samedi 8 février 2014

Quand les carottes sont cuites...

"Les carottes sont cuites" est un idiotisme gastronomique signifiant que la situation est irrémédiablement compromise, sans espoir, selon Wiktionary. Synonyme : c'est la fin des haricots !



Le pouvoir est masculin dans son essence même. Et comme il est sans partage, il permet de faire n'importe quoi, de se conduire comme un voyou sans foi ni lois. Les femmes sont d'avance disqualifiées : trop "émotives", pas assez "barbues", ni "couillues". Et puis, disons-le tout net, en un mot comme en mille, "incompétentes" nous sommes. Cette loi d'airain tolère toutefois une exception : les femmes peuvent hériter du pouvoir quand les carottes sont cuites. Quand il ne reste qu'un tas de ruines fumantes, que le pays est dévasté par des haines raciales recuites, que la faillite économique est patente, ou qu'une institution mondiale tremble sur ses bases, que l'image en est détériorée irrémédiablement. Cinq exemples dans l'actualité récente :


1 - Jóhanna Sigurðardóttir : Avènement au poste de Première Ministre d'Islande en janvier 2009, après le crach financier de 2008 pendant lequel l'économie mondiale s'est effondrée, merci les traders mâles de la finance reine. Les trois principales banques d'Islande, dont la capitalisation boursière était de 900 à 1000 % du PIB (la métaphore de bon sens : ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier fut largement méprisée par ses couillus précesseurs) étaient en faillite, et l'Islande, un pays, pas une entreprise, était en cessation de paiement ! Il fallait le faire, tout de même : ils l'ont fait ! Madame Sigurðardóttir, ancienne hôtesse de l'air, a dû réparer le système bancaire et remettre le pays sur les rails. Elle a été saluée par Forbes comme l'une des 100 femmes les plus puissantes du monde. Elle se serait sans doute contentée d'être reconnue comme parmi les plus compétent-es ! Plus compétente que ses homologues masculins passés et présents, sans aucun doute.


2 - Hellen Johnson-Sirleaf, économiste, actuelle Présidente du Liberia, première femme africaine cheffe d'état élue au suffrage universel, prix Nobel de la Paix. Succède à Charles Taylor, Président du Liberia de 1997 à 2003 : le temps de provoquer une guerre civile, de mettre le feu au pays, d'en faire un tas de ruines et de cendres, des dizaines de milliers de morts, et de déclencher une guerre civile chez la voisine Sierra Leone. Charles taylor a été extradé, emprisonné puis condamné par la Cour Pénale Internationale de la Haye pour meurtres, terreur d'état et viols de guerre. Un très chouette prédécesseur comme on peut voir.


3 - Catherine Samba-Panza, actuelle Présidente élue par le Parlement de transition de la République de Centre-Afrique. Seule dans un pays livré au chaos, à des bandits sanguinaires, aux affrontements religieux et ethniques, aux lynchages, déjà surnommée "Mère Courage" par le Guardian, Madame Samba-Panza fait front à une situation de chaos en succédant notamment au dictateur fou Bokassa, et à un fauteur de coup d'état provoquant une guerre civile, le Général Bozizé. Bon courage, Madame !


4 - Christine Lagarde - Actuelle Directrice du FMI (Fond Monétaire International) depuis 2011, secoué par des scandales de "mœurs" sous la très compétente présidence du super-économiste Dominique Strauss-Kahn, un temps candidat le mieux placé à la Présidence de la France (je garantis avoir entendu ou lu tous ces superlatifs !), soupçonné de multiples harcèlements, d'agressions sexuelles et de proxénétisme. Bref, un "enfant de chœur ", et ultra-compétent. Après sa "démission" forcée par les instances dirigeantes, il est à noter que le règlement intérieur du FMI a été entièrement réécrit pour éviter toutes ambiguïtés dans les relations entre collaborateurs. C'est toujours ça de gagné, on ne va pas faire la fine bouche.


5 - Christiane Lambert, syndicaliste agricole, depuis 2010 première vice-présidente de la FNSEA, puissant et premier syndicat agricole français. Même si la situation n'est pas exactement identique aux précédentes, et même si la présidence de Luc Guyot a été entachée de conflits d'intérêts, il se trouve que ces corporations exclusivement masculines ont une très mauvaise réputation dans l'opinion publique et qu'elles le savent. Contrairement à celles où il n'y a que des femmes parce que les hommes n'y vont pas : le cas des infirmières au zénith de la popularité est emblématique. Christiane Lambert peut donc être considérée comme une femme-alibi (vous voyez bien, on n'est pas des homosexuels refoulés, il y a une femme parmi nous !). D'autant que Christiane Lambert présente, en plus de l'intérêt d'être une femme, celle d'être une petite éleveuse du Maine et Loire dans une corporation qui s'industrialise à marche forcée. Madame Lambert apporte la caution "humaine", "femme", "douce" (selon leurs stéréotypes) dans une corporation brutale d'hommes, de compétiteurs à la (grande) taille critique, cultivant depuis toujours l'entre-soi masculin. Triple avantage, merci Madame !

Une femme au pouvoir est toujours vécue comme une rupture, une entorse à la norme, une innovation, donc dangereuse, comme toute innovation. Elle est placée sous observation stricte, des fois qu'elle ne s'en tirerait pas, pauvre petite. D'où la tentation de lui donner une situation bien pourrie : circonscriptions imprenables en politique, terres brûlées, entreprises sinistrées. Dans ma propre carrière professionnelle, avec le recul, je vois bien qu'on m'a accordé les postes-causes perdues, pendant que les hommes se gardaient la facilité (mieux payée naturellement !), ou que ma candidature est nettement plus acceptable dans les situations les plus challenging. Eux, pas fous, ne s'y risquent pas.

