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samedi 21 septembre 2024

Des Iraniennes - Femme, Vie, Liberté 1979 - 2014 et de quelques autres ouvrages

 

Pour le deuxième anniversaire de l'assassinat de Jina Mahsa Amini par la police des mœurs le 16 septembre 2022 pour un voile mal ajusté, des manifestations contre le régime qui ont suivi, (deux ans d'islamophobie de la part des Iraniennes en Iran comme écrit Charlie Hebdo, en tous cas selon certains critères de la gauche occidentale, -c'est plus facile à défendre quand on ne le paie pas d'injonctions privatrices de liberté de choix comme disent ici celles qui le portent), les Editions des Femmes sortent l'album du long combat des femmes iraniennes pour leur auto-détermination : elles y sont depuis 45 ans ! 
En première partie, anamnèse du départ de Shah Reza Pahlavi et rentrée en Iran de l'Ayatollah Khomeini qui menait en exil son combat depuis la France, et contre-révolution islamique, ou révolution conservatrice, je ne sais comment appeler cela, après la "révolution blanche" (!) du shah qui avait occidentalisé à la schlague le pays, en édictant des lois favorables aux femmes : mobilisation des Iraniennes, soutien des féministes états-uniennes par la voix de Kate Millett, et des européennes notamment. Elles se rendront toutes en Iran pour célébrer les journées autour du 8 mars 1979, Journées Internationales des droits des femmes, vite requalifiées par l'Ayatollah de "concept occidental" pour tenter de contrer le combat universaliste des femmes iraniennes. Puis, en deuxième partie, la mobilisation après l'arrestation et la mort de Jina Mahsa Amini issue de la minorité Kurde, et le soutien des mêmes européennes pendant 2 ans. Le combat continue, les femmes iraniennes sont obstinées, intrépides, elles n'ont peur ni des arrestations ni de la mort. L'ouvrage, en deux parties, comporte des documents, textes, slogans, tracts, affiches et photos des deux époques. Pour documenter la mémoire des âpres combats des femmes contre l'obscurantisme. 

Quand les femmes iraniennes font sauter leurs chaînes, ce sont les femmes du monde entier qui avancent avec elles. "  Antoinette Fouque en 1979. C'est toujours d'actualité. 

" Ils disent : 'ils nous ont trompés', d'autres disaient ; 'un religieux ne peut pas être révolutionnaire. La religion est réactionnaire'. "

Révolutionnaires les hommes, vraiment ? " Grâce au régime et à la religion islamique, les hommes ont pris de plus en plus d'arrogance et même, une certaine arrogance ". Des femmes en mouvement - Juin 1980.

" En Iran, 1981 est-ce réellement la fin du XXème siècle ? Ou le Moyen Age ? Ou une époque plus arriérée encore ? L'Islam est une machine à broyer la vie du corps, la vie privée, la vie publique. Un archaïsme barbare. " Des femmes en mouvement - Juillet / Août 1981.

Les Iraniennes de 1978 / 1979 ont quand même commis quelques erreurs. Par exemple, se recouvrir d'un tchador pour, lors d'une unique manifestation, demander le départ de Shah Reza Pahlavi et l'avènement de Khomeini fin 1978, tchador qu'elles retireront une fois rentrées à la maison. Le voile est facile à mettre, plus difficile, voire impossible à retirer. La preuve, l'Ayatollah l'imposait quelques années plus tard, malgré leur âpre résistance. On ne s'en sert pas impunément comme d'un étendard : celles qui le portent ici en se prétendant rebelles à nos très tolérantes lois et opinion, promouvant une idéologie théocratique conservatrice, feraient bien de s'en souvenir en pensant aux Iraniennes. Les manifestantes de 1979 distribuaient aussi des tracts précisant que ce n'était pas tant contre le voile qu'elles se battaient que pour l'égalité des salaires, l'égalité juridique dans le mariage, le divorce, l'héritage, pour leur indépendance économique. Sauf que c'est un tout : le voile les maintient en état de subordination, il est le symbole de leur effacement, de leur immanente destination première qui est le service des hommes, de leur famille, livrées à leur merci. 
Et autre erreur : croire, comme toutes les femmes qui participent généreusement aux 'révolutions' masculines en prenant les mêmes risques qu'eux, puis, lorsqu'ils estiment que la 'révolution' est terminée selon leurs termes à EUX, se faire renvoyer ensuite dans 'leurs cuisines'. Les problèmes des hommes une fois résolus, les nôtres trouveraient au-to-ma-ti-que-ment une solution aussi. Ils nous ont servi la même antienne à chaque fois. Souvenez-vous de la phase de Françoise d'Eaubonne : " Les hommes ne font pas de révolutions, ils se contentent de remplacer les pères par les fils."


Toujours sur le même thème, et pour célébrer le combat des Iraniennes, en confirmation hélas de ce qui figure plus haut : 

Le rendez-vous iranien de Simone de Beauvoir - Par Chahla Chafiq 


Evoquant à travers les quarante dernières années de l'histoire iranienne les éternelles oppositions entre groupes sociaux de sexe, les femmes priées de ne pas déranger les "révolutions" des hommes avec leurs questions de femmes, d'égalité, leurs revendications toujours subsidiaires aux intérêts des hommes, leurs 'révolutions' à eux devant par miracle résoudre toutes les questions sociales, Chahla Chafiq rappelle à travers la pensée de Simone de Beauvoir qui infuse toujours en Iran, son Deuxième sexe traduit en persan en 1970, que le système patriarcal est universel, et que donc les revendications des femmes à l'égalité et à l'autonomie le sont aussi. Cet ouvrage rafraîchissant sur les traces très actuelles de Simone de Beauvoir dans la perception des iraniennes, est un plaidoyer pour l'universalisme dans une époque relativiste culturelle ou l'intersectionnalité est érigée en outil politique (alors qu'elle n'a de valeur que sociologique), tentée par l'obscurantisme. 

Simone de Beauvoir, femme sujet par excellence, revendique pour les femmes la transcendance, le statut de sujet agissant sur le monde, sorti de l'immanence où tentent de l'enfermer les religions obscurantistes et leur étouffant système patriarcal. La revendication à la liberté et à l'autonomie n'est ni occidentale ni orientale, elle est universelle. Une lecture qui peut bien calmer les ardeurs des différentialistes culturel-les.

Et toujours le journal de voyage de Kate Millett : En Iran que j'avais chroniqué sur ce lien 


Trois ouvrages pour célébrer le courage des Iraniennes.

Nous n'oublions pas non plus les femmes et filles Afghanes privées d'école, d'université, d'indépendance économique, mineures transformées en fantômes sous la féroce férule des Talibans, variante sunnite de l'Islam. Les Iraniennes ont elles, sa version chiite. Les héritiers du prophète se sont battus comme des chiffonniers pour l'héritage de Mahomet. Devenus ennemis irréconciliables, ils s'entendent toutefois sur un seul sujet : les femmes sont offertes comme une terre à labourer et exploiter aux Croyants des deux bords. L'asservissement des femmes fait l'unanimité chez tous les obscurantistes. 


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