mercredi 27 juillet 2011

Petits bonheurs de la semaine : Billet bucolique d'été

Puisque taguée par Héloïse (et Euterpe) pour donner son ou ses petits bonheurs de la semaine, voici un reportage photo (merci à Catherine et son gros appareil photo professionnel) sur une de mes fermes pédagogiques préférées avec veaux, vaches, cochons et couvées, destinée aux professeurs et aux enfants des écoles qui confondent l'échelle du cheval et du papillon parce qu'ils ont la même taille dans leur livre d'images. Elles permet aussi de mettre en avant les vaches "qui nous donnent leur bon lait" et les poules "leurs bons oeufs", occultant ainsi les fermes industrielles hors-sol majoritaires où les vaches ne voient plus l'herbe, où les poules pondeuses "vivent" entassées dans des cages ou, pour les poulets de chair, dans des tunnels sans lumière, serrés les uns contre les autres, et où les truies gestantes sont emprisonnées à vie dans des stalles individuelles qui les privent de vie sociale et où elles peuvent à peine tenir debout. J'en ai déjà parlé ICI, mais j'ai promis d'être po-si-ti-ve ! Voici donc les habitantes de la ferme où je vais chercher mes petits bonheurs :

A tout seigneur, tout honneur : Monsieur Coq Gaulois Doré, (race en voie de disparition), proche de la poule originelle : elle est légère et elle vole ! 









Madame Poule Gauloise dorée, plus terne car elle n'a RIEN à prouver, elle s'en fout, elle se contente de son petit châle doré car c'est elle qui choisit le beau mâle avec lequel elle s'accouplera, d'où les fanfreluches indécentes et couleurs chatoyantes d'icelui :



Madame Dinde : tête bleue et oeil doux de velours noir, ici en plein lissage et entretien de plumage, l'occupation favorite des oiseaux :



Les facétieuses chèvres, à grandes cornes dangereuses pour les mains et les bras, mais qui leur permettent de se gratter le dos à des endroits inaccessibles autrement :



Une variété d'oie au milieu de poules prenant un bain de poussière -ça permet d'étouffer les éventuels parasites :



Et mon oie (mâle) préférée : il s'approche de moi en faisant des petits Ouah ? Ouah ? interrogatifs complètement craquants en me regardant de son œil bleu porcelaine.


D'après la technicienne qui s'en occupe, il se prendrait pour une poule car il a été élevé avec des poules ! En tous cas je dois reconnaître qu'il a de désastreuses manières de table : il mange de façon totalement dégueu, se précipitant sur mes biscuits, menaçant mes phalanges avec son bec en simili-plastique, meulant avec son bec en en mettant partout, et donnant des coups aux poules, ses soeurs, qui se précipitent sur les miettes !



Les deux vaches : la Brune, robe chamois, frange rousse et masque noir, (c'est une race laitière : 35 à 40 litres par jour dans un élevage à l'herbe, rien à voir avec la Prim'Holstein émaciée et au pis énorme qui donne ses 40 à 60 litres de lait par jour), et ci-contre, la petite Pie Noire bretonne, races en voie de disparition aussi pour cause de rusticité et de manque de productivité ; vous remarquez qu'elles ont leurs cornes, les vaches laitières d'élevage sont en général écornées jeunes à l'acide, pour le confort de l'éleveur (ils disent que non, mais je maintiens). Évidemment, ces deux vaches ne sont pas traites : elles ne produisent du lait que lorsqu'elles font un veau.

Ci-dessous, la Brune de dos juste pour montrer ce qu'on ne voit jamais avec les Prim'hostein qui n'arrivent plus à marcher en "tricotant" des pattes de derrière, tellement elles ont le pis gonflé ! Oui, je sais, elle ressemble à une petite barrique. Il faut dire que ces deux vaches pâturent toute la journée, qu'elles ont une collation à 10 heures et un goûter à 4 heures : croquettes de luzerne ou ballot de foin. On ne leur demande qu'un veau tous les deux ans, veau qu'elles allaitent et gardent un an environ, avant qu'on le donne à des "collectionneurs" passionnés, et qu'elles pleurent pendant longtemps après qu'il soit parti.