Comme on le voit, quand les carottes sont cuites, mesdames, nous comptons sur vous pour nettoyer les écuries d'Augias, pour remettre de l'ordre dans le chaos par nous créé, pour assainir la situation. Avant notre triomphant retour de pères (paires ?) de la Nation quand la place sera toute propre, grâce à vous. Et puis, quand le train-train quotidien aura fait oublier aux peuples à courte mémoire les vicissitudes passées, on s'arrangera pour vous effacer de l'HIStoire ! Le succès nous sera attribué, les lauriers et les enterrements aux Panthéons nous reviendront de droit. Ainsi va l'HIStoire des Vieux Pères. Je vais conjecturer une hypothèse qui se vérifiera, j'en ai peur : patience Mesdames, vu l'état de la planète, de son climat et de ses terres cultivables, de ses foyers de guerre larvées ou de conflits incandescents, de ses bulles immobilières et financières en devenir, notre gestion se profile à l'horizon. L'humanité dirigée par eux ne fera sans doute pas l'économie d'une catastrophe planétaire.

7 commentaires:

  1. S'il y a bien un poste exposé et au siège éjectable c'est celui de la justice. C'est pour cette raison qu'on y met souvent des femmes ( Guigou, Lebranchu, Dati, Alliot Marie, Taubira) qu'on rendra forcément responsables de "laxisme" en cas de montée de la délinquance.

    Il y a une autre femme qu'on ira certainement rechercher quand le gouvernement actuel n'aura plus aucun crédit , quand tout le monde sera au fond du trou, c'est Ségolène Royal , elle qu'on traitait de "nunuche" ou de "chèvre du Poitou"
    http://www.europe1.fr/Politique/Royal-retrouve-un-Desir-d-avenir-1794739/
    Mais quand on lit les commentaires de cet article, on se dit que la tâche sera rude et les coups bas très nombreux comme d'habitude tant on considère qu'une femme est forcément incompétente (y compris par d'autres femmes) , machiavélique ( Trierweiller était alors le rempart le plus sûr à son entrée au gouvernement), etc...
    Ce lien est une bonne photographie de la place des femmes dans la poiltique:
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_de_dirigeantes_politiques
    La France est très loin d'être la plus avancée en la matière et ce ne sont pas les dernières manifestations de haine et de racisme qui nous indiquent que cela va changer rapidement.

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    1. Effectivement, le "Printemps Français" (ou comment dézinguer les meilleurs concepts par ailleurs, je dirais que c'est plutôt un Hiver Français), en est à demander qu'on expurge les bibliothèques municipales de livres comme La princesse qui n'aimait pas les princes ou Tango à deux papas, une histoire vraie de deux pingouins ! Et les journalistes appellent ça un Pintemps ? Ça alors... Merci de votre passage et de votre commentaire.

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    2. L'histoire des livres que ces abrutis de réacs veulent censurer ça me fait trop rigoler parce qu'alors il faut censurer tous les contes de Grimm , de Perrot et aussi les fables de Lafontaine ..... Parce que dans l'histoire de "peau d'âne" la petite à la fin elle épouse quand même son Royal Papa pour remplacer la Reine Mère qui est morte ...... Alors c'est un peu limite comme histoire , très incestueux ..... Et puis le petit Chaperon rouge qui couche avec un loup ! ..... Ouaih ! Ce serait pas de la zoophilie ça ? ...... Et l'ogre qui mange les enfants ? ...... Y serait pas un peu pédophile par hazard ? ........
      Bon , et alors la Bible on n'en parle même pas ! .... Censurée ! Parce que des histoires zarbi y a que ça dans la Bible ........
      Allez Hop ! On censure tout .....

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    3. Il est tout à fait exact que Peau d'âne est une histoire d'inceste ! La princesse résiste en demandant des cadeaux de plus en plus impossibles à son père et ne trouve le salut que dans les bras d'un homme hors de sa famille. Tu as raison : les histoires d'ogres et de Petits Poucets sont absolument terrifiantes.

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  2. On ne le dira jamais : le mâle est par essence mauvais, ce "e" à la fin est une tentative de plus de se travestir en femme, en victime donc mais cela ne trompe personne et de la même manière que je ne parle plus de history, mais de HERstory, je ne prends plus la peine de rajouter ce "e" collabo quand j'évoque l'engeance masculine... Tenons bon et peut-être qu'un jour nous serons débarrassées de tous ces mâls, de l'enfant au vieillard, ils ne sont que violence et injustice, Sororité sororité Sororité !!!

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    1. Il n'y a pas de fatalité : si on les élevait autrement, ils seraient comme les filles, je n'ose pas espérer que les filles deviennent comme les garçons, quoiqu'ils puissent avoir quelques qualités tout de même. Mais tant que la société les surinvestira et tolérera leurs mauvais coups, on n'avancera pas.

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  3. Trop ça ! Génial ! Je ne saurais en dire plus. Mais on se demande s'ils vont même nous laisser quelque chose à réparer, là. Parce que c'est tellement urgent qu'ils feraient bien de nous laisser la place immédiatement partout. Le danger nucléaire étant le pire. Et la catastrophe climatique étant quasiment irréversible.

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