Une méta-association (constituée d'autres associations) m'invite par mail à son AG (Assemblée Générale) et me joint le programme de la journée qui va de 10 H à 16 H, samedi. J'ai horreur des réunions où il ne se dit généralement pas grand-chose mais pour une fois, je sélectionne trois points qui m'intéressent et décide d'y aller. Il est hors de question que j'assiste à la journée entière. Je prends la précaution de téléphoner pour avoir des précisions complémentaires sur le lieu de RV (des locaux de fac que je ne connais pas) : on me dit que "c'est près d'un grand parking vide".
Et pour cause : en arrivant, je réalise que c'est assez normal puisque toutes les entrées en sont bouchées ! En me garant comme je peux sous une rangée d'arbres, j'identifie un des participants grâce à un autocollant sur sa voiture. Il me propose que nous allions ensemble au lieu de réunion. Il faut traverser un deuxième parking, une pelouse en friche, contourner le bâtiment en laissant à droite un tas de gravats laissé par la corporation du BTP, escalader une rampe d'accès pour handicapés dont le béton est à peine sec et se faufiler entre deux conteneurs poubelles ; ce faisant, je préviens mon accompagnateur que s'il faut en plus crapahuter sous un taillis et traverser un précipice sur un pont de singe, ma participation à la réunion est compromise. Et au fait, demandé-je, il n'aurait pas été plus simple de choisir comme lieu de réunion une maison des associations en ville, par exemple ? Réponse : un de nos membres connaît bien quelqu'un de la fac, nous y avons nos entrées ! Ah oui c'est vrai, les accointances masculines, j'oubliais, ça facilite tellement la vie, la preuve !
En rentrant dans le bâtiment, (j'espère avoir pris suffisamment de repères visuels pour ressortir de ce piège) nous sommes accueillis par un des organisateurs qui referme à double tour de clé dès que nous sommes à l'intérieur ; devant mon étonnement, il explique que 4 voitures ont brûlé la même nuit, il y a 15 jours sur le parking où je suis garée ! Bigre, c'est Chicago ce quartier : je commence à regretter l'équipée.
Dans la salle, on s'installe autour de tables minimalistes (un plateau 4 pieds) disposées en carré. Presque tout le monde est arrivé. Les hommes portent des pantalons, sauf un qui, prétextant je suppose été caniculaire et réchauffement climatique, est en short raduc, les pâturons à l'air et les doigts de pied confortablement étalés dans des sandales de moine, style François d'Assise, d'une élégance renversante. Au diable les dress codes, on est samedi après tout : casual wear permis !
Comme d'habitude, l'élément masculin est majoritaire : je compte (une de mes insupportables habitudes) 10 hommes pour 5 femmes. On s'assoit ; les retardataires arrivent. Le participant en short (raduc, surtout quand il est assis) prend ses aises en écartant les cuisses en triangle isocèle, l'ingénieure qui est en face de lui a, du coup, une vue imprenable sur son entre-jambe. De tous les participants, elle est la seule salariée, mais je pense qu'elle ne doit pas percevoir un salaire tel qu'il lui faille supporter cela ! Toutefois, l'occasion va lui être donnée de se concentrer sur autre chose : elle a en charge de faire le café et de veiller au réapprovisionnement : quelle chance, elle va pouvoir diversifier ses points de vue !
Ca commence un peu sur les chapeaux de roues, mais très vite, le rythme s'essouffle et devient languissant. Au bout de deux heures on en est à un point et la moitié de l'autre ! Du coup, comme je m'ennuie, j'ai le temps de penser que tous ces mecs ont bien de la chance d'avoir quelqu'une pour s'occuper de l'intendance : remplissage du congélateur et du garde-manger, ménage et entretien ! Ce qui me met immédiatement de mauvais poil et me fait monter la moutarde au nez : j'ai la faculté de m'énerver toute seule. De plus, c'est consensuel mou, voire baveux, tout ce que je déteste. L'ingénieure a manifestement, pour d'excellentes raisons, son voisin de droite dans le collimateur (c'est un concurrent invité), au vu des regards noirs latéraux qu'elle lui lance. Elle va lui envoyer deux flèches crescendo -en fait deux remarques justifiées- et se faire taxer d'agressive ; bon sang, mais c'est bien sûr, les femmes sont agressives !