Voilà comment on raconte des histoires d'animaux d'élevage totalement fausses aux enfants des écoles : il y a de moins en moins de vaches à l'herbe, plus vraiment de volailles sur des parcours herbeux (c'est comme cela qu'on dit), mais ça fait plaisir aux enfants et ça rappelle des souvenirs aux parents. Et ça permet d'entretenir la fiction pastorale et bucolique.


Pour être complète, la ferme a également un cheval de trait breton, un chien de garde qui s'énerve sur les passants, un chat beaucoup plus calme, et des grenouilles amoureuses dans la mare.

Je me suis bien amusée aussi à revoir le film des frères Podalydès, Bruno et Denis : Liberté Oléron, film désopilant qui met en pièces le Pater Familias (et vir cretinus -joué par Denis) ridicule et verbeux, puis despotique, et finalement incompétent, qui s'achète égoïstement un bateau pour emmener sa famille visiter l'ile d'Aix par la mer. On évite de peu la tragédie, mais on rit beaucoup.
Et si BADLANDS, le premier film de Terence malik joue dans un cinéma près de chez vous : n'hésitez pas. Sorti en 1973, on y trouve déjà l'inspiration panthéiste de l'auteur, il est évidemment tourné sans les trucages horribles permis par l'informatique, et il est somptueux, surtout la troisième partie road-movie. C'est le meilleur film que j'ai vu ces deux dernières années, dont il surpasse nettement toute la production cinématographique.

jeudi 21 juillet 2011

Guérillères 2


En photo : Monique Wittig

"Elles disent qu'on leur a donné pour équivalent la terre la mer les larmes ce qui est humide ce qui est noir ce qui ne brûle pas ce qui est négatif celles qui se rendent sans combattre. Elles disent que c'est là une conception qui relève d'un raisonnement mécaniste. Il met en jeu une série de termes qui sont systématiquement mis en rapport avec des termes opposés. Ses schémas sont si grossiers qu'à ce souvenir elles se mettent à rire avec violence. Elles disent qu'elles peuvent tout aussi bien être mises en relation avec le ciel les astres dans leur mouvement d'ensemble et dans leur disposition les galaxies les planètes les étoiles les soleils ce qui brûle celles qui combattent avec violence celles qui ne se rendent pas. Elles plaisantent à ce sujet, elles disent que c'est tomber de Charybde en Scylla, éviter une idéologie religieuse pour en adopter une autre, elles disent que l'une et l'autre ont ceci de commun c'est qu'elle n'ont plus cours."

"Elles parlent ensemble du danger qu'elles ont été pour le pouvoir, elles racontent comment on les a brûlées sur des bûchers pour les empêcher à l'avenir de s'assembler. Elles ont pu commander aux tempêtes, faire sombrer des flottes, défaire des armées. Elles ont été maîtresses des poisons des vents des volontés. Elles ont pu à leur gré exercer leur pouvoir et transférer toutes sortes de personnalités dans de simples animaux, des oies des cochons des oiseaux des tortues. Elles ont commandé à la vie à la mort. Leur puissance conjuguée a menacé les hiérarchies les systèmes de gouvernement les autorités. Leur savoir a rivalisé avec succès avec le savoir officiel auquel elles n'ont pas eu accès, il l'a mis au défi, il l'a pris en défaut, il l'a menacé, il l'a fait paraître inefficace. Aucune police n'a été trop puissante pour les traquer, aucune délation trop opportuniste, aucun supplice trop brutal, aucune armée n'a paru trop disproportionnée en force pour s'attaquer à elles une par une et les détruire. Elles alors entonnent le chant célèbre qui commence par, malgré tous les maux dont ils peuvent m'accabler / je reste aussi ferme que le fourneau à trois pieds."

DEMETER CASSIA POPEE TAI-SI FATIMA 
OPALE LEONORE EMMANUELLE BO-JI 
SHIRIN AGATHE KEM-PHET MELISANDE
IRENE LEOKADIA LAURE
 
Ces deux paragraphes dont j'ai respecté la (non) ponctuation, sont tirés des Guérillères de Monique Wittig - Les Éditions de Minuit - et se référent en le contestant au système binaire d'Aristote qui a divisé le monde en deux, rejetant les femmes du côté du froid, de l'humide, du noir, de la lune, nocturne... opposé au côté chaud, sec, clair, diurne, côté du soleil et des hommes, système aristotélicien binaire qui a toujours cours aujourd'hui pour expliquer le monde. 

