Après l'attentat islamiste du premier janvier à La Nouvelle-Orléans* dans lequel, selon l'enquête du FBI, l'auteur, citoyen états-unien d'origine indo-pakistanaise Shamsud Din-Jabbar, aurait hésité entre tuer toute sa famille et l'attaque massive dans un lieu public, pour finalement choisir cette dernière option, et aussi puisque nous commémorons les dix ans de l'attentat de Charlie Hebdo, Hypercacher, Imprimerie de Dammartin en Goële commandité par Al Qaïda** en 2015, j'ai voulu relire ce petit ouvrage de Richard Poulin et Yanick Dulong publié aux éditions Sisyphe, les deux auteurs québécois de cet essai sur la dynamique sociale et politique des meurtres en série et de masse, perpétrés à 90 % par des hommes.
Le premier texte est de Richard Poulin : Misogynie et racisme, le fondement des meurtres en série. Le tueur sériel est un homme opérant seul, se choisissant des victimes au hasard, sans lien entre elles, sans mobile apparent, ce qui le rend très difficile à appréhender.
Le second texte de Yanick Dulong : Dans l'ombre des meurtres de masse. Le meurtrier de masse lui a un mobile, haine, jalousie, et surtout, il commet soit des crimes de possession dans le cas des assassinats familiaux, soit il se venge d'un sentiment de tort que la société ou une catégorie sociale lui infligeraient, ses droits acquis seraient lésés. Dans les deux cas, leur carburant est la frustration .
Le meurtre sériel comme le meurtre de masse se comptent à partir de 3 victimes, ce qui inclut les meurtres maritaux et familiaux, le pater familias propriétaire qui tue toute la famille parce que sa femme le quitte (les féminicides), mais aussi les menteurs pathologiques sur le point d'être percés à jour, donc de perdre leur statut social, tels Xavier Dupont de Ligonnès ou Jean-Claude Romand, typiquement ; le meurtrier en série tue ses victimes au hasard ce qui le rend difficile à trouver ; le meurtrier de masse s'attaque lui aux groupes avec lesquels il est en relation : école, entreprises, communautés, famille. Les deux ont en commun d'être commis dans 90 % des cas par des hommes. Les deux auteurs de ce petit ouvrage percutant et nécessaire, rejettent l'explication psychologisante (le pauvre tueur avait des problèmes psychologiques, était incompris, dépressif, et il fut atrocement maltraité dans son enfance, par sa mère généralement -les mères prennent toujours cher) ce qui n'est pas une excuse. La classe sociale la plus maltraitée par la société ce sont les filles et les femmes, elles ne tirent pas dans le tas pour autant. Le 'malheureux' 'monstre' avait des troubles psychiques, c'est un fou, un 'loup solitaire', rien de tout cela n'est avalisé dans cet ouvrage. Les tueurs de masse sont des hommes à la masculinité hégémonique exacerbée, haineux des femmes, des minorités, des homosexuels, ils sont généralement des mâles de la majorité blanche (le type caucasien est majoritaire dans ces crimes) considérant que les privilèges de leur classe sociale de dominants sont acquis, et que si ces privilèges acquis sont lésés, ils pensent pouvoir tirer dans le tas en guise de représailles. Leurs meurtres et tueries sont sexistes, homophobes et racistes, le nombre de femmes victimes, même quand elles ne sont pas visées expressément comme dans la tuerie de l'Ecole Polytechnique de Montréal en 1989, ou dans leur foyer, est considérable. Ils commencent souvent par tuer leur mère ou leur grand-mère avant de faire un carnage dans une zone industrielle, à une fête populaire, ou dans une école. Ces assassinats de masse sont aussi commis pour faire une fin : ils n'en sortiront pas vivants, ils le savent, c'est un "suicide by cops" disent les Américains (suicide par policiers interposés). Bref, pas fichus de partir seuls par leurs propres moyens.
Quelques citations :
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