Sentant venir la stase veineuse et l'ankylose de l'arrière-train sur ma chaise en bois, je me fixe 12 H 30 précises pour lever le camp, en espérant que mes trois points seront examinés. Ce qui n'arrivera pas, évidemment. Et ils se demandent POURQUOI on ne voit pas de femmes dans ces endroits-là ?
Donc, Messieurs, voici quelques tuyaux à titre gracieux pour réussir vos réunions :
Durée : 2 heures MAXIMUM : plus c'est court, meilleur c'est ;
Jamais de réunion après 18 heures, quel que soit le jour de la semaine ;
Se fixer 20 minutes par point à examiner et s'y tenir ; si vous n'atteignez pas de consensus et ne prenez pas de décision, report à la prochaine réunion, mais c'est un échec ;
Soyez brefs, précis et percutants ;
Ne vous censurez pas, dites ce que vous avez à dire poliment mais fermement, sans sortir du sujet ;
TENUE CORRECTE EXIGÉE ; les shorts ne vont qu'aux belles jambes et ne se portent pas en ville avec un marcel !
Les femmes NE FONT PAS et NE SERVENT PAS les cafés. JAMAIS. De toutes façons, vous avez au moins 1 000 ans de retard de service de cafés à rattraper !
Le lieu de la réunion doit être accessible et un plan d'accès complet est remis aux invités ;
Un lieu introuvable, à entrée dissimulée, dans un quartier prétendu hostile où on s'enferme à double tour, ça s'appelle un bunker ; ça ne favorise pas la sérénité ni l'ouverture d'esprit, ni la circulation
des idées ;
Les hommes ne mobilisent pas la parole et laissent parler les femmes ; une femme n'est pas obligatoirement agressive quand elle défend son point de vue ou demande des comptes : elle a juste du caractère, de la personnalité et elle a des résultats à rendre, comme vous ;
Proposez à votre compagne/compagnon de passer sur le chemin du retour au supermarché pour faire les courses, et promettez-lui de vous attaquer aussitôt rentré à la montagne de repassage qui attend depuis trois semaines.
Si vous observez tous ces points, je vous assure que cela va relativiser les enjeux et vous permettre de gagner un temps considérable pour faire autre chose ! Et il y aura un peu plus de femmes dans les parages.
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Voilà qui est bien senti. Moi je me suis aussi énervée toute seule cette semaine à cause de l'informaticien de la boîte qui rembarre les femmes quand elles viennent seules donc isolées se plaindre de déficiences apparues dans le système et qu'il faut à chaque fois aller dénoncer à un chef mâle pour que ce dernier lui tape sur les doigts non pour avoir rembarré l'employée qui mentionnait le fait que des problèmes s'étaient révélés dans le système à cause de lui et de ses bidouillages pourris qui compliqueent le boulot mais à cause des complications qu'il doit se résoudre à modifier ! J'ai dit à un des chefs mâles que cet informaticien était un sale macho qui engueulait les femmes juste parce que ce sont des femmes et il m'a fait une réponse sur le système. Je lui ai dit là n'est pas le problème mais c'était trop lui demander de s'intéresser au problème du machisme.
RépondreSupprimerJe pense que demander à un ingénieur système de s'intéresser au problème du machisme, là, c'est trop !!! Ils passent la totalité de leur temps à régler des problèmes de clés et de boulons (j'en ai connu un qui arrivait en salopette avec une caisse à outils et qui se plaignait que sa vie était un enfer de pleurs et de grincements de dents à tel point qu'il avait toujours l'air au bord du suicide) : se préoccuper de problèmes de société ne fait pas partie de leurs attributions ni de leur fiche de poste ! :-)))
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