Et après nous avoir chassées de l'universel en se l'attribuant, ils nous animalisent dans la publicité : sexisme et spécisme, les femmes et les animaux "naturellement" renvoyés à une altérité radicale. Pour protester auprès d'Orangina, c'est chez Emelire. On ne s'est pas concertées, pourtant le blog d'Héloïse parle de guérilla.

vendredi 15 juillet 2011

J'aime pas l'amour

Actualisation 18/7/11

Affaire DSK - Un comité de soutien français à Nafissatou Diallo, présumée victime d'agression sexuelle chez SISYPHE. et  "La seule faiblesse de DSK, c'est le sauté de veau" chez ANgrywOmeNYMOUS.

Je ne sais pas si c'est une "chanson de l'été" ou "pour l'été" mais j'ai toujours beaucoup aimé ce texte : aussi comme Euterpe, et à la demande d'Angèle, voici une chanson interprétée par Olivia Ruiz et écrite pour elle par Juliette ; elle date de 2004 elle n'est donc pas nouvelle, mais elle garde son pouvoir de subversion dans un monde lisse, "tout gluant de glamour", surtout incroyablement autoritaire, sans empathie, et brutal avec les femmes*.
Et elle est un vrai antidote à ce genre d'objurgation, méprisante pour les femmes (éternelles demi-êtres humains) et  renvoyant les gens animaux à leur prétendu néant ! Jean-Jacques Goldman devrait peut être aussi écrire sur l'utra-moderne solitude des hommes.

La petite robe et les bottes blanches Courrèges que porte Olivia Ruiz dans la vidéo me font penser aux tenues blanches de Marlène Jobert dans Le Passager de la Pluie de René Clément (1969).



Olivia Ruiz - J'aime pas l'amour

J'crois pas au Prince Charmant, c'est blabla, c'est du flan, j'aime pas l'amour ! 

* Le sénateur Mahéas condamné deux fois pour agression sexuelle par un tribunal il y a trois ans, a démissionné du Parti Socialiste mais il est toujours sénateur-maire de Neuilly Sur Marne.

lundi 11 juillet 2011

VINCI dégage !




Non à l'aéroport Notre-Dame des Landes - 3 jours de résistance à l'aéroport les 8, 9 et 10 juillet 2011 à Vigneux de Bretagne (44).
Près de 10 000 personnes sur le site le samedi 9 juillet, dont des personnalités politiques pour protester contre la construction de cet aéroport qui prévoit de geler 2000 hectares de terres bocagères agricoles, qui fait doublon avec l'aéroport de Nantes Atlantique et qui est en contradiction avec les engagements du Grenelle de l'Environnement.

Mon précédent billet sur cet aéroport  ICI.

Plus d'information sur le blog Eté 2011 Résistance (crédit photos) et le site de l'Acipa.
Lien vers le site de Ouest-France Nantes relatant la manifestation.

Vinci est le groupe de BTP qui a obtenu la concession de l'aéroport.

mardi 5 juillet 2011

Le bûcher des vanités : renversement

Actualisation 7/7/11 : je rajoute un lien vers un billet sur le blog de Docteure Muriel Salmona qui analyse les pires stéréotypes opposés aux femmes violées et agressées sexuellement et qui laminent leurs plaintes, analyse faite à la lumière de sa pratique professionnelle en psychotraumatologie. On peut aussi lire une interview qu'elle a donné ici à 20 Minutes. 


L'hystérie à la libération conditionnelle surprise de Dominique Strauss-Kahn le 1er juillet n'a eu d'égale que l'hystérie provoquée par son arrestation  ; dans l'emportement, certains commentateurs "amis" du présumé innocent s'étaient laissé aller à dire des phrases regrettables, vite regrettées et vite... oubliées.

