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samedi 26 mai 2018

La longue marche des femmes

"Nous sommes les Artemisias des temps modernes : nous frappons !"
Asia Argento, une des plaignantes contre Harvey Weinstein.

Il aura fallu les témoignages de 80 femmes pour faire tomber Harvey Weinstein, alors que l'industrie savait, connaissait ses pratiques. Et encore, il  n'est pas tombé : il a juste perdu de sa superbe et dû vendre à perte sa société de production et son catalogue de films sans que l'on sache ce qui a provoqué en premier sa chute, où le déclin de sa société, ou les plaintes pour agressions sexuelles et viols. Conseillé dans son système de défense par l'ex-avocat américain de Dominique Strauss-Kahn, Benjamin Brafman, il a choisi de plaider non coupable dans le dossier d'accusation de viol et agression sexuelle de deux plaignantes qui l'oppose au procureur de l'Etat de New-York. Cela nous rappelle bien des souvenirs. D'ici qu'il soit relaxé au pénal et condamné au civil, comme dans le cas de DSK, il n'y a pas loin. Mais 80 femmes, tout de même, c'est forte partie.

Même si l'industrie cinématographique revendique une sorte d'extra-territorialité (mais pourquoi, au fait ?), ce serait pas mal de se souvenir qu'une chambre d'hôtel, fût-elle dans une suite de 200 m2, n'est pas un lieu où on discute de contrats et de business. Pour cela il y a des bureaux, des salles de réunions, les grands hôtels proposent les deux à la location, comme les centres d'affaires. C'est vrai pour toutes les professions. Personnellement, j'ai toujours refusé de discuter affaires ou contrats ailleurs que dans un bureau, à une exception près : un bon déjeuner à une table de restaurant, sans boire autre chose que de l'eau en bouteille peut éventuellement aider à faire connaissance et à débroussailler le terrain d'entente. Mais c'est un peu gâcher : j'ai du mal à avaler trois bouchées et profiter pleinement du repas.


Il aura fallu le discrédit de l'Eglise Catholique Irlandaise à travers de multiples scandales de pédophilie (exportés même à Boston), des mass graves (charniers) contenant des cadavres de bébés morts-nés, ou morts d'absence de soins, dans des orphelinats tenus par des religieuses, et les fameuses laundries (buanderies) où des femmes enceintes sans être mariées ayant "fauté", étaient enfermées et exploitées dans de durs travaux non salariés, telles que rapportées par le film de Peter Mullan The Magdalene Sisters en 2002, pour que l'Irlande sollicitée par referendum abroge enfin, par un vote massif, l'affreux 8ème amendement de sa Constitution traitant les femmes en mineures, en les dépossédant de leur droit à disposer d'elles-mêmes et de leur corps.L'Irlande va désormais pouvoir se doter d'une loi sur l'avortement et cesser d'exporter au grand dam de l'Europe qui râlait mais n'en pouvait mais, ses avortements à l'étranger, notamment vers la Grande-Bretagne.
Rassurons les partisans du non au droit à choisir des femmes : ils/elles pourront continuer à avoir autant d'enfants qu'ils le voudront, jusqu'à la ménopause, en se ruinant la ceinture abdominale, et accessoirement le budget familial et les ressources de la planète. Mais en cessant de nous imposer LEUR CHOIX. On les attend maintenant sur le front des réfugiés, de leurs bébés nés qui meurent en Méditerranée, et contre toutes les guerres, puisqu'ils sont "pour la vie", sous-entendant que nous serions symétriquement "pour la mort". C'est le moment de le prouver.

A moins que ? Mais non, je plaisante : ils ne sont pas plus "pro-vie" que je ne suis la Fée Clochette ! On s'en serait aperçu-es depuis longtemps. Leur agenda, c'est d'asservir les femmes à la reproduction, aux "besoins" sexuels et reproductifs des mâles, de nous encombrer de progéniture à ne savoir où la mettre, pendant que les hommes gardent fermement le gouvernail. Les femmes très occupées au gynécée, les hommes palabrant au Parlement, les vaches sont bien gardées ? Personnellement, cette division des tâches en deux équipes, je trouve que ça suffit. Je vois où ça nous mène : à la destruction de la vie sur terre.

dimanche 20 mai 2018

Sexisme, spécisme, "cannibalisme psychique"

En ces temps de Pentecôte, "mangez du veau" selon le slogan marketing du lobby de la viande, -l'élevage envoie à l'abattoir les veaux mâles, sous-produits de l'industrie laitière, réputés inutiles voire parasites puisqu'ils mangent des ressources alors qu'ils ne porteront pas de petits-, et en ces temps de ramadan, je vous propose un tout-images en trois pubs sexistes, et spécistes, ça va de soi, les deux marchant ensemble.


