisation de la féminisation des noms de fonction : vaste rigolade, on meurt de rire ! Même les femmes refusent de les porter au féminin les noms de fonction ! Le féminin n'est pas légitime, le masculin qui l'emporte sempiternellement sur le féminin (règle de grammaire idiote, imbécile, sexiste et ringarde) nous a spoliées du magistère de la parole, donc notre parole ne porte pas, nos opinions sont sujettes à caution (mâle de préférence), mettre un E à un nom de métier masculin relève de la transgression, et directRICE serait moins bien que directEUR, LA ministre et LA maire, ça ferait tarte et serait contraire aux règles de la langue (voir les opinions d'académiciens sous bandelettes poussiéreuses), comme si une langue n'appartenait pas à sa locutrice et que celle-ci peut donc lui faire dire ce qu'elle veut, du moment qu'elle se fait comprendre, et que les règles de grammaire sont juste des conventions. Alors un peu d'audace ?

2000 : Parité en politique : avec amendes ridicules pour les partis qui n'obtempèrent pas ! D'ailleurs, supprimons les amendes et imposons l'application. Car ils ont toujours un homme qui fait mieux l'affaire, les femmes sont invisibles et ne sortiraient pas du lot. Et puis, les femmes collent les timbres et assurent tellement mieux l'intendance des partis. Résultat minable aux deux assemblées : 18 % de femmes députées et  21,8 % de femmes sénatrices.

2001 : Loi Génisson : l'égalité hommes/femmes rentre dans les négociations annuelles en entreprise. Bon, OK. En attendant, j'ai demandé il y a deux ans et demi à mes banques de me donner le lien internet conduisant à leur bilan social, histoire de voir les répartitions de postes par genres, les écarts de salaire éventuels, qui bénéficie de la formation..., et qui la joue casino avec mes économies. J'attends toujours malgré mes relances. Allo ? La Terre ?
Pas de réponse ? Message personnel : vous ne perdez rien pour attendre, la vengeance est un plat qui se mange froid, très, très froid.

2010 : Loi Copé Zimmermann instaure un quota de 40 % (pourquoi pas 50, ils ne savent pas compter ?) dans les boards des entreprises du CAC 40 d'ici 2016. Encore une mesure dilatoire qui ne sera pas implémentée : Copé dans le nom d'une loi, je ne sais pas pourquoi, je le sens mal. Cumulard par excellence, il envoie un mauvais signal d'emblée aux patrons et administrateurs qui ne voient pas pourquoi ils laisseraient leur place à une femme. Parce qu'il s'agit bien de cela : les places sont limitées, ils doivent donc s'effacer pour nous laisser passer !

Au fait, quand les job boards se font leur salon de recrutement en nouvelles technologies (qui n'ont de nouvelles que le qualificatif, en pratique, c'est l'usine de papy gadzart !), ça donne l'affiche ci-dessous : (précision, parce qu'apparemment ce n'est pas évident pour tout le monde un homme seul sur une affiche de forum de recrutement, ça signifie que les femmes n'y sont pas les bienvenues ! Moi, je le lis comme cela). Pareil pour les têtières de cabinets de recrutement -VOIR ICI-, où les femmes, quand il y en a, sont deux pas derrière !

























* Dans sage-femme, contrairement à ce que presque tout le monde pense, le mot femme ne réfère pas à la praticienne MAIS à la parturiente. Un homme qui exerce ce métier porte donc naturellement le nom de sage-femme.

Actualisation au sujet du jugement d'Angers sur l'Accouchement sous X à lire ICI :
Dans cette période de backlash décidément bien dure aux femmes, le jugement rendu dans l'affaire des grands-parents qui demandaient la garde d'une enfant née sous X et qui l'ont obtenue, il ne fait définitivement pas bon être mère dans ce pays ! Leurs droits sont constamment bafoués. Et elles sont toujours considérées comme incapables de prendre seules la bonne décision en ce qui concerne leurs enfants, éternelles écervelées mineures qu'elles sont. Ce jugement d'Angers introduit une brèche dans le droit à l'accouchement sous X. Une femme qui avait offert de pleine volonté à son enfant un avenir qu'elle ne pouvait lui assurer elle-même en le proposant à l'adoption, vient de voir rompu le secret à la demande des grands-parents, qui bafouent par là même la volonté de leur fille. C'est le triomphe de la biologie et des liens du sang, une autre régression dans cette époque régressive.