Le 1er juillet, (presque) les mêmes ont remis ça ; sur TF1, France2, LCI, rien que des commentaTEURS hommes sur les plateaux lors des éditions spéciales sur la convocation "surprise" du Juge Obus à 17 H 30 tapante. Il faut reconnaître tout de même que sur LCI, il y avait une femme : elle était la seule à avoir un ordinateur portable devant elle, car elle suivait en direct  les tweets des correspondants de presse français et américains présents dans la salle de tribunal, tweets qu'elle répercutait sur le plateau quand on lui donnait la parole et qu'on jugeait qu'ils étaient intéressants, une super secrétaire en quelque sorte, et entre deux tweets, les mêmes éternels éditocrates tiraient des plans sur la comète ! Certains donnaient même une allure revancharde à tout cela : la question (oiseuse et indécente) qui faisait bien frissonner tout le monde : "Peut-il revenir dans les Primaires socialistes ?" Plus quelques dépassements de ligne blanche continue, à tout seigneur tout honneur : c'est frais comme un zéphyr, c'est dans la bonne vieille tradition française : on espère que l'UNESCO va l'inscrire au patrimoine "immatériel" de l'Humanité -enjoy :



Il faut dire que depuis cette malheureuse (pour leurs intérêts de pouvoir) arrestation de DSK, leurs affaires se portaient mal : Christine Lagarde une femme adoubée par les USA et la communauté internationale est nommée à la tête du FMI, Martine Aubry qui devait selon les observateurs patentés se retirer pour laisser comme partout et toujours la place, après l'avoir chauffée, à un homme (DSK) socialiste, et dans la même semaine, Eva Joly, juge femme de fer (dogmatique, en sabir masculin) contre toute attente, comprenez contre les prévisions des prévisionnistes diplômés, dépasse largement le médiatique et tellement sympathique (et pas du tout dogmatique) Nicolas Hulot ! Pour un peu, elles leur auraient tout pris ! Il était temps que cela cesse.

Aussi, cette "menteuse" et "prostituée" de Nafissatou Diallo (c'est ce qu'ils prétendent et tant pis si elle a été violée, faute masculine vénielle après tout, mais mentir sur son état marital, arranger les choses pour être admise après un autre viol sur le territoire américain, sont des péchés mortels impardonnables, eux), est du pain bénit et tombe on ne peut mieux pour arranger leurs bidons qui commençaient à présenter comme un air désordonné.

J'ai lu sur un populaire blog de comptoir (sans lien de référence, comme ça brut de décroffrage !), que Nafissatou Diallo aurait arrondi ses fins de mois par quelques prestations sexuelles tarifées à des clients de l'hôtel. Et alors ? Même si c'est le cas, une prostituée, comme toute commerçante, décide elle-même des heures d'ouverture et de fermeture de son commerce : avant l'heure, c'est pas l'heure, après l'heure, c'est plus l'heure ! On n'entre pas comme cela dans une propriété privée, ni dans une prostituée. Quand c'est non, c'est NON. Le fait est incontournable, les femmes violées sont les seules victimes à devoir présenter des certificats de moralité impeccables, les seules victimes à ETRE d'abord COUPABLES. Éternellement. De "elle l'a bien cherché, elle l'a allumé, elle avait une jupe trop courte ou le slip qui dépassait du jean, elle n'aurait pas dû être là...", à "c'est une menteuse, elle se dit veuve alors qu'elle est mariée et encore pire, mal mariée (franchement, s'il fallait jeter la pierre à toutes les mal-mariées...) à un malfrat maître-chanteur. Mais quel rapport avec un viol ? Et si rapport sexuel négocié il y a eu, que dire du riche client qui refuse de payer après un "rapport consenti" juste avant d'aller retrouver sa femme ? Ah oui j'oubliais, on est en France, il a seulement "sauté la femme de chambre", pas de quoi fouetter un chat ! V(i)oler une prostituée, c'est pas du v(i)ol. Mais quand écoutera-t-on enfin la parole des femmes ?

Quelques liens vers The Daily Beast (filiale Internet de Newsweek), toujours dans le Daily Beast : a questionnable background, et encore ici, et BHL tire les leçons de l'affaire Strauss-Kahn dans le Daily Beast, The New York Times, (tous en anglais mais je préfère les premières mains aux interprétations françaises :((( ) la Revue Esprit, (en lecture payante), Osez le Féminisme, Arrêt sur Image, Les Nouvelles News.

Le Bûcher des vanités est un roman de Tom Wolfe paru en 1987.