Migros, grossiste alimentaire suisse trouve fin de surfer sur la vague végétale actuelle en proposant aux hommes du "rose" (de la viande blanche de bébé animal anémié ?) sous la dénomination "grilétarien" : le gril, apanage des hommes qui se mettent au "rose" couleur fiiiille, et grillent tout : de la viande, du poisson et des.... légumes ! Leur site Internet : Griletariens.ch, en allemand. Œcuménisme de mauvais aloi, gril couplé avec le même suffixe que végétarien, le tour est joué, le végéta*isme, mouvement social de libération animale, est noyé dans la grillade, la rigolade, et la diversion.


Trouvé cette illustration sur le site Monsieur Mondialisation à propos d'un article sur "la société de consommation : négation de la pensée critique", où curieusement une femme s'enfourne (c'est une sale habitude de l'industrie de la pub, on ne voit pas dans les mêmes proportions des hommes se rentrer des aliments dans la bouche !) un burger avec une étiquette masculine dessus ! Réservé aux hommes ? Donc transgression ? Hors le fait que ce sont toujours les femmes qui sont associées à la consommation, si quelqu'un-e peut m'expliquer.... La subtilité du message m'échappe.


Et enfin, cette réflexion trouvée sur le Twitter des @feralfeminists (féministes sauvages) :
"Quand j'avais 12 ans, j'entendais des garçons me traiter de "crevette". Je demandai à l'un d'eux ce que cela voulait dire. Il répondit : "Quand une fille a un joli corps mais une tête affreuse, elle est comme une crevette. Si vous enlevez la tête, vous pouvez manger son corps". Sexisme est spécisme, concluent les férales féministes. En tous cas, les deux marchent main dans la main. Belle illustration aussi du cannibalisme psychique des femmes par les hommes, évoqué par Ti Grace Atkinson.

Cette semaine, on a entendu Trump s'exprimer à propos des mexicains illégaux aux USA (lesquels leur rendent des tas de services, notamment travailler dans leurs abattoirs, emplois dont les étasuniens ne veulent plus) en les traitants d' "animaux". Renvoyer l'autre à l'altérité radicale en l'animalisant. Le spécisme, cette racine du racisme et du sexisme.

Bonne fête de Pentecôte ou bon ramadan, selon vos croyances, ou juste bon week-end pour celles/ceux qui ne s reconnaissent dans aucune obédience, sans violence, dans l'assiette et ailleurs.

vendredi 11 mai 2018

D'ouvrier d'abattoir à lanceur d'alerte : Ma vie toute crue

"T'es un homme ou un pédé ?  "
" Ferme ta gueule, baisse la tête, fais ton boulot. Et si tu n'es pas content, dégage !"


" Microcosme viril très fortement hiérarchisé dans lequel tu dois faire tes preuves à chaque instant ", l'abattoir est le dinosaure qui a inspiré l'ère industrielle ; l'abattoir est la matrice inversée du travail en miettes : Henri Ford s'inspira dans les années 20 de la chaîne de désassemblage des abattoirs de Chicago pour inventer la chaîne d'assemblage de ses usines automobiles de Détroit. Taylorisme, fordisme. La fragmentation empêche de voir la big picture, et c'est voulu.

" La plupart du temps, sur la chaîne, quand tu es concentré pour tenir le rythme, tu ne vois rien de ce qui se passe autour de toi. Tu ne vois que ta tâche, la globalité de ce qui se passe autour de toi t'échappe. "

La fragmentation du travail va de pair avec les "corps en miettes" des ouvriers, et le désassemblage de la vache, du veau, du bœuf ou du mouton, jusqu'à ce que l'animal ne soit plus reconnaissable dans la viande qu'on vous vendra. Étourdi par un matador, vidé de son sang, les muscles encore vibrants d'effets nerveux et de mouvements incontrôlés, les sabots sont coupés, le corps "vidangé" de ses organes internes, la peau enroulée sur un treuil, découpé à la scie, dégraissé pour ne conserver que le muscle, les abats envoyés dans diverses cuves en inox, au milieu des flots de sang et de merde, le travail d'ouvrier d'abattoir est un travail épuisant et dangereux, soumis à des cadences infernales. " La cadence nous tue. Elle nous broie, nous pousse à faire n'importe quoi.". " On t'insulte, on te harcèle, on te menace pour que tu tiennes la cadence ".

Mauricio Garcia Pereira, le lanceur d'alerte qui informa L214 et le monde de l'abattage des vaches gestantes par l'abattoir municipal de Limoges est un jour en remplacement à la boyauderie (alors que son poste habituel est l'aspiration des moelles de bovins) qui traite les viscères, quand il voit soudain arriver un sac rosâtre qui semble remuer : il réalise alors que c'est un fœtus de veau complètement formé, sabots rose nacré et langue pointant de la poche de liquide amniotique dans lequel le veau s'est noyé au coup de matador tuant sa mère ; troublé, il appelle son chef d'atelier qui lui dit que tout est normal, qu'il n'a qu'à balancer le tout dans la cuve à déchets incinérables ! Après sept longues années de maltraitance, de souffrances physiques, de douleurs d'épaules et dorsales, de mufflées alcoolisées et de shoots de cocaïne "laissées sur la cuvette des WC sur une carte Carrefour" pour "tenir", d'engueulades homériques avec sa hiérarchie, au bord de devenir fou, profondément choqué -le coup de trop, la goutte d'eau-, Mauricio Garcia Pereira voit un soir suivant, par hasard, sur sa télé les effroyables images "volées" en février 2016 par L214 à l'abattoir pourtant certifié bio du Vigan, et après une recherche sur Internet, appelle Brigitte Gothière, co-fondatrice de l'association, en lui disant qu'il a un document vidéo à lui soumettre.
A partir de ce moment, approché par l'association, Mauricio complétera grâce à une petite camera embarquée fournie par L214 sa documentation sur les fœtus de veaux avant de quitter définitivement l'abattoir de Limoges. S'enclenche une séquence trépidante où L214 publie son témoigne qui est aussitôt relayé par la presse et la télévision : Audrey Garric du Monde arrive même dans le petit salon de son HLM pour l'interviewer ! Puis les plateaux de télé s'enchaînent.

Témoignage en deux parties : une moitié du livre est consacrée au monde de l'abattoir, la description irremplaçable, par quelqu'un de l'intérieur, de la chaîne de mort industrielle qu'est l'abattoir, (l'abattoir municipal de Limoges avec " 1500 bovins, 1500 ovins et un millier de porcs abattus chaque semaine, ce qui représente 25 000 tonnes de viande chaque année ", est un des plus grands abattoirs municipaux d'Europe : viennent y abattre les particuliers, les bouchers et les grossistes qui en sont les principaux clients donc patrons), puis en deuxième partie, sa vie de lanceur d'alerte très sollicité par des journalistes pendant quelques mois. Mauricio Garcia Pereira, après des entretiens à propos de ses cauchemars récurrents avec une psychologue qui lui a diagnostiqué un "état de choc post-traumatique", est aujourd'hui en formation pour devenir monteur en réseaux électriques en haute et basse tension, mais il portera à jamais le stigmate du lanceur d'alerte ayant révélé les mauvaises pratiques d'un employeur. Le livre qu'il signe est coécrit avec la journaliste Clémence de Blasi. Lisez-le, et si vous êtes bibliothécaire, achetez-le et faites-le circuler !

Ouvrier d'abattoir n'est pas une vocation : on y va travailler, d'abord recruté par une agence d'intérim, parce que "c'est ça ou la rue" et que dormir dans sa voiture, ça va un moment, mais ce n'est pas une vie à la longue.

" A l'abattoir, les animaux sont terrifiés. Souvent, ils gardent la tête baissée, comme s'ils étaient résignés et acceptaient la mort. Certaines bêtes se battent jusqu'à la dernière seconde, d'autres se laissent tomber de tout leur poids dans le couloir de la mort et refusent obstinément d'avancer, malgré les coups de bâton et les décharges électriques ".

" L'abattage des vaches gestantes est toléré par l'Union Européenne qui indique seulement dans un règlement de 2004 refuser le transport de "femelles gravides qui ont passé au moins 90 % de la période de gestation" (qui est d'environ neuf mois et demi pour les bovins). "

" Où sont les services vétérinaires ? Dans leur bureau autant que possible. [... ] Quand aux contrôles sanitaires, parlons-en ! Peut-être pourraient-ils avoir un impact quelconque... si les abattoirs n'étaient pas prévenus une semaine à l'avance du passage de deux ou trois des 500 inspecteurs de la Santé publique vétérinaire. Tout le temps que le contrôle à lieu, on baisse la cadence de la chaîne au minimum. Pendant ces inspections les ouvriers peuvent enfin travailler normalement, dans des conditions correctes. Mais dès le lendemain, les mauvaises habitudes refont surface. Pourquoi est-ce qu'il n'y a jamais de contrôles inopinés ? "

Souffrance animale, souffrance sociale et humaine. Clairement, les mangeurs de viande prennent des risques. Sanitaires surtout. Et celui de se faire rouler dans la farine de l'abattage rituel aussi : le processus est tellement lourd et long que bien des viandes sont déclarées rituelles qui n'en sont pas. Maltraitance aux animaux, aux humains, mauvaises pratiques, contrôles sanitaires inexistants ou bâclés, grosse cavalerie, insuffisance des étiquetages, omerta sur des pratiques illégales, pas vue pas prise, l'industrie de la viande est un monde opaque qui entend rester bien planqué derrière ses postes de garde avec triples barrières. On ne rentre pas.

" Si les abattoirs avaient des murs de verre, tout le monde serait végétarien ". Paul Mc Cartney.

Aujourd'hui encore, puisqu'il n'y a pas de loi l'empêchant, l'abattoir de Limoges continue à abattre des vaches gestantes, arrivées par "accident", les éleveurs qui paient très chers leurs inséminations artificielles ne s'apercevraient de rien. Qui croit ça ?

Les caractères gras et rouge sont des citations du livre. 

jeudi 3 mai 2018

Le Mouvement des Femmes n'a pas d'ennemis ?

La récente attaque terroriste (cela ne fait pas de doute) de Toronto par un masculiniste "incel" qui voulait se venger des femmes qui lui refusent l'amour, l'attention, et les services sexuels auxquels il croit avoir droit, faisant un nombre important de victimes femmes, implique qu'Alek Minassian désigne les femmes comme étant l'ennemi qui ne veut pas coucher avec lui. Infortuné "célibataire involontaire", il se venge, comme avant lui Marc Lépine et Elliot Rodger, respectivement tueur de Polytechnique Montréal en 1989 dont les femmes prenaient la place réservée, et le "gentleman suprême", auteur de la tuerie d'Isla Vista Californie en 2014. Les femmes n'auraient pas d'ennemis, mais les hommes oui, et ce sont ces satanées femmes subverties par le féminisme qui ne veulent pas coucher avec eux ! Je vous propose un texte écrit par Ti Grace Atkinson en 1969. Les femmes n'ont pas d'ennemis ? Il est peut-être venu, le temps de la clairvoyance.

DÉCLARATION DE GUERRE

" Almanina Barbour, une révolutionnaire noire de Philadelphie me disait un jour : "Le Mouvement des Femmes est le premier de l'histoire qui soit en guerre sans avoir d'ennemi". Je sursautai. Sa critique était pertinente. Je me creusai la tête, cherchant une réponse. Cet ennemi, nous l'avions sûrement défini à un moment ou à un autre, sinon qu'avions-nous cherché à abattre au cours de ces deux dernières années ? Avions-nous juste tiré en l'air ?
Deux réponses seulement me vinrent à l'esprit, mais en les cherchant je compris que la question avait été jusqu'alors soigneusement évitée. La première, et de loin la plus fréquente des réponses était "la société". La deuxième, moins fréquente et toujours furtive, était "les hommes".
Cette affirmation que "la société" est l'ennemi, comment faut-il l'entendre ? Si les femmes sont opprimées, il n'existe qu'un seul groupe qui puisse les opprimer : ce sont les hommes. Alors pourquoi les appeler "société" ? En disant "société" voudrait-on indiquer les "institutions" qui oppriment les femmes ? Mais il faut bien que les institutions soient maintenues, et la même question se pose : par qui ? La réponse à la question "qui est l'ennemi ?" est tellement évidente que le problème intéressant devient vite "pourquoi l'a-t-on évitée ?".
Le maître pouvait tolérer bien des réformes dans l'esclavage, mais aucune qui menaçât son rôle  essentiel de maître. Les femmes l'ont toujours su, et comme "hommes" et "société" sont en effet synonymes, elles ont eu peur de les affronter. Privé de cet affrontement et d'une compréhension rigoureuse de la stratégie masculine de lutte, si habile à ligoter les femmes, le "Mouvement des Femmes" est plus nocif qu'utile. Il provoque la réaction en retour des hommes sans faire progresser les femmes.

Il n'y a jamais eu d'analyse féministe. Le mécontentement des femmes et les tentatives de remédier à ce mécontentement, ont montré implicitement que les femmes formaient une classe, mais n'ont jamais donné lieu à une analyse politique de classe, en terme de causes et effets. Autrement dit, la persécution des femmes n'a jamais été prise pour point de départ d'une analyse politique de la société. Si l'on considère que la dernière grande vague de mécontentement des femmes a couvert 70 ans (1850-1920) et fait le tour du monde, et qu'une récente accumulation de griefs a commencé, ici, en Amérique, voilà environ trois ans, l'absence d'une explication structurale du problème est à première vue incompréhensible. C'est pour comprendre les raisons de cette omission dévastatrice et les conséquences de ce problème que nous en sommes venues au "féminisme radical".
Les femmes qui ont essayé de résoudre leurs problèmes en tant que classe ont posé des dilemmes mais n'ont pas proposé de solution. Les féministes traditionnelles demandent l'égalité des droits des femmes et des hommes. Mais sur quelles bases ? Si les femmes ont une fonction différente de celle des hommes, cette différence n'affecte-t-elle pas nécessairement les "droits" des femmes ? Par exemple, est-ce que toutes les femmes ont le "droit" de ne pas avoir d'enfants ? Le féminisme traditionnel est pris dans le dilemme de demander une égalité de traitement pour des fonctions différentes, parce qu'il est peu disposé à affronter la classification politique (des fonctions) par sexe.
Les femmes radicales, par contre, comprennent que considérer les femmes comme un groupe, c'est rendre possible une analyse politique de la société, mais elles ont tort de refuser de comprendre pourquoi les femmes forment une classe, pourquoi cette classe est particulière, et quelles sont les conséquences de cette description pour le système des classes politiques. Les féministes traditionnelles aussi bien que les femmes radicales ont évité de remettre en question une fraction quelconque de leur raison d'être ; si les femmes sont une classe, les termes de ce postulat initial doivent être examinés.
Le dilemme féministe est le suivant : c'est en tant que femmes -ou "femelles"- que les femmes sont persécutées ; de même c'était en tant qu'esclaves -ou "noirs"- que les esclaves étaient persécutés. Pour améliorer leur condition, ces individus qu'on définit aujourd'hui comme femmes doivent détruire la définition de leur être. En un sens, les femmes doivent se suicider, et le trajet qui mène de la féminité jusqu'à une société d'individus est hasardeux. Le dilemme féministe est que nous devons faire le maximum avec un minimum de moyens. Aucun autre groupe dans l'histoire n'a été contraint comme nous de tout recréer depuis le début.
La "guerre des sexes" est un lieu commun, depuis toujours et partout. Mais c'est une description inexacte des faits. Une "guerre" implique un certain équilibre des pouvoirs. Quand les pertes sont toutes du même côté, comme dans certains types de raids (souvent appelés "viols" d'une région), cela s'appelle un massacre. Les femmes en tant qu'êtres humains ont été massacrées à travers toute l'histoire, et ce destin découle de leur définition. Commencer à se grouper, voilà le premier pas que les femmes doivent faire pour ne plus être massacrées, et pour engager la bataille (la résistance). Espérons que ceci conduira éventuellement à la négociation -dans un futur très lointain- et à la paix. "

Ti Grace Atkinson
Odyssée d'une Amazone - Des femmes Editeur
Avril 1969.

" Il a fallu programmer les structures psychiques des femmes pour la non résistance, et la raison en est simple : elles représentent plus de la moitié de la population du